DE SANG ET D'ARGENT T4 Find o...

By Shirayukitaki

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DE SANG ET D'ARGENT TOME 4. L'existence de Némésis Lane est un secret. Un secret bien gardé par le Gardien... More

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Meute Jahyan & Shana Pearson
Rangs des loups
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1. Némésis

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By Shirayukitaki


Le soleil tapait fort, malgré le fait que nous ne soyons que début mai. Mais cela ne surprenait plus personne ; ça faisait quelques années que c'était comme ça et tout le monde devait s'habituer, humains comme loups. Ces derniers avaient plus de mal, mais comme tout, il était question d'adaptation. Dans le siècle où nous nous trouvions et avec tout ce qui c'était passé, il n'était question que de cela. C'était devenu le grand mot à la mode, avec cohabitation. 

Celui là par contre posait un peu plus de problème, surtout quand des groupes d'humains extrémistes se mettaient en tête de traquer les loups et de les tuer.

Tout n'était pas aussi rose qu'on essayait de le faire croire et on ne pouvait pas dire que le coming-out c'était bien passé. Au début, ça n'avait pas trop fait de vague, mais maintenant, ce n'était plus vraiment ça et pour dire clairement ; c'était un peu la merde. Mais tout le monde gardait bonne figure et les médias savaient garder pour eux les mauvaises informations pour ne pas alerter tout le monde ; pour ne pas laisser un vent de panique se lever.

Mais ce n'était pas facile, avec la nouvelle récente que l'autre côté – le monde des surnaturels -, possédait aussi des Chasseurs, les humains avaient eu peur. Parce que pour eux, les Chasseurs étaient des mercenaires, des barbares et à bien des égards, il n'avait pas tout à fait tort. Et ils se demandaient alors quelle serait la prochaine « race » à faire son apparition, comme si des loups, des vampires, des sorciers et des Chasseurs ce n'étaient pas suffisant.

Le monde était bien plus vaste que ce que les gens pouvaient penser. Et il y avait beaucoup de choses qui étaient restées cacher et qui le resterait encore pendant bien des décennies, voir même des siècles.

Tout était à découvrir, mais rien ne devait se perdre. Parce que l'histoire était notre héritage et que ce qui s'était passé avant façonnait ce que nous étions aujourd'hui. C'est ce que Benjamin avait dit. Et qui mieux qu'un historien tel que lui pouvait comprendre ce genre de chose ? Il possédait des connaissances que même cent loups n'avaient pas et son savoir était grand ; il avait parcourut la terre entière, à la recherche de la connaissance. Il n'était pas celui qui en savait le plus sur notre peuple, mais il savait beaucoup de chose.

Des choses oubliées par trop de monde. Il avait rencontré des peuples et apprit leur langue, il s'était perdu en Équateur et y avait découvert des cités ensevelies, des mondes oubliés. Et tout était dans sa tête, tout était dans des livres et dans des documents qui partaient en poussières quand vous les preniez dans vos mains.

Aujourd'hui, Benjamin était Alpha et gérait une meute. Il ne regrettait pas cela. Il avait une femme et des enfants et savait que ce n'était plus à lui de découvrir les merveilles que recelait notre Terre. Mais quand on lui posait des questions, il répondait toujours. Et quand quelqu'un voulait savoir quelque chose, c'était toujours vers lui qu'on se tournait.

Même le Gardien.

Il n'était pourtant pas le plus vieux loup que portait cette terre, mais il était celui qui en avait vu le plus. Tout pays confondu.

C'était vers lui que j'étais allé en quittant ma meute.

C'était vers lui que j'étais allé quand j'avais eu soif d'apprendre. Et il avait été un très bon professeur qui ne se fatiguait jamais de raconter les mêmes histoires.

Il y prenait un tel plaisir, cette étincelle de pur bonheur dans les yeux. Il m'avait permit de feuilleter sa bibliothèque et de prendre les livres que je voulais.

Et j'avais appris.

Appris ce que peu des nôtres savaient.

J'avais passé des années enfermée dans la bibliothèque de Benjamin, oubliant de vivre, oubliant de penser au monde qui m'entourait. Essayant de combler ce vide en moi. Et ça avait marché, ou du moins je l'avais cru.

Plus j'en lisais, et plus je voulais en savoir plus.

C'était un besoin, plus qu'une simple façon de m'occuper. Enfin, je faisais quelque chose que je voulais et il n'y avait personne pour m'en empêcher, personne pour me dire de faire ça comme ça ou comme ci.

Je pouvais être celle que je voulais, sans savoir qui j'étais vraiment.

J'appris les histoires par cœur, pouvant les réciter presque par cœur. Quand je fermais les yeux, je pouvais presque voir les endroits que Benjamin avait visités et avait vus de ses propres yeux. Et il n'y avait alors rien de plus beau. Rien de plus vrai.

Et les années défilèrent ainsi.

Pas juste trois ou quatre ans. Mais bien vingt ou vingt-cinq.

Et quand j'eu ouvert chaque livre de chaque étagère et que Benjamin m'eut raconté encore et encore les mêmes histoires, je partais.

Pas une seule fois je ne retournais dans ma meute, une meute qui n'avait jamais été vraiment la mienne. Et je laissais les questions de côté.

Je laissais mon passé de côté, sachant que ce n'était pas encore le moment pour moi de savoir, de chercher.

D'autres années passèrent. Encore et encore.

Et aux connaissances de Benjamin, d'autres vinrent s'ajouter.

Je posai le stylo sur la table et secouai mes doigts en levant mon visage vers le ciel d'un bleu profond et sans aucun nuage. Il faisait beau et chaud. Pas vraiment lourd grâce au petit vent qui soufflait et c'était plus qu'agréable. Je savais que ce n'était pas le cas partout et que beaucoup d'État était en alerte rouge ; la canicule était en train de s'installer et menaçait de rendre fou beaucoup de loups. Étrangement, la chaleur ne m'avait jamais dérangée, même quand elle atteignait des records. Mais le Montana n'était pas un État très aride, à l'inverse du Wyoming par exemple. Nous avions plutôt de la chance.

Je n'étais certes pas tout l'année ici et je n'y passais que quelques mois, mais la tranquillité du lieu me plaisait. Je passais trop de temps dans les grandes villes, je passais trop de temps à aller de petites meutes en petites meutes pour voir, pour comprendre, pour apprendre.

La maison cachée par les arbres plus loin derrière moi n'était pas mon chez moi, aucun endroit ne l'était, mais j'aimais venir ici. J'aimais faire le travail qu'on me donnait, en rechignant parfois parce que j'avais mal à la main à force d'écrire et de recouvrir des pages et des pages alors qu'un ordinateur aurait été plus pratique. Mais la technologie n'était jamais parvenue jusqu'ici. En fait, nous étions comme coupé du monde, comme dans un autre temps. Mais c'était souvent le cas quand on arrivait chez de très vieux loups qui étaient très, très conservateurs.

Heaven était de ce genre. Très vieille, mais surtout, conservatrice à souhait. Elle vivait reculée de tout, mais elle n'oubliait pas le monde qui nous entourait.

Pendant longtemps, elle avait été considérée comme la plus vieille louve que portait ce monde, mais moi, je savais que c'était faux. Je l'avais appris en lisant, je l'avais appris en parlant avec d'autres vieux fous. Heaven était vieille, mais ce n'était pas les plus vieux loups de notre peuple. Elle était la petite fille de Sharan et l'ainée du premier enfant de Sharan ; Amarok.

Ce n'était pas Heaven qui m'avait parlée de Sharan ou de sa descendance, mais l'un de ses frères toujours en vie ; Yuma. Ce dernier se trouvait dans un coin très reculé des États-Unis, à la manière des autres.

Très peu de cette génération était encore vivant. Il n'en restait que cinq ; Heaven, Yuma, Bran, Yahto et Anoki. Et il ne restait qu'un seul vrai fils de Sharan, Elijah Harendra, Lieutenant de Nohlan Christensen, Alpha de l'Éthérée.

Tous les loups savaient que c'était Sharan qui nous avait créés. Qu'elle était la Shaman à nous avoir insufflés la vie. Mais qui connaissait vraiment la véritable histoire, à part sa propre descendance ? Personne. Ou presque.

Pourtant, n'était-ce pas cela notre héritage ? Et qui savait qu'une nouvelle Shaman avait fait son apparition depuis de nombreuses années ? Trop peu de gens. Les nouvelles générations se fichaient de cela, se fichaient de connaitre le passé, parce que pour tous ces jeunes loups, tout cela ne servait à rien ; le passé était le passé.

Je n'étais peut-être pas très vieille, à peine trois cent ans, mais ma soif de connaissance m'avait poussée à tout savoir et à me pencher sur le passé de notre peuple. Et qui mieux que les anciens pouvaient m'en parler ?

Benjamin m'avait permit de rencontrer les bonnes personnes. Il m'avait permit de comprendre les vieux loups et pourquoi certaines choses étaient ainsi.

Je m'étirai et profitai des rayons du soleil.

C'était tellement agréable. Il n'y avait que le bruit du vent et le léger écoulement de la rivière, pas très loin de là où je m'étais installée.

Les branches des arbres bruissaient et il n'y avait que la nature.

Partout, omniprésente.

Nous étions très loin de l'agitation des grandes villes.

Très loin de la fébrilité de New-York ou de la perversion de Las Vegas.

Très loin de l'empressement des gens. Et j'aimais ça.

C'était comme se reposer après une trop longue balade.

Rien de mieux.

Comme un retour aux sources, aux origines même de ce que j'étais.

J'oubliai tout. Oubliant même que je n'étais personne.

À part une louve abandonnée.

À part une louve sans réel foyer et sans Alpha. Et ne restait que ce que je savais des autres. Des vies entières dans ma tête, juste parce que je le voulais et parce que ça me permettais de combler jour après jour le manque en moi.

Le manque d'une famille. D'une vraie famille. Pas d'un substitut.

Je savais que c'était mal de penser ainsi. J'avais été heureuse pendant longtemps ainsi. Mais j'avais finis par comprendre.

Et la vérité m'avait été comme balancée au visage. Et rien n'avait plus jamais été pareil.

— Maman !

Je courrais et jetant mon sac par terre, je me jetai dans les bras de ma mère, frottant mon nez contre le sien alors qu'elle riait.

J'adorais ses longs cheveux blonds comme les blés. Ils étaient tellement beaux, tellement doux aussi. Alors que les miens étaient marrons chocolat. Mais ils étaient aussi doux que les siens, alors je m'en fichais. Et elle était belle. Tellement belle ma maman. La plus jolie de toutes les mamans. J'aimais bien lui dire ça. Elle riait et papa apparaissait toujours à ce moment là pour déposer un baiser bruyant sur nos joues.

— Ma chérie.

Elle m'embrassa sur le nez et je senti sa louve qui m'enveloppait de sa puissance, de sa force, de sa douceur.

J'enfouis mon visage dans son cou et respirai son odeur, fermant les yeux et savourant.

Je me frottai le sommet de la tête et passai une main dans mes cheveux.

Ils avaient trop poussés, mais je n'avais pas encore eu le temps de les couper. J'aimais les avoir courts, moins gênant et surtout, j'avais moins chaud. Parce que même si je supportai la chaleur, je détestai transpirer au niveau de la nuque. Rien de plus dérangeant. Et je n'étais pas assez féminine pour trouver indécent de porter les cheveux courts. Et puis dans le siècle où nous nous trouvions, qui se fichait de la longueur des cheveux bon dieu ? Pas moi en tout cas.

Et ça ne semblait pas avoir dérangé les hommes qui étaient venu à moi, ou les mâles essayant de nous courtiser, ma louve et moi. Il fallait croire que les garçons manqués plaisaient quand même. Mais être avec quelqu'un, que ce soit juste pour le sexe ou pour quelque chose de plus sérieux n'était aucunement dans la liste de mes priorités. Et pour tout avouer, je n'étais pas très à l'aise avec tout ça.

Il n'y avait qu'une seule chose.

Et jusqu'à ce que j'y arrive, il n'y aurait que ça, n'en déplaise à une certaine personne qui voulait que j'abandonne cette quête.

Mais qui était le Gardien pour me demander cela ? Qui était-il donc pour m'empêcher de vouloir connaître la vérité sur moi-même ?

Timothy connaissait ses parents.

Il avait même sa propre famille, avec une femme et un enfant.

Moi je n'avais rien de tout cela.

Je n'avais qu'un prénom que je détestai et des chiffres.

Des chiffres qui me reliaient à quelqu'un.

Des chiffres qui étaient mon passé, qui étaient des réponses. Mais que je n'avais vu qu'une seule fois. Pendant un instant, j'avais cru qu'enfin, je saurais ; je saurais qui j'étais, mais Timothy avait brisé mes espérances dans l'œuf.

Et en grandissant, j'en étais venu à me dire que ce n'était pas lui qui ne voulait pas que je retrouve mes parents, mais plutôt mes parents qui ne voulaient pas être retrouvés.

Et il y avait quelque chose d'affreusement douloureux là-dedans.

Qu'est-ce qui pouvait pousser une mère à abandonner son propre enfant ?

Qu'est-ce qui pouvait pousser un père à renier la chair de sa chair ?

Je l'avais demandé à Timothy. Je lui avais demandé comment on pouvait détester à ce point un enfant alors que ce n'était qu'un bébé.

Après, je m'étais dis que peut-être, ils n'avaient pas eu le choix, que peut-être, c'était pour mon bien, mais alors pourquoi ? Pourquoi ne pas vouloir que je les retrouve ?

Tant de questions. Et Timothy ne voulait plus rien entendre concernant cela. Il avait été clair la dernière fois. Et quand le Gardien disait quelque chose, il revenait rarement dessus.

Je devais choisir.

Entre mon passé et mon futur.

Entre qui j'étais et qui je voulais devenir. Tout cela se résumait à cela. Il n'y avait rien d'autre. Timothy était dur, mais ne pensait-il pas au bien de tous les loups ? Alors ça ne devait pas être bien différent pour moi. Du moins, j'essayai de m'en convaincre. Plus les années ne passaient et plus les chances de découvrir l'identité de mes géniteurs s'amenuisait.

À la fin, il ne resterait que ceux qui m'avais élevé et aimé.

Ceux que j'avais rejetés parce que je ne pouvais pas supporter, parce que ma louve ne pouvait plus vivre comme ça.

J'avais passé mon enfance et une bonne partie de ma jeunesse dans une petite meute, à peine trente loups. Dans une petite bourgade ou tout le monde connaissait tout le monde. Tout avait très bien été, avant que ma louve n'apparaisse et avant qu'on ne se rende compte que notre puissance dépassait celle des hauts-gradés, celle de l'Alpha lui-même.

Qu'est-ce qui se passait dans ce cas là ? On étouffait cette puissance. On l'étouffait jusqu'à briser ma louve presque.

Voilà pourquoi j'en étais venue à préférer les livres aux gens. Voilà pourquoi je préférais l'histoire du passé à ce qui se passait dans le présent.

C'était comme une obsession. Et mon cerveau n'oubliait rien, rien de ce que je pouvais apprendre. Tout était là et il y avait encore tellement de place pour plus !

Je repris mon stylo et me penchai de nouveau sur la table. Un bloc note était posé devant moi et mon écriture recouvrait la moitié d'une feuille. Devant moi, de vieux papiers jaunis ou l'écriture s'effaçait. Certains mots étaient illisibles et d'autres commençaient à le devenir aussi. Des écrits qui remontaient à si loin, à un autre temps. J'aimais toucher ce genre de papier, c'était une sensation incroyable. Une sensation vraiment intense même. Et bon sang que j'adorais !

Timothy m'avait demandé de tout recopier et je devrais certainement le refaire dans quelques centaines d'années. Le Gardien ne voulait rien entendre des ordinateurs ou des traitements de textes et même si ça aurait été plus pratique, je devais avouer que j'aimais trimer de la sorte. Il y avait quelque chose d'auto gratifiant à faire ce genre de travail. Surtout quand c'était le Gardien qui vous le demandait. Certain disait qu'on ne pouvait rien lui refuser et il en jouait plutôt, surtout quand c'était pour un travail aussi fastidieux que cela. Mais il savait que ça ne me dérangeait pas. Il savait que j'adorais faire ce genre de chose.

J'apprenais tellement de chose. Parce que tout ne concernait pas que notre peuple ; il y avait aussi des traités de sorciers ou d'autres informations sur les vampires. Je me demandais d'où est-ce que tout cela venait et me fit la réflexion qu'il faudrait que je demande à Timothy, ou à Heaven. Elle était assez loquace quand elle le voulait bien. Et Maxence aussi, quand il n'avait rien d'autre à faire, répondait à mes questions, même s'il trouvait tout cela ennuyant. Il était rarement ici et je savais qu'il passait assez souvent à l'Éthérée, là où se trouvait sa fille ; Nayah Ambrose, même si aujourd'hui, c'était Nayah Adhams. Elle avait prit le nom de sa compagne, Eryn, Seconde de Nohlan. Très peu de gens étaient au courant pour elle et c'était bien mieux ainsi, parce que Maxence avait beaucoup d'ennemi, et même s'il ne considérait pas Nayah comme sa fille, elle restait de son sang et ça, c'était suffisant pour certain. Et au-delà de ça, il entraînait beaucoup de monde et dernièrement, avait passé pas mal d'années à Bear Creek Village pour entraîner le fils de la Main de Dean Campbell. Il était souvent demandé pour ce genre de chose et refusait rarement. Après tout, il n'avait pas grand-chose d'autre à faire, même si son rôle aurait du être de rester auprès d'Heaven. Mais cette dernière semblait bien se ficher des allers et venues de celui qui était censé être son Protecteur. Heaven était une femme bien étrange et très peu l'aimait ; voilà pourquoi elle avait été déchue de sa position, bien des décennies plutôt.

Moi, je n'avais pas d'avis sur la question. Elle savait énormément de chose et toute sa vie, elle avait été une conseillère et une décisionnaire pour notre peuple.

Certain se tournait encore vers elle quand d'autre s'adressait directement au Gardien.

Heaven était comme Benjamin ; c'était une mine d'informations que rien ne tarirait jamais.

— Tu es bien trop concentrée, petite néné.

Je sursautai et en lâchai mon stylo qui roula sur la table et tomba par terre. Je relevai la tête et le soleil m'éblouit un instant. Un jeune homme se tenait à côté de moi et il n'était pas difficile de voir sa ressemblance avec Timothy. Pour cause, Luka était son fils.

Ce dernier était considéré comme un très jeune loup, même s'il avait l'apparence d'un jeune homme dans la fleur de l'âge. Comme son père, Luka était bel homme et avait beaucoup de charisme. Mais il avait le côté très renfermé de sa mère aussi ; Katerina, Main de Nora Baker, Alpha de Pennsylvanie. Je le connaissais depuis sa naissance et il était devenu un très, très bon ami pour moi. Il était l'un des seuls loup mâle dont j'appréciais la compagnie pour tout avouer.

Il me sourit et se pencha pour embrasser ma joue, une lueur espiègle dans le regard :

— Qu'est-ce que je t'ai déjà dis, lulu ? Grognai-je alors que je sentais sa légère barbe.

Il rit :

— Pas de néné, je sais, je sais. Mais je n'aime pas Isis, répliqua-t-il, presque en boudant.

Je secouai la tête et ramassai le stylo par terre.

— Tu n'aimes rien, alors comme ça.

Je refermai le bloc note et rassemblai tous les papiers en une petite pile devant moi. J'avais encore beaucoup de travail, mais je pouvais m'octroyer une petite pause. Surtout avec Luka. Il me tendit sa main et il m'aida à me relever, même si je n'avais pas besoin de lui.

— Tu es venu avec ton père ? M'enquis-je doucement.

Il hocha la tête alors que nous marchions en direction de la maison.

Luka n'était pas prédestiné à devenir le prochain Gardien. Personne ne l'était vraiment pour l'instant. Timothy était jeune et avait encore bien des années devant lui, mais comme Heaven et son père, l'ancien Gardien, lui avait fait remarqué, un peu d'aide n'était pas une mauvaise idée. Luka était donc tranquille de ce côté-là. Il vivait dans la meute de Nora et était un de ses loups. Il se plaisait là-bas et il n'y avait aucune raison qu'il s'en aille. Il venait rarement ici avec Timothy, donc je ne cachai pas ma surprise.

— Je suis venu pour te voir, dit-il avec un sourire. Il y a longtemps que tu n'es pas venu par chez nous.

Quelques mois, oui. Mais plus Timothy me donnait du travail et plus j'espérai tomber sur quelque chose. Il ne pouvait pas faire attention à tout. Un jour ou l'autre, il commettrait une erreur et je serais là.

Je voulais retrouver mes parents. Était-ce donc trop demander ? Il fallait croire que oui. Mais je n'étais pas du genre à baisser les bras. Et ne le serais jamais.

— Tu me flatte, Luka, dis-je en riant.

Nous arrivâmes au niveau du porche et je perçu la voix de Timothy, reconnaissable entre mille. Il n'était pas rare qu'il vienne prendre conseil ici. Heaven ne semblait pas rancunière, même si Timothy avait été de ceux qui avaient voulu qu'elle passe son tour en quelque sorte.

Luka m'arrêta en attrapa mon bras et son air fermé m'interpella soudain. Il ne prenait cette expression que lorsqu'il avait quelque chose de grave à me dire.

Mon cœur se mit à battre plus vite soudain. Était-il arrivé quelque chose de grave ?

— Papa est un peu tête en l'air ces derniers temps. Je suppose que c'est parce que maman est enceinte, commença-t-il, chuchotant.

Timothy n'avait pas laissé filtré la seconde grossesse de Katerina à beaucoup de monde et Nora avait réussit à étouffer cela elle aussi. Katya n'était enceinte que de deux mois, mais Timothy semblait déjà complètement transformé.

— Il laisse beaucoup de chose trainer dans son bureau et... j'ai fouillé lorsqu'il n'était pas là.

— Luka ! Dis-je en le foudroyant du regard.

Il haussa les épaules, pas désolé pour un sous. Cet homme, vraiment...

Il sorti alors un papier de sa poche, tout froissé et me le fourra dans la main avant de faire que je referme le poing dessus :

— Je sais que ce n'est rien, mais je suis sur que tu sauras t'en servir pour trouver ce que tu cherches, susurra-t-il.

Ma bouche s'assécha d'un seul coup. Luka savait ce que je voulais. Il savait que le seul but que j'avais étais de trouver mes parents, avec ou sans le consentement de son père, avec ou sans leur consentement à eux. Il m'avait soutenu dès qu'il avait été en âge de le comprendre et depuis, ne m'avait jamais lâché. Mais à fouillé dans les affaires de son père, il risquait gros.

— Tu mérites de rencontrer tes parents, tu mérites de connaitre la vérité.

Il parla les lèvres contre mon front et je m'agrippai à son t-shirt. S'il avait réussit à trouver ne serait-ce qu'une piste, alors tout pouvait changer.

Il recula alors et se racla légèrement la gorge. La voix du Gardien résonna derrière moi :

— Némésis.

Mon cœur battait la chamade. J'avais le souffle court, mais il fallait que je reprenne contenance. Surtout devant Timothy. Il ne devait rien deviner.

J'inspirai doucement et serrant plus fort le poing sur le morceau de papier, je me tournai vers le Gardien.

— Isis, grimaçai-je, détestant qu'on utilise mon prénom complet.

Quels parents sensés appelait leur gamine Némésis franchement ? Qui voulait nommer un enfant avec le nom d'une Déesse qui n'avait certainement jamais existée ?

Timothy sourit.

— Je suis sur que sur ton acte de naissance, c'est Némésis.

Mensonge.

Il n'y avait certainement aucun acte de naissance puisque j'avais été abandonné. Mais je ne relevai pas et m'avançai vers lui pour lui offrir ma nuque en signe de respect. Il l'effleura avec ses lèvres et nous nous redressâmes, Luka à mes côtés. Son père lui jeta un coup d'œil avant de me regarder à nouveau :

— Tu avance ? Me demanda-t-il.

Je hochai la tête. Timothy ne s'inquiétait pas que le travail soit bien fait ou non, il savait qu'il l'était. J'étais méticuleuse et du genre acharnée. Et il me faisait parfaitement confiance. Il y avait des années que je travaillais avec lui maintenant ; je savais que c'était une façon de me contrôler et de me garder sous les yeux, mais ce n'était pas que ça.

D'où le choix que je devais faire.

Passé ou futur.

Mes parents ou mon... futur poste.

Mais en cet instant, avec le papier dans mes mains, je ne pensais à rien d'autre qu'à ce que j'allais y découvrir.

Encore des chiffres ? Ou cette fois il y aurait vraiment un indice significatif ?

Je voulais savoir. Je voulais voir.

Je voulais la vérité, même si elle était horrible. Nous avions besoin de savoir. Après tant de siècles, il était temps.

— Je ne peux pas rester longtemps, mais j'aimerais que nous parlions dès que j'aurais un peu de temps. Tu vas rester ici, n'est-ce pas ?

— Rien ne m'appelle ailleurs pour l'instant, mais tu sais comme je suis, dis-je, essayant de sourire, mal à l'aise.

Allait-il voir que j'étais bizarre ? Différente ? Je l'étais toujours. Et c'est ça qui l'avait poussé à me prendre sous son aile presque.

Il hocha la tête en souriant :

— Ne t'éloigne pas trop alors.

Il me tourna le dos et rentra de nouveau à l'intérieur. Luka se plaça devant moi, pour me cacher à la vue de ceux dans la maison et fébrilement, je défis la boule de papier.

Des chiffres.

Numéro de comptes et autre.

Des virements. Avec beaucoup de zéro. Quelqu'un avait toujours veillé à ce que je ne manque de rien. Mes parents ?

C'était le même genre de feuille que j'avais vu la dernière fois, mais cette fois, en bas de la page, il y avait des initiales griffonnées ainsi que le nom d'une ville.

Boise.

C'était plus que ce que je n'avais jamais eu.

Le nom d'une ville. Mes parents étaient-ils là-bas ?

Boise. Dans l'Idaho. Et l'Alpha d'état était Jahyan Pearson. Son propre territoire était à Boise. Mes parents étaient-ils de cette meute ?

Étaient-ils...

Bon sang. Mes mains tremblèrent. Forts. Et j'avais mal au cœur soudain.

Tenais-je réellement quelque chose ? Tenais-je réellement un début de piste ? Même si ce n'était pas grand-chose, c'était plus que tout ce que j'aurais pu imaginer.

Il fallait que j'y aille.

Il fallait que je sache.

Je relevai les yeux vers Luka et lui soufflai un merci. Il sourit tendrement et m'attira dans ses bras, à la façon d'un frère. Je le laissai me serrer contre lui, mon cœur battant vite et fort.

Il fallait que je sache. Il n'était plus question de rester ici et de ne jamais avoir de réponses.

Hors de question.

J'attendis que Timothy reparte avec Luka pour partir. Je fourrai un sac de sport de vêtements ainsi que quelques livres ; plus par habitude qu'autre chose, et sans un mot pour Heaven, je pris la route.

En voiture, j'en eu pour plus de dix heures.

Je m'arrêtai à peine, laissant ma voiture manger les kilomètres, l'esprit vide, ma louve très calme dans mon ventre. Mais elle l'était presque toujours, ne se révélant que lorsqu'elle le désirait vraiment. Elle n'avait pas le comportement d'une Dominante et pourtant, c'est ce qu'elle était.

Je m'arrêtai avant la frontière donnant sur le territoire de Jahyan Pearson et choisi un petit motel dans une petite ville juste aux abords.

Je n'attendis pas longtemps avant de laisser ma louve prendre le contrôle pour partir en... reconnaissance. Le tout était de ne pas nous faire attraper par les Veilleurs ou les Patrouilleurs.

Je voulais voir avant d'approcher.

Et nous fîmes ainsi pendant trois jours. Dès que nous sentions qu'un loup venait vers nous, ma louve détalait sans demander son reste.

Je savais peut-être énormément de chose, mais je n'étais pas très douée avec les gens. Je savais que je n'avais rien à faire sur ce territoire, surtout que j'y entrais clandestinement. Cela n'était accepté par aucun Alpha, mais je ne voulais pas approcher la meute trop vite.

Quelque chose me retenait.

Je voulais savoir, après tant de siècles, bien-sur, mais je savais être prudente. Me faire attraper me mènerait directement dans les pattes de l'Alpha, ou alors, il enverrait sa Main s'il jugeait une seule seconde que j'étais une menace. Je ne pourrais pas observer trop longtemps, je le savais bien, mais je voulais connaitre un peu la ville avant de m'y aventurer sous ma propre forme. J'étais assez douée pour étouffer complètement la puissance de ma louve ; on me l'avait enseignée depuis que j'étais gamine après tout.

Mais tous les loups ici étaient vieux. Et il y avait donc un risque que je me fasse repérer. Me fondre dans la masse ne serait peut-être pas suffisant, mais étrangement, tout cela ne m'inquiétait pas alors que ça aurait du être le cas.

Il ne fallait pas que je me jette tête la première, je savais cela, mais il n'était plus question pour la patience non plus.

Je devais savoir et j'allais savoir.

Le cinquième jour, après avoir laissé passer une journée sans aucune intrusion de ma part, je décidai qu'il était temps d'y aller. Sous forme humaine, j'avais beaucoup moins de chance de me faire repérer.

En principe.

Après tant de siècles à espérer et à suivre les bons usages lorsque j'allais dans les meutes, il était temps que je change un peu.

C'était pour retrouver mes parents après tout. Pour savoir qui j'étais ou... qui j'aurais pu être.

Alors quitte à perdre mon bon sens, autant le faire jusqu'au bout. 

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