Chronique de Maguy : le bout...

By RaissaSow

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C'est l'histoire de Ndeye Maguette, une jeune fille sénégalaise, dont les parents vont divorcer. Cette sépara... More

Introduction
Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
Chapitre 9
Chapitre 10
Chapitre 11
Chapitre 12
Chapitre 13
Chapitre 14
Chapitre 16
Chapitre 17
Chapitre 18
Chapitre 19
Chapitre 20
Chapitre 21
Chapitre 22
Chapitre 23
Chapitre 24
Chapitre 25
Chapitre 26
Chapitre 27
Chapitre 28
Chapitre 29
Chapitre 30
Chapitre 31
Chapitre 32
Chapitre 33
Chapitre 34
Chapitre 35
Chapitre 36
Chapitre 37
Chapitre 38
Chapitre 39
Chapitre 40
Chapitre 41
Chapitre 42
Chapitre 43
Chapitre 44
Chapitre 45
Chapitre 46
Chapitre 47
Chapitre 48
Chapitre 49
Chapitre 50
Chapitre 51
Chapitre 52
Chapitre 53
Chapitre 54
Chapitre 55
Chapitre 56
The End

Chapitre 15

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By RaissaSow

Chapitre 15

Je n'avais pas du tout la tête aux études. Mais a t-on vraiment le choix à cet âge? Je crois que non. Raï se préparait pour l'ouverture. Ses parents nous avaient envoyé des valises d'habits et d'accessoires. Mariéme (la tresseuse) lui avait fait des "lifes". Elle se prenait pour ma grande sœur depuis sa réussite à l'examen. Elle s'était débrouillée pour décrocher de bonnes notes en mathématiques. Elle a donc été orientée en seconde scientifique. Je devais faire la 3e et Aminata la 5e.

Je ne pourrais jamais oublier l'année scolaire 2001/2002. En dehors de nos cours, et de nos répétiteurs et maitres coraniques, un événement spécial s'annonçait: la coupe du monde. Vous direz sûrement que c'est assez banal comme événement mais c'est la première fois que le Sénégal y participait. Mais avant tout, la coupe d'Afrique s'était tenue au Mali en Janvier 2002. Le Sénégal était dans le groupe D, avec l'Égypte, la Tunisie et la Zambie. Nous sommes sortis premier de ce groupe pour rencontrer La RDC en quart de finale, le Nigeria en demi-finale et le Cameroun en finale. Je me souviens encore de la déception après cette défaite, qui avait laissé un gout amer à toute la population. Les lions avaient bien joué et les tirs aux buts avaient finalement départagé les deux équipes. Je me souviens encore de la désolation après les tirs ratés d'El Hadj Diouf, Amdy Faye et Aliou Cissé. Nous étions si prêts du but, de la coupe, du titre, mais hélas, Dieu en a voulu autrement. La période des matchs ainsi que l'excitation nous donnait un peu de répit et mamie relâchait un peu la pression qu'elle nous mettait.

Raï et moi nous débrouillions bien, nous avions de bonnes notes car étions organisées. Aminata était chez maman car cette dernière voulait de la compagnie. Mamie Maguette étant retournée à Mbour, sa maison lui semblait vide. Nous étions en train de faire nos devoirs un soir, quand tonton Souleymane nous a fait savoir que le Sénégal allait rencontrer la France en match d'ouverture de la coupe du monde. J'avoue que je n'avais pas diné à cause du stress. Je pensais à tous les grands joueurs de la France à l'époque: Zidane, Trezeguet, Thierry Henri, Desailly, Laurent Blanc etc... Tonton nous a parlé des autres équipes de notre groupe A: le Danemark et l'Uruguay. Pour avoir l'esprit tranquille, je me disais que l'essentiel était de participer. J'avais à l'époque un album, rempli des photos des joueurs et de mon idole Fadiga. Raï avait un faible pour Habib Beye et Fadiga. Notre chambre était remplie de posters de ces deux joueurs, et des spices girls.
A l'approche du tournoi, Zidane s'était blessé. Dieu était avec nous. Je me rappelle que le match était diffusé vers 11h a.m. et nous n'étions pas parties à l'école. Mamie s'était enfermée dans sa chambre avec sa natte et son chapelet. Elle avait trop peur de regarder. Le jour du match, ce 31 mai 2002, à Séoul, Pape Bouba Diop réalisait le rêve de tout un continent en marquant le premier but du tournoi, but qui nous donnait la victoire face à la France. Je ne pouvais pas y croire. Raï et moi avions tellement crié, sauté, pleuré, dansé, que j'étais étonnée d'avoir encore de l'énergie pour jubiler avec les gens du quartier. Un de nos voisins, avait en effet mis de la musique à fond, celle de Youssou Ndour (bufi yamone sakh mu nekh), Viviane (les lions), etc. Il avait acheté des caisses de boisson et chacun était libre de se servir. Je me rappelle aussi que d'autres pays africains comme le Mali, la Guinée, la Côte d'Ivoire etc, avaient jubilé tout comme nous. Le Sénégal a, par la suite, rencontré le Danemark (1-1) et l'Uruguay (3-3). Nous sommes sortis 2e de ce groupe après le Danemark. Le match contre l'Uruguay était trop stressant, la deuxième mi-temps était un vrai cauchemar. J'avais l'impression que les joueurs de l'équipe adverse s'étaient transformés durant le break. C'était juste angoissant. Je priais pour que le match se termine. Il a finalement été établi que certains joueurs de l'équipe d'Uruguay s'étaient dopés, d'où leur suspension. Nous étions la seule équipe à représenter le continent Africain en 8e de finale. Nous avions battu la Suède en 8e de finale pour rencontrer la Turquie en quart de finale. Le 22 juin 2002, le rêve de tout un continent se termine, devant notre défaite face aux turcs. Ce goût d'inachevé était juste insupportable. Le match était vraiment serré et c'est durant la prolongation que le but en or a été marqué. Nos lions ont été accueillis en héros. Raï et moi étions parties en ville avec tonton Ibrahima et tata Soda pour les accueillir. Durant cette période, toute la nation était unie, les divergences politiques étaient mises en stand-by.

J'avais un peu la tête en l'air à cause des événements sportifs. Le mois de juin était presque terminé et le Bfem était imminent. Raï avait une bonne moyenne et passait en classe supérieure. J'avais déjà de bonnes notes mais je haïssais les mathématiques. Je ne voulais pas faire la série scientifique, et je ne voulais pas non plus changer d'école. J'ai finalement été orientée en seconde L1. J'étais plus que satisfaite. Je ne voulais pas être séparée de Raï. J'ai eu mon Bfem et mamie a fait une petite fête en notre honneur. Tata Soda était venue avec des nièces de son mari et maman était là aussi avec Aminata. Nos parents nous avaient envoyé des habits et des cellulaires. J'étais toute excitée. C'était des appareils Ericsson, T39m.

Durant les vacances, nous étions attirées par les sorties nocturnes. Nous avions sympathisé avec des filles de notre école, certaines étaient en seconde comme Raï et d'autres en Première. La rébellion était un sentiment nouveau et elle faisait surface petit à petit. Nous n'étions plus ces deux jeunes filles calmes, sages, obéissantes etc.. Nous voulions découvrir les boites de nuit, les sorties nocturnes, les soirées dansantes.

Vous vous rappelez d'Ousmane, le garçon qui m'avait interpellé dans le quartier? Son grand-frère avait réussi au Bac à la même période. Il avait organisé une soirée dansante chez eux. Nous étions invitées et beaucoup de filles de l'école l'étaient aussi. Nous mourrions d'envie d'y aller et j'en ai parlé à Rose pour avoir son avis. Elle m'a répondu que mamie ne nous laisserait jamais y aller. J'étais déçue. J'en ai parlé avec Raï et nous décidions de rester. Toutes nos amies profitaient de leurs vacances, en allant à la plage entre copines, en allant danser etc. Nous avions tout à la maison, mais il nous manquait cette liberté. La veille de la soirée, on regardait calmement la télé quand Raï a interpellé mamie.

Raïssa : Mamie, pourquoi ne nous laisses tu jamais sortir avec nos amies?

Mamie : Sortir? Pour aller où?

Raïssa : Bah à la plage, aux anniversaires etc.

Mamie : Mais vous allez à la plage et aux anniversaires.

Raïssa : Oui mais tu nous accompagnes toujours et nous rentrons avant même que la fête ne commence vraiment.

Mamie : L'acte de présence est plus important ma chérie.

Raïssa : Mais nos amies se moquent de nous tout le temps. Ce n'est pas drôle.

Mamie : Avoir cette liberté à leur âge est juste triste. Si leurs parents les laissent rentrer à n'importe quelle heure, c'est leurs choix. Je ne veux pas que l'on vous détourne de l'essentiel. Vos études doivent être votre seul souci.

Moi : Mais mamie on est en vacances. Et puis nous avons bien travaillé.

Mamie : C'est pourquoi vos parents vous ont envoyé des téléphones portables et tous ces cadeaux.

Moi : Nous aimerions que tu nous laisses sortir toutes seules. Nous respecterons les heures et tout. Donne-nous une chance s'il te plait.

Mamie : Mais qu'est ce qui vous arrive? Une chance pour quoi? Vous n'êtes même pas matures. Est ce que Soda sortait de la maison pour aller à des soirées?

Raïssa : Non, mais ce n'est pas la même génération.

Mamie : Génération? Rien n'a changé. Les hommes sont toujours aussi pervers et les femmes aussi naïves. Soda a étudié en France comme Djiby et est rentrée au Sénégal pour chercher du travail. Elle ne sortait jamais et ça ne l'a pas empêché de se trouver un mari. Il ne faut pas vous presser. Vous aurez le temps de vous amuser avec vos maris.

Je regardais Raï pour lui faire comprendre que la discussion ne servait à rien. Nous nous sommes tues.

Mamie : Vous êtes fâchées?

Moi : Non mamie.

Mamie : Voilà, c'est bien. Je préfère cela. Un enfant doit pouvoir écouter ses ainées.

Raï : Bien sur mamie. J'ai sommeil, je vais aller me coucher.

Moi : Allons y. Bonne nuit mamie.

Mamie : Dormez bien les filles.

Une fois dans la chambre, j'explosais.

Moi : Mais on va mourir dans cette maison à ce rythme. Rien ne va. On ne fait qu'étudier. On n'a pas droit aux loisirs comme les jeunes de notre âge. J'en ai marre.

Raï : Hey calmes toi. Mamie pourrait t'entendre. Et puis ce n'est pas si grave. Notre cas n'est pas si dramatique. Nous ne manquons de rien et avons même des cellulaires.

Moi : Tu parles d'une connerie!! Des cellulaires qui ne servent à rien à part parler avec nos parents. Aucune de nos copines n'en a. Tu as vu comment les gens nous regardaient l'autre jour à la plage? Et puis bref, tu t'en fous puisqu'il ne te reste que deux ans max ici. Tu vas rentrer et me laisser dans cette galère.

Raï : Ce n'est pas vrai. C'est moi qui ai commencé la discussion avec mamie. J'aimerais profiter de mes vacances car les cours seront durs après. Et puis tu as juste 15 ans. Pourquoi vouloir coute que coute de la liberté?

Moi : Je suis dans ma 16e année et tout le monde pense que j'en ai 18. J'en ai marre d'être enfermée. Je veux me changer les idées. D'ailleurs, j'irais à l'arrosage de Momar demain.

Raï : Heuuuuu... Tu es tombée sur la tête Maguy. Dormons, c'est mieux.

Moi : Je suis très sérieuse Raï. Je vais y aller, avec ou sans toi.

Raï : Mais tu n'as même pas demandé la permission..

Moi : Qui a besoin de permission pour sortir? Je m'en irais après que mamie se soit endormie.

Raï : Je ne vais même pas continuer cette discussion, tu es folle.

Moi : Merci.

Je me suis mise à écrire dans mon journal, à me vider l'esprit. Je n'en pouvais plus de la surveillance de mamie. C'est à peine si elle ne nous suivait pas quand nous allions aux toilettes. Non mais franchement!!!! Elle nous aime et tout, mais à un moment faut arrêter. J'avais envie de respirer. Je réfléchissais rapidement à mon plan pour le lendemain. Le samedi passé, il y'avait eu la fameuse émission de Maguette Wade, donc il y'avait 90% de chance qu'on nous serve une sélection de clips sénégalais le lendemain. C'était parfait. Mamie ne regardait pas ça et allait se coucher juste après le diner d'habitude. Je me levais pour faire une sélection parmi mes habits. J'ai finalement choisi un pantalon blanc et un haut mauve. Raï suivait mon manège pendant un bon moment et s'est levée:

Raï : Tu es vraiment décidée. Je ne peux pas te laisser y aller toute seule.

Je souriais intérieurement. Elle a sorti un jean et un haut rose. Nous étions décidées à y aller.

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