Arrivée chez elle, le corps endolori, Maddie se réfugia sous la douche. Elle s'allongea ensuite sur son lit, écouteurs enfoncés dans les oreilles. Son téléphone posé sur son ventre, elle espérait qu'il se mettrait à sonner.
Moins d'une heure plus tard, ce fut le cas. À la lecture du texto qu'elle reçut d'Anthony, ses lèvres frémirent et elle se retint de pousser un cri de joie. Il lui proposait de se retrouver dans un café pour discuter.
Maddie tapa si vite sa réponse qu'elle envoya un message plein de fautes d'orthographe et de mots incompréhensibles. Elle laissa un mot à l'attention de sa mère sur la table de la cuisine et quitta précipitamment la maison. Elle prit le bus pour se rendre sur le lieu du rendez-vous et arriva avec plus d'une heure d'avance.
Lorsqu'elle aperçut Anthony qui poussait la porte du café, elle se leva tel un automate et soupira en l'admirant. Il était beau dans sa chemise blanche qui laissait transparaître ses muscles saillants. Sa veste grise épousait sa carrure et son pantalon noir tombait parfaitement. Un sourire béat vint s'évaser sur ses lèvres alors qu'elle agitait doucement la main.
Anthony l'aperçut et traversa le café. Ils restèrent face à face quelques secondes, tous deux dans l'attente d'une réaction de l'autre. Anthony passa un bras autour de la taille de la jeune fille avant de déposer un bisou au coin de sa bouche.
— Salut toi, murmura-t-il avant de s'asseoir.
— Hey, fit Maddie en s'installant face à lui, rassurée de le voir si tendre.
— Je t'écoute, annonça-t-il en posant ses yeux noirs et profonds sur elle.
La gorge serrée par l'émotion, Maddie ne pouvait articuler un mot.
— Tranquillement, on a le temps, dit-il simplement.
Elle hocha la tête en fixant piteusement ses mains. Les larmes brouillaient sa vue et son cœur battait à tout rompre. Elle était si heureuse d'être là et de voir Anthony calme et disposé à l'écouter. Elle prit un instant pour rassembler ses esprits et lança.
— Je vais tout te raconter depuis le début. De la blague du bizutage à aujourd'hui.
Elle évoqua les évènements depuis la virée au centre commercial avec ses trois coéquipières à la soirée de la veille. Elle omit volontairement de parler de la rencontre du matin même avec Sally. Elle se réservait cet élément pour plus tard dans la conversation. Anthony était suspendu à ses lèvres.
— Ta mère avait décidé de te punir après le vol ? Et elle t'a trouvé ce baby-sitting, finit-il par dire. Je ne comprends toujours pas que tu ne m'en aies pas parlé !
— Je ne voulais pas créer de problème. Je te jure que je ne cachais rien ! Ashton ne m'intéresse absolument pas, il faut que tu me croies !
— Je te crois. J'ai vu Ashton avant de venir ici, l'informa-t-il.
— Ah oui ? fit Maddie, tentant de cacher sa surprise.
Elle pesta intérieurement et son visage se ferma.
— C'est mon meilleur ami, j'avais besoin de comprendre pourquoi il ne m'avait rien dit non plus, lâcha-t-il, d'un air triste.
Maddie s'en voulut aussitôt. Le pauvre Anthony s'était senti trahi par sa petite amie et son meilleur ami. Il était logique qu'il s'entretienne avec chacun d'eux.
— Ce que tu viens de me raconter concorde parfaitement avec ce que m'a dit Ashton. Vous vous croisiez à peine et il n'y a jamais eu d'ambiguïté entre vous.
Maddie afficha un air dégoûté.
— Oh non, aucune ambiguïté !
Anthony rit aux éclats.
— Ça va, il n'est pas immonde non plus, mon pote !
— Je ne sais pas, j'ai l'homme parfait face à moi ! La comparaison n'est pas possible, le flatta Maddie, le menton dans le creux de la main.
Il lui sourit. Sa discussion avec Ashton avait été nécessaire avant de pouvoir voir Maddie. Il avait besoin de comprendre pourquoi il avait été tenu à l'écart. Grâce à l'échange franc qu'il avait eu avec son meilleur ami, il avait appris que Sally ne savait rien. Elle avait découvert par hasard le travail de Maddie et avait menti en disant qu'Ashton s'était confié à elle.
Le front plissé, Maddie changea soudainement d'attitude. Stressée, elle tambourina des doigts sur la table.
— Je dois te dire la vérité, je ne veux plus rien te cacher.
Anthony eut l'air méfiant. Maddie raconta le face-à-face du jour avec Sally.
— Sally a mal pris ton arrivée dans l'équipe ? demanda-t-il, surpris.
Elle n'avait rien laissé paraître.
— Elle m'a prise en grippe, assura Maddie en baissant la tête. Tout ce qui m'est arrivé de négatif vient d'elle.
— C'est dingue, murmura Anthony. Sally ne s'était jamais attaquée à personne.
— Je ne t'en avais pas parlé avant parce que je ne savais pas si tu étais de son côté ni si tu me croirais. Les Venus ne m'ont jamais crue, elles. C'est bien Sally qui m'a rendue malade et qui a menti pour le centre commercial, j'en suis sûre. La cerise sur le gâteau, c'est l'humiliation d'hier soir. Je suis certaine qu'elle voulait créer des problèmes entre nous. En plus de me faire détester par tout le monde, bien entendu !
Anthony resta silencieux. Le regard absent, il finit par demander.
— Qui a eu l'idée de la vente de sucettes ?
— Sally, pourquoi ? l'interrogea Maddie en haussant un sourcil étonné.
— À ton avis ? Tu te souviens de la GROSSE sieste que j'ai faite au moment où j'aurais dû te retrouver ? J'avais dégusté une bonne sucette juste avant.
Maddie afficha un air horrifié.
— Ce n'est pas vrai ! Elle s'est attaquée à toi aussi !
Anthony acquiesça vigoureusement.
— J'en ai bien peur. Cette sieste m'a intriguée jusqu'à maintenant. C'est bien plus clair. Je ne sais pas ce qu'elle a utilisé, mais ça a bien marché. Notre Saint-Valentin a été gâchée.
— Tu vas parler à Ashton de tout ça, lança Maddie en redressant le buste sur son siège.
— Tu plaisantes ? C'est mon meilleur ami !
— Justement ! s'écria Maddie.
Anthony scruta autour de lui. Il détestait se faire remarquer.
— Non, certainement pas, poursuivit-il à voix basse. Ashton est avec Sally, il ne sera pas du tout réceptif à ce que je pourrais lui dire. Je ne veux pas perdre mon meilleur ami à cause d'elle !
— Tu préfères me perdre moi ? l'arrêta Maddie, indignée.
— Je ne vais perdre personne, tempéra Anthony en posant ses mains sur les avant-bras de sa petite amie et en plongeant son regard dans le sien.
Maddie souffla et roula des yeux. Elle s'effondra sur la table et enfouit sa tête entre ses mains, envahie par un profond sentiment d'impuissance. Anthony se glissa sur la banquette à côté d'elle et la prit dans ses bras avec tendresse.
— Non, je ne vais perdre personne, répéta-t-il. Écoute, la fin de la saison de foot est proche, le cheerleading aussi. Tu n'auras bientôt plus à côtoyer les Venus et surtout Sally.
— Ça veut dire qu'on ne fait rien ? demanda Maddie, le ton las.
— Que veux-tu faire ? Tu vois bien de quoi Sally est capable ! Tu veux qu'elle nous mène la vie encore plus dure ?!
— Tu ne me défends pas alors, marmonna Maddie en fronçant les sourcils.
— Non, répondit-il fermement. Je préfère plutôt te protéger. Faire profil bas. Ne pas faire de vague. Maintenant qu'on sait, on sera bien plus méfiant et attentif, n'est-ce pas ?
Maddie haussa les épaules. Que pouvaient-ils faire de toute façon ? Hormis mettre tout le monde en garde contre Sally et risquer ainsi de se faire rejeter de tous les côtés. Sally était puissante. Très puissante.
— Et très intelligente, murmura Maddie comme pour elle-même.
— Si tu penses à Sally, j'ajouterai aussi mauvaise, maligne et détestable.
Anthony aimait profondément Maddie, mais connaissait le poids des dires de Sally. Il savait pertinemment que personne ne les croirait.
— On va croiser les doigts pour que Sally ne me réserve rien pour la compétition, lâcha Maddie, l'air dépité.
— La compétition ? Elle est super importante pour toute votre équipe, et particulièrement pour la capitaine, Sally ne risquerait pas de la perdre !
Maddie ne partageait pas cet avis. Elle avait vu suffisamment de haine dans le regard et dans les propos de Sally pour savoir que la capitaine pouvait lui mener la vie dure, même lors d'un évènement qui tenait tant à cœur aux cheerleaders.