Je devrais peut-être penser à fermer la porte à clef lorsque je fais de la magie. Cela m'éviterait de mauvaise surprise comme celle-là. Planté au pied de mon lit, Rubens m'étudie comme un prédateur devant sa proie. Son regard me donne l'impression d'être un steak devant un carnivore qui n'a pas mangé depuis un bon bout de temps.
Bien que cela ne serve à rien, je recouvre le grimoire à l'aide de ma couverture. Mon geste le fait sourire, et s'il n'y avait pas cette désagréable sensation lorsqu'il pose ses yeux sur moi...j'aurais pu le trouver charmant. Pas mon type, mais il a un physique attrayant.
- Corey m'a caché que son meilleur pote est un sorcier.
Entendre le nom de Corey et la vérité que je lui cache dans une même phrase me donne des sueurs froides.
- Ce qui est étonnant vu l'aversion qu'il a pour eux, ajoute-t-il en promenant son regard dans ma chambre.
- Corey déteste une sorcière...pas toute la race.
Son sourire en coin me dit que mon bluff n'a pas eu l'effet escompté.
- Savoir que son meilleur ami, celui qu'il considère comme son frère lui ment...devrait l'anéantir, non ?!
Il dit cela en prenant l'un des cadres photo sur ma commode.
- Corey ne doit pas savoir, je souffle les yeux fixé sur le visage enfantin de mon meilleur ami.
J'espérais trouver le bon moment. Avant notre emménagement ici, j'aurais naïvement cru que notre amitié pouvait tout supporter. Mais depuis notre dispute, je sais bien que dans l'état actuel...je le perdrais s'il venait à savoir.
- Qu'es-tu prêt à faire pour qu'il ne découvre pas ton vilain secret ?!
Son regard a pris une autre teinte, il est maintenant luisant comme celui d'un serpent. Je force mon corps à ne pas reculer.
- Qu'est-ce que tu veux ?!
En un clignement d'yeux, Rubens se trouve devant moi. Sans ciller, il me relève d'un bras.
- La seule chose que tu puisses m'offrir et qui a de la valeur.
Naïf que je suis, la première chose qui me vient en tête c'est le sexe. Mais quand j'aperçois ses canines pointues, je me rends vite compte que je vis dans un monde ou le sang à bien plus de valeur que l'argent ou même le sexe.
- Vous n'avez pas le droit de mordre, dis-je en le repoussant plus pour la forme puisqu'il me tient fermement le bras.
- Tu es plus tôt doué pour garder des secrets, non ?!
Mon impuissance face à la situation m'enrage. N'importe qu'elle sorcier confirmé ou non, devrait être capable de tenir à distance un vampire isolé. Mais de mon côté, à part le faire cramer – ce qui me poserait un autre problème – je n'ai pas d'autre échappatoire.
- Tu me donnes ta parole...Corey n'en saura rien ?!
- Ne t'inquiète pas...ton secret sera bien garder avec moi.
Qu'il s'approche de moi d'aussi près me révulse. J'étouffe avec toute la peine du monde cette impression folle que je vais crever.
- Qu'est-ce que tu fais ?! Je lui demande lorsqu'il nous fait basculer sur le lit.
- Autant prendre du plaisir, non ?!
- Je doute fort qu'un jour je prenne du plaisir à me faire mordre.
La douleur lorsque ses crocs me transpercent la peau est bien loin de la sensation d'aiguille que j'ai pu lire. Dans ce cas, ce serait une très grosse...vraiment très grosse seringue ! Rubens s'accroche à mon avant-bras avec une telle force que je ne serais pas étonné d'avoir des bleus.
A sa première goulée, je ne peux empêcher mon esprit de se détacher de mon corps. Quiconque me verrais, penserais que je suis catatonique. Mais ce n'est juste qu'un mécanisme de défense mis en place par mon cerveau.
Analyser comment le sang est devenue une valeur marchande au fil des siècles, m'empêche de penser à quel point je me suis enliser dans toute cette histoire. Maintenant, me voilà avec deux marchés sur les bras. L'un bien plus plaisant que l'autre, bien évidement.
Groggy, je reste allongé quand Rubens c'est assez repu de mon sang. J'ai l'impression que mon bras est fait de plume lorsque je le lève devant mes yeux. Deux petit troue rougie remplace la surface lisse et blanche de mon poignet.
- C'est un plaisir de faire affaire avec toi.
Sa voix est comme prise dans un brouillard. Tous les sons extérieurs me parviennent de très loin.
***
Je ne me rends compte de mettre évanouie, qu'en reprenant connaissance. J'ai la tête lourde, et les batteries complètement à plat. Mon bras engourdi me rappelle la raison de ma perte de connaissance. Les jambes en coton, je me dirige vers ma salle de bain, et sort du tiroir à pharmacie un pansement adhésif. Pas très discret, mais je préfère cela que me balader avec une morsure de vampire à la vue de tous. Ce point réglé, je descends en cuisine trouver de quoi me remettre d'aplomb.
Trouver Corey ici ne devrait pas me surprendre. C'est juste le fait qu'il soit seul qui m'étonne...bien que cela ne me déplaise pas de ne pas croiser Rubens. J'ouvre le frigo et en sort une brique de jus d'orange. Cette tension qu'il y a entre nous m'attriste. Mon meilleur ami me manque. Alors que j'allais briser le silence, je sens la poche arrière de mon jean vibrer. J'en sors mon portable et remarque qu'un numéro masqué tente de me joindre. Je ne réponds qu'au bout de la seconde tentative.
- Allô...
- Lincoln ?!
Je n'en crois pas mes oreilles...non c'est impossible, je suis encore dans les vapes. Ce ne peut pas être elle !
- Maman ?!
- Il faut que l'on se voie...rejoins moi à la maison blanche à la sortie ouest de la ville !
Et elle raccroche. Depuis leur départ en voyage, ils n'avaient communiqué que par mail. Jamais – pas même pour mon anniversaire – je n'ai eu droit à eu appel. D'une main tremblante, je pose le téléphone sur le meuble.
- C'était bien elle ?!
La voix de Corey me fait sursauter. D'un coup, j'ai la bouche sèche et beaucoup trop chaud. J'ai toujours dis que je m'en fichais d'eux. Mais savoir ma mère ici...me remplis d'un sentiment de joie.
- Linky, qu'est-ce qui se passe ?! Il est arrivé quelque chose à ton père ?!
Je ne m'interroge même pas sur la précision qu'a faite preuve ma mère pour le lieu de rendez-vous. Tant un élan juvénile agit comme une poussée d'adrénaline et fait oublié à mon corps sa récente perte de sang. Ma mère est en ville !
- Conduit moi à la sortie ouest de la ville !
Je ne lui laisse pas le temps de m'interroger que je sors déjà de l'appart. Le trajet se fait en silence, mon impatience est bien trop forte pour faire un bilan de la situation. Lorsque j'aperçois la fameuse maison blanche, je demande à Corey de se garer devant.
Cette maison semble inhabité et ce depuis un bout de temps. En cognant contre la porte, j'ai peur qu'elle me tombe dessus, tant elle est en piteuse état.
Tout comme moi, Corey capte un mouvement à l'intérieur. L'une des fenêtres barricadées a perdu une planche, ce qui nous permet de voir à l'intérieur. Comme toujours lorsqu'il sent un danger, Corey vient se poster devant moi. Malgré notre période à froid, tout est naturel chez nous. Lorsqu'il me regarde, je comprends tout de suite qu'il va faire le tour de la maison. J'attends donc encore deux minutes avant d'ouvrir – avec peine – la porte.
Malgré les fenêtres barricadées, la douce lumière de la fin de journée arrive à se faufiler à l'intérieur. Le bois pourris grince sous mes pas, mais je continue d'avancer. Encore une fois, mon regard surprend un mouvement. Me concentrant, je tends l'oreille afin de déterminer son prochain mouvement. De tel sorte que lorsque l'ombre bouge à nouveau, le craquement d'une planche le clou sur place. Cette maison est tellement délabrer, que personne – surtout Corey – ne pensera à la magie.
Corey me rejoint au moment même où je me rends compte que l'ombre qui n'a cessé de se faufilé d'une pièce à l'autre n'est d'autre que mon père.
- Chéri ça va, s'enquière maman en se précipitant sur mon père.
N'importe qu'elle enfant n'ayant pas vu physiquement ses parents depuis un bon bout de temps, se jetterais dans leur bras. Mais, ce n'est pas mon cas. Un détail attire mon attention. Le regard brillant de ma mère s'attarde sur moi, avant de se poser sur mon poignet. Instinctivement, je cache mon bras derrière mon dos.
- Depuis quand êtes-vous des vampires ?! Je leurs demande.
D'un mouvement, mon père se libère des planches de bois sans la moindre grimace.
- Ce n'est pas le point le plus important, me dit ma mère.
- Qu'est-ce que cela signifie ?! Pourquoi me demander de venir ici ?!
Mes parents échange un regard avant que mon père ne prenne la parole.
- Pourquoi avez-vous quitté Eguals ?! Cette ville n'est pas sûre...
- En quoi Fields Creek n'est pas sûre ?! Je l'interromps.
Aucun des deux ne dit un mot.
- Si c'était pour « ça » vous auriez mieux fait de rester à distance ! Cinq ans que vous avez fait vos valise et que vous nous avez laissé sur le carreau...alors pourquoi revenir aujourd'hui ?!
Encore une fois, ils gardent le silence.
- Nous devrions rentrer à l'appart, propose Corey. Nous y serons plus à l'aise.
- Nous ne pouvons pas rester, ce n'est pas sûr pour nous ici. Souffle ma mère.
A partir de cet instant, je n'écoute plus rien. Tout adulte garde en lui un bout de son enfance. La présence de Corey en est la majeure partie dans mon cas. Mes parents l'autre. Quel que soit l'âge que nous avons, nos parents seront toujours la faiblesse de notre cœur. Et c'est pour cette raison que j'ai mal. Ils ont préféré l'immortalité à moi...leur fils !
***
Contre toute attente, mes parents décident de venir avec nous. Dès notre retour je monte directement dans ma chambre. Refermant la porte derrière moi, je m'y adosse et vide tout l'air de mes poumons. Juste au moment où je pensais que rien de pire ne pourrais m'arriver, je me prends un autre coup.
- Linky ?!
Le seule point positif que je vois dans le situation, c'est que cela à permis à ce que Corey et moi passions outre notre querelle.
- Une minute...
- Ouvre-moi ! M'ordonne-t-il en abaissant la poignée.
- Juste une putain de minute...c'est trop demander ?!
- Ok...je reste devant la porte au cas où.
- Merci.
Je n'arrive plus à réfléchir...c'est trop d'un coup. Me laissant glisser contre le bois de la porte, je fais un constat de la situation. Mes parents m'ont abandonné pour devenir des vampires. Je suis un sorcier ayant un accord avec deux vampires. Je commence à reconsidéré le sort de sommeil de Keith. Je n'aurais qu'à fermer les yeux, et tout disparaitrait.
- Linky se sont tes parents...c'est normal que malgré le fait que tu leur en veuille, une partie de toi est heureux qu'ils soient là.
J'aimerais que ce soit aussi simple qu'une crise d'ado. Mais c'est bien plus compliquer. Je finis par sortir de ma chambre et descend affronter mes parents.
- Nous devons partir, Lincoln.
- Pourquoi ?!
- Nous sommes des hors la loi, n'importent qu'elles vampire pourraient nous dénoncer...et nous serions exécutés.
- Vous auriez du y pensé plus tôt ! Qu'attentiez-vous en venant ici ?!
- Ta mère savait qu'une mise en garde autrement faite en personne n'aurait aucun effet. Elle voulait venir seule, mais c'était impossible que la laisse courir se risque seule !
- Quel que soit le risque, cela ne vous a pas dérangés de nous abandonner ! J'aimerais savoir...quand vous êtes-vous décidez ?! Avez-vous ne serait-ce une minute pensé à moi ?!
- Nous communiquions...
- Par des putains d'emails ! C'est de mes parents dont j'avais besoins ! Vous nous avez largués à vingt ans...et ce n'est pas grâce à vous que nous somme qui nous sommes aujourd'hui !
Mes paroles sont dures, mais j'en ai besoin. Qu'ils ressentent une infirme partie de la douleur qu'ils m'ont fait ressentir.
- Ta mère était malade, voilà ce qui nous a décidés ! Elle allait mourir...rien dans la médecine classique ou magique n'aurais pu l'aider. Ils ne nous restaient que ce choix-là ! La raison pour laquelle nous sommes partis « faire le tour du monde » c'est parce que vous n'étiez pas en sécurité avec nous ! Je comprends ta colère, mais nous avons fait ce que nous pensons juste pour vous !
- Juste pour nous ?! Je répète. Ce qui aurait été juste c'est de nous en parler. Avez-vous la moindre idée de ce que j'ai pu ressentir ?! Comment je me suis remis en question ?! Pourquoi mes parents ne voulaient plus de moi...voilà la question qui n'a cessé de me pourrir la vie durant un an !
Savoir que ma mère allait mourir atténue un peu ma colère. Mais qu'ils me l'aient caché la ravive...cruelle paradoxe.
- Nous ne voulions pas vous imposer un choix. Cette vie que nous menons...c'est nous qui l'avons choisi.
- De quelle mise en garde parlez-vous ?! Intervient Corey.
- Une guerre se prépare, et Fields Creek sera son épicentre...vous ne pouvez pas rester ici.
Je crois entendre Keith avec sa fameuse menace. Si mes parents en ont entendu parler, c'est qu'elle n'est pas si éventuelle que ça.
- Crois-moi Lincoln, si nous avions pu faire autrement nous l'aurions fait. M'affirme maman.
- Si j'avais un moyen d'arranger les choses...resteriez-vous ?!
- Comment comptes-tu faire ça ?! Me demande-t-elle.
J'ai un atout dans ma manche qui va me permettre d'arranger tout ça. Ou dans un autre cas, mettre à l'abri les gens que j'aime.
- Juste donnez-moi un mois !
- Un mois ?! Nous ne pouvons pas rester ici...c'est bien trop dangereux.
- Je m'occupe de tout, j'assure. Juste promettez moi de rester ici durant un mois.
C'est ma mère qui cède la première. Elle a toujours su faire plier mon père. Lorsque nous passions des heures à nous entraîner, heures ou mon père nous faisait refaire sans cesse le même enchainement jusqu'à ce qu'il soit instinctif...c'était elle notre salut.
Avec eux ici, je n'ai vraiment plus de temps à perdre. Je dois établir un plan d'action et m'y tenir méticuleusement. La première étape, rendre leur situation à peu près légale,afin de leur éviter de sans arrêt regarder par-dessus leur épaules. Et j'aurais besoins de l'aide de quelqu'un !
✯✯ Chapitre en attente de correction✯ ✯