Water Lily

By RosalineOscar

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Son doigt effleura ma peau. Froid et chaud à la fois. M'électrisant au simple contact. Il traça la courbe lég... More

Pitié, pas de rat.
Ou comment se retrouver sur le cul.
Adieu le rêve, bonjour le cauchemar.
Ce que je suis ? Oh je sais pas. Peut-être un truc poilu.
Moi bizarre ? Vous vous êtes regardés peut-être ?
Ou comment dire : je cours à la catastrophe.
Je n'ai pas besoin d'un chien de garde. Quoique. Tu mords bien ?
Ou comment se sentir plus monstrueuse que monstrueuse.
Qu'est-ce que je suis ?
Besoin de temps. Acte I, scène I.
Besoin de temps. Acte I, scène II.
Avance et ne recule plus.
Evolution. Non je ne parle pas de Darwin. Ni de Pokémon.
Avoir un petit-ami surprise en une leçon.
Oui maman, je ne suis plus une enfant. Ah et oui. J'attire les psychopathes.
J'entends des voix. C'est pas suffisant ? Bien, je vois des fantômes alors.
Finalement, je vais peut-être avoir quelques poils.
J'ai, comme qui dirait, un léger mal de crâne.
Baisé mouillé.
Doucement, tu grandiras encore. Si tu survies jusque là.
Envie d'une reconversion ? Essayez dompteuse de Lion.
Je ne deviendrai pas dompteuse de lion.
Hier, je te détestai. Aujourd'hui, tu vas me manquer.
Passé. Présent. Rêve. Réalité. Je ne sais pas ce que je préfère.
La mélodie de la lune.
Plongé en terre inconnue.
Passion pour les frites.
Ou comment le Dieu des céréales m'a prise en grippe.
Monstre ou humaine. Un pas vite franchi.
Comment gérer les catastrophes (ou pas) pour les nuls.
Tuatha de Dannan, d'histoires en histoires.
Lien. Pas tout à fait celui que j'attendais.
Water lily, la puissance du nénuphar.
Marron. Ils étaient marron.
Sacrifice.
Tome 2

Epilogue

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By RosalineOscar


La douleur. Un mot que beaucoup pensent comprendre. Qu'on pense tous avoir ressenti au moins une fois dans notre vie. Mais ils avaient tort. Moi aussi j'avais eu tort de croire que je connaissais ce mot. Bien sûr, je m'étais déjà cassée quelques doigts durant mon enfance. Bien sûr, j'avais connu le plaisir du harcèlement scolaire qui avait suscité une souffrance profonde. Bien sûr, j'avais connu la souffrance de la disparition d'un proche. Une disparition involontaire avec le décès de ma grand-mère. Et pleinement volontaire pour mon père qui avait fait le choix de nous abandonner. Mais j'avais eu tort. Tort de croire que tout ceci suffisait à me rendre apte à donner une définition de ce mot.

Je me mordis la lèvre, jusqu'au sang, le goût du liquide envahissant ma bouche sans que je ne m'en alarme. Mon esprit torturé ne pouvait se concentrer sur une si petite chose, une chose si insignifiante qu'était ma lèvre ouverte. Les jours se confondaient. Je ne savais plus depuis combien de temps j'étais là. Peut-être un mois. Peut-être plus. Peut-être moins. Je ne savais pas. Je savais juste que chaque jour se ressemblait. Que chaque jour la douleur devenait de plus en plus insupportable.

Mon regard se perdit devant moi, ne rencontrant qu'un mur de brique grisâtre et sombre. Aucune fenêtre. Aucun rayon de lumière naturelle. Pas d'issue. Pas d'échappatoire. Juste un mur froid et uniforme. Je tournai vaguement la tête pour rencontrer le regard du démon qui se tenait dans un coin de ma cellule. Il ne se salissait jamais les mains mais assistait systématiquement à mes « séances ». Mes yeux, ternis, le regardaient sans expression, sans émotion. Ni colère. Ni haine. Le vide les avait envahis depuis longtemps désormais. Peut-être dès l'instant où il avait refermé la porte de ma geôle, le premier jour. Depuis que j'étais dans l'ignorance de savoir si Maël était vivant ou non. J'étais convaincue qu'il ne l'était pas mais une part de moi se refusait à y croire.

La haine revint étinceler dans mon regard. C'était lui. C'était lui qui l'avait tué.

- Je constate que tu n'es pas encore totalement brisée, souffla-t-il, son sourire s'étendant sur ses lèvres. Je suis assez impressionné, peu de nos invités ont été apte à supporter tout ce que tu as encaissé.

Je ne répondis pas. Je n'avais plus parlé depuis plusieurs jours à ces hommes. Je n'en voyais plus l'intérêt, ce n'était que les motiver un peu plus à me torturer. Une fée aux ailes rouge sang posa sa main sur mon front et je me cambrai sur la chaise où j'avais été attachée. La vague de douleur me submergea sans surprise. Elle descendit sournoisement, déversant dans tout mon corps une sensation, brûlante, vive, déchirante. C'était comme si une centaine d'aiguilles, que l'on venait de faire chauffer, s'enfonçaient en moi. Elles brûlaient ma peau, la transperçaient, entraient dans mes veines pour en faire bouillir le sang. Et je perdais systématiquement pied en quelques secondes, ne réalisant même plus lorsque je commençai à tressauter dans des spasmes violents.

- Tu n'es toujours pas disposée à nous dire ce que nous voulons savoir ?

Aucun son ne sortit de ma bouche hormis un gémissement de soulagement lorsque les mains de la fée s'écartèrent de mon front. La sensation disparaissant dès qu'elle s'écartait. Mes dons s'activèrent, tentant de limiter les dégâts mais j'étais trop faible. Sans que je ne comprenne pourquoi, mes dons semblaient bien moindres dans ce lieu. J'étais même incapable d'user des quatre éléments. Je parvenais tout juste à me soigner et à pratiquer une vague télépathie mais elle me demandait trop d'énergie quand je devais, sans cesse, me soigner.

- On arrête pour aujourd'hui, souffla le démon, agacé. On recommencera demain.

- Bien, maître, répondit la fée dont le visage terne n'avait jamais exprimé la moindre pitié à mon encontre. Je suis à votre disposition si nécessaire.

Elle s'inclina et quitta la pièce qui me servait de cellule. Le déchu, pour sa part, ne bougea pas, restant à me fixer quand mon propre regard refusait de bouger, contemplant le mur. Mes pensées devenaient toujours incompréhensibles après ce genre de supplice. Je n'avais plus conscience d'où j'étais, de ce qui se jouait. Je ne discernerai plus rien. J'étais juste enivrée par la douleur. La douleur de me rappeler le corps de Maël qui tombait, de ses doigts relâchant les miens, de son regard bleu qui se fermaient. De ses ailes. De ses ailes si blanches devenus rubis. Je fus secouée de sanglot silencieux et sans larmes. C'était juste l'expression d'un corps trop épuisé pour réellement produire des larmes ou des sons. Je ne me sentais plus que comme une coquille dont l'âme cherchait, désespérément à s'enfuir sans jamais y parvenir.

- Nous viendrons à bout de tes dernières défenses, me lança-t-il. Bientôt, tu nous diras ce que Dana t'a confié.

Et il quitta la pièce sans se retourner, me laissant attachée à ma chaise, du sang coulant de ma bouche et se répandant sur mon pantalon. Il ne prenait même plus la peine de me libérer. Depuis quand n'avais-je pas manger ? Je ne savais plus. Bu ? Non plus. Ma gorge était sèche, mon estomac vide et noué. J'avais minci depuis que j'étais arrivée ici, mes joues s'étant grandement creusés. Je devais avoir des cernes sous les yeux et mes iris devaient être bien plus ternes. Mes cheveux étaient dans un état déplorable. Gras. Souillé. Quelques mèches tombaient autour de mon visage. Salies. Ensanglantées. Si ma mère me voyait dans un tel état, elle serait fo... je secouai la tête. Je ne devais pas penser à elle. Elle ne saurait jamais. Andrew devait avoir trouvé une explication quelconque pour justifier ma disparition, il était doué pour gérer ce genre de problème. S'il était en vie. Mon cœur se serra un peu plus. Je ne savais même pas si un seul d'entre eux était encore de ce monde.

- Petite ? Tu vas bien ?

La voix masculine attira mon attention, une brève seconde. Je tournai mes yeux vers la cellule adjacente à la mienne. L'homme au corps de cheval me contemplait avec une profonde pitié dans ses iris foncés. Je détournai le regard avant même de lui laisser l'occasion de sonder mon esprit dans l'espoir de briser le vide qui l'envahissait chaque jour un peu plus.

- Je sais que c'est très dur, insista-t-il. Mais ne sombres pas trop loin dans les profondeurs noires de cette cellule. Tu risquerais de plus réussir à t'en défaire par la suite.

- Quelle importance ? Murmurai-je, ma voix sortant difficilement. Si je dois rester ici autant que mon esprit soit brisé. Je ne veux plus penser.

- N'étais-tu pas persuadée que tes amis viendraient te sauver ? N'as-tu plus confiance en eux ?

Si. Bien sûr que si. Je croyais en eux mais je ne savais même pas s'ils étaient vivants. Et si tel était le cas, ne pensaient-ils pas, eux, que j'étais morte ? Depuis tout ce temps, ils devaient forcément être convaincus que j'avais été tué. Cependant, les paroles du centaure ravivèrent mes sentiments. Je tirai vaguement sur les liens qui encerclaient mes poignets, cherchant à voir si je pouvais parvenir à les défaire. Mais je n'y parvins pas. Je restai donc assise, à ne rien faire.

- Ecoutes-moi, Keylinda, reprit-il devant mon mutisme. Tu ne dois pas abandonner.

- Pourquoi ? Interrogeai-je, indifférente.

- Parce que tu dois vivre, répondit une seconde voix. Dana compte sur toi. Elle ne te laissera pas mourir.

La voix tremblante ne pouvait être que celle du vieil elfe qui se trouvait dans une cellule un peu plus écartée des nôtres. Je l'avais entraperçu à mon arrivé. Vieux. Ridé. Je ne savais pas quel âge il avait, cependant je le soupçonnai d'être plus vieux que le monde pour être dans un tel état. Maël et Kenan ne semblaient pas avoir plus de vingt cinq ans alors qu'ils avaient plus de cinq cent ans. Alors ce vieillard, d'apparence, devait avoir connus les dinosaures.

- Dana m'a abandonné, rétorquai-je. Elle nous a tous abandonnées.

- Je sais que tu ne le penses pas. Si c'était ta véritable pensée, tu serais déjà morte et tes dons ne te soutiendraient plus depuis longtemps.

- Mes dons ne font que faire durer le plaisir, souris-je, amer.

- Si tu retrouvais ta foi en Dana, je suis certain que tu serais capable de te battre.

- J'ai essayé, rétorquai-je, plus froidement cette fois-si. J'ai tout essayé. Vent. Terre. Feu. Eau. Rien n'a marché. Que voulez-vous que je fasse de plus ?

- C'est cet endroit qui est spécial, affirma Ciron. La magie n'y fonctionne que mal. Hormis ceux de contacts à première vue... comme le don de cette fée.

- Elle contrôle les sentiments, opinai-je, mollement. Et elle est très douée pour celui de la souffrance.

Ciron hocha la tête. Mes yeux se tournèrent vers lui, le détaillant un instant. Au début, j'avais été surprise de le voir. Un centaure. Un être d'une rareté incroyable. Il était l'un des derniers de son espèce. Et j'avais été d'autant plus étonnée lorsque, malgré sa propre situation, il m'avait témoigné une grande gentillesse. C'était un homme qui semblait avoir une trentaine d'année et je n'avais pas osé lui demander son âge, ne sachant même pas si les centaures étaient immortels, eux aussi.

Il portait les cheveux longs jusqu'aux épaules et avait un faux air de Jack Sparrow. En plus viril encore. Une mâchoire saillante recouverte d'une épaisse barbe. Il semblait sévère et dur, mais on ne pouvait que le contempler. Et puis, je devais reconnaître être captivée par le bas de son corps. En dessous de son torse, il avait pleinement l'apparence d'un équidé. Son pelage tirait entre le brun et le beige, deux couleurs qui faisaient ressortir sa peau mâte. Il était séduisant et je ne doutais pas qu'il devait avoir énormément de succès auprès... des pouliches ? Ma formulation m'avait beaucoup amusé tandis que cet homme sérieux n'incitait pourtant pas à la plaisanterie. Mais, aujourd'hui, je n'étais plus capable de sourire.

J'étais brisée. Le démon ne se trompait pas en disant que, bientôt, je ne serais plus capable de résister. Mes doigts jouèrent avec le tissu qui serrait mes poignets. Peut-être aurais-je pu le brûler si j'en avais eu la conviction ou ne serais-ce que la volonté. Je pouvais encore produire de petites flammèches mais rien de suffisant pour espérer m'enfuir.

- N'abandonnes pas, Keyli, souffla le vieil homme dont je ne connaissais même pas le nom. Lutte jusqu'au bout. Va au-delà de tes capacités et trouve en Dana le courage de te relever. Tes amis t'attendent dehors.

Il n'en savait rien. Peut-être qu'aucun n'avait survécu. Et le poids de la culpabilité me rongerait de l'intérieure. Qui étais-je pour avoir sacrifié leurs vies ? Je ne répondis donc pas. En réalité, je détestai lui parler. Je n'aimais plus penser, plus réfléchir. Je ne souhaitais que sombrer. Mais, lui, me forçait à réfléchir, à m'interroger, à penser. A sortir de ma torpeur. Du moins, parfois. Mais pas aujourd'hui. Aujourd'hui je me sentais prête à plonger aveuglément. Et à ne plus ressortir du néant.

Mais alors que je fermai les yeux, avachie, une sensation nouvelle se répandit dans ma poitrine. Non. Pas nouvelle. Je la connaissais. Je ne la connaissais que trop bien. Je rouvris les yeux, voulant lutter, mais il fut trop tard. Je ne maîtrisai pas ça. On m'obligea à fermer les yeux. Et, dès que mes paupières se fermèrent, je fus plongée dans un profond sommeil. Ou plutôt : dans un rêve.

J'ouvris les yeux, lentement, sans envie particulière. Mes poignets ne me faisaient plus souffrir comme lorsque je m'étais endormie. Ou, plutôt, que l'on m'avait endormie. Je passai mes paumes sur les marques violacées qui résidaient, néanmoins, sur ma peau. Il était étrange qu'elle n'ait pas disparu. A croire que même mes rêves ne pouvaient me faire oublier la réalité.

Je ne réagis pas lorsque j'entendis le bruit de pas résonnant dans mon dos. Je savais déjà qui se tenait derrière moi. Je savais qui avait provoqué ce sommeil. Je commençai à m'habituer à son manège, à ses jeux.

Cependant, je dus admettre que j'étais surprise par le décor. Peut-être changeait-il en fonction de mon état et de mes pensées. Ainsi, la première fois j'avais voulu me replonger dans une période sereine, calme, plate, en totale opposition avec la vie que je menais actuellement, jalonnée de bouleversement. La seconde fois, les nuages avaient commencé à envahir le calme serein que je recherchai. Un avertissement ? Un pressentiment ? Peut-être. Et, désormais, il me semblait évident que je ne désirai qu'une unique chose. Revenir en arrière.

Je contemplai le lac familier, la boule dans mon estomac remontant sournoisement jusqu'à poitrine pour y broyer mon cœur. C'était le lac où Kenan m'avait fait danser. Néanmoins, il n'était pas exactement identique. La lune ne brillait pas comme ce soir là, le ciel étant trop couvert d'épais nuages grisâtres. Immobile et silencieuse, je laissai donc Dan s'assoir à côté de moi tandis que je plongeai mes pieds nus dans l'eau tiède.

- Bonsoir, Keylinda.

- Bonsoir, répondis-je sans prendre la peine de lui adresser le moindre regard.

- Tu es en colère, murmura-t-il, peiné.

- Pas vraiment, rétorquai-je, sincère. Je ne ressens rien de particulier. Ni colère, ni haine, ni cœur, ni joie. C'est comme si... mon cœur j'étais anesthésiée, que j'étais déconnectée de tout.

- Tu as énormément souffert, n'est-ce pas ? M'interrogea-t-il en me faisant me crisper à cette question dès plus idiotes.

- Tu crois ? Lançai-je donc, froidement. Brillante analyse de la situation.

- Tu vois, tu es encore capable de t'énerver. D'éprouver un sentiment.

Je ne pris pas la peine de répondre. Quelle importance ? Ce n'était pas m'énerver qui allait ramener Maël. Je serrai mes doigts sur l'herbe humide, tirant trop fort et l'arrachant furieusement sans parvenir à me contrôler. Je me retrouvai donc avec une poignée d'herbe entre les doigts. Je soupirai, détendant les doigts et laissant les herbes s'envoler au grès d'une légère brise.

- Tout se terminera bientôt, dit-il, serein, comme si cette nouvelle allait m'apporter un quelconque réconfort. Fais-moi confiance, Keylinda.

- Pourquoi le devrais-je ? Maël est-il mort ? Questionnai-je, levant les yeux sur lui pour la première fois depuis le début de nôtre échange. Vous nous avez laissé sacrifier nos vies sans nous fournir la moindre explication du pourquoi nous nous battions. Vous n'avez pas daigné me donner la moindre explication. Jamais. Alors n'attendez pas de moi que je vous accorde ma confiance.

Dan sembla blessé par mes paroles mais je ne les retirerais pas. Au fond, il avait raison. J'étais encore capable d'éprouver de la colère. Je lui en voulais à lui tout autant qu'à Dana. Du moins si tout d'eux étaient bien des êtres différents comme je commençais à le penser.

Je me détournai sobrement, retournant à ma contemplation initiale. Je battis des pieds, profitant de cet instant de sérénité et patientant jusqu'à ce qu'il se termine. Cela ne durait jamais longtemps, je n'avais qu'à patienter et je pourrais retourner à ma souffrance. Mes yeux se perdirent sur l'eau transparente. Bleu. Comme les yeux de Maël. Mon cœur se resserra sur lui-même.

- ... Maël... et les autres... sont-ils en vie ?

Ma question fut un murmure à peine audible, mais il l'entendit. Son soupir me confirmant cette pensée. Je lui lançai un regard en coin, tâchant de paraître plus calme. Sa réponse pouvait changer mon opinion. S'ils étaient en vie alors je pourrais, peut-être, envisager d'encore lui accorder un peu de ma confiance.

- Tu auras bientôt les réponses à tes questions, me répondit-il, me faisant me détourner vivement. Ce n'est pas à moi d'y répondre.

- Pourquoi ? Articulai-je.

Il ne répondit pas. Et la réponse me sembla évidente. Il ne souhaitait, simplement, pas que je m'écroule maintenant. J'étais déjà au fond du gouffre et il savait qu'en m'annonçant la mort de mes amis, je perdrai toute envie de lutte. Dan voulut poser sa main sur mon épaule mais je la chassai avant même qu'elle ne se pose sur moi. Il n'avait pas à me toucher.

- Keyli, soupira-t-il. Tu ne dois pas perdre foi en Dana. Sa magie disparaitra totalement si tu ne crois plus en elle.

- M'a-t-elle aidée ? Rétorquai-je, implacable. Qu'a-t-elle fait pour moi hormis me doter de ces dons puissants qui sont responsables de toute cette... horreur. Elle ne m'a fait aucun cadeau, elle m'a juste maudite.

- Je sais que ce tu vis est diffici...

- Non, coupai-je, retrouvant une indifférence anormale tant le sujet aurait du me retourner la tête et le cœur. Tu ne sais pas. Tu n'en as pas la moindre idée. Sais-tu ce que l'on éprouve lorsque les personnes que nous aimons meurent sous nos yeux ? Sais-tu ce que cela fait d'être torturée jour après jour, sans relâche ? De ne pas savoir si demain tu ne mourras pas parce que la douleur a été violente pour ton esprit ? Sais-tu seulement ce que cela fait de se considérer comme un monstre, toute sa vie, et de soudainement réaliser qu'on est vraiment un ?

- Non, admit-il, contrit. Mais, Keylinda, laisse-moi juste te parler. Juste une dernière fois. Et essaie de m'écouter.

- Je ne vois pas pourquoi je devrais le faire.

- Parce que tout n'est pas perdu si tu le souhaite.

- Rien ne va, désapprouvai-je. Ce ne sont que des paroles prononcés pour me forcer à lutter.

- Cela suffit, répondit-il, plus fermement. Je comprends tes doutes, mais je te demande juste de m'écouter, de me laisser une chance de t'aider et j...

- Je ne veux pas de ton aide, répondis-je, cette fois-ci, en me redressant. Je veux que ce rêve cesse. Sur le champ.

- Keyl...

- Maintenant, grondai-je, perdant le contrôle de ma voix qui porta trop fortement. Je sais que le contrôle contrairement à ce que tu affirmes. Alors, fais le cesser !

- Très bien. Mais je ne le stopperai que lorsque tu m'auras écoutée. Tu as juste à t'asseoir et à m'accorder quelques minutes. Après, peu importe ta décision, je ferai cesser le rêve.

Il me fixait avec sérénité mais sa voix était ferme et fit douter mon esprit. Et il dut percevoir mon doute, mon incertitude car il se décida à faire pencher la balance du bon côté :

- Tes amis comptent sur toi.

Ils n'étaient pas tous morts. Mes ongles s'enfoncèrent dans mes paumes. Etait-ce vrai ? Ou n'était-ce qu'un moyen de me convaincre de l'écouter ? Pouvais-je lui faire confiance ? Après-tout, jusqu'à présent, qu'avait-il apporté à ma vie ? Les visages de Maël, de Kenan et de tous mes amis me sautèrent à la figure. Oui. C'est vrai. Il m'avait apporté cette nouvelle famille. Et il avait aussi donné un sens à une existence. Il m'avait donné une envie d'avenir, de continuer, d'avancer. D'aimer. Je ne savais pas si tout cela était grâce à Dana, néanmoins je dus reconnaître que c'était elle, en me marquant, qui m'avait permise de faire toutes ces rencontres.

Alors, faiblement, ma tête bougea. J'étais d'accord. J'étais d'accord pour l'écouter. J'étais d'accord pour, une dernière fois, lui accorder une toute petite part de confiance. J'étais d'abord pour, une dernière fois, lutter. Lutter pour ma vie. Lutter pour les retrouver. Lutter pour eux. Juste pour eux. 

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