Follow your fire

By NeoQueenSerenity28

18.8K 3.2K 1.4K

"Il faut suivre son coeur, suivre sa flamme, faire de notre feu intérieur le phare de notre vie. Quitte à se... More

Un petit mot & TW
Playlist
1 - El : Falling apart
2 - Phoebe : Back home
3 - El : A way out
4 - Phoebe : I need a drink, please.
5 - El : Never let a boy get you down
6 - Phœbe : I knew you were trouble
7 - El : Stand up
8 - El : To smile again
9 - Phœbe : Your fault
10 - El : Fall back and get up again
11 - El : Let's do this
12 - Phoebe : A stranger or a ghost ?
13 - Phoebe : Dance with me
14 - El : Dancing till dawn
15 - Phoebe : Talk to me
16 - El : Not alone anymore
18 - Phoebe : Good person, good time
19 - Phoebe : I need you
20 - El : Hold me tight
21 - El : Take care of you
22 - Phoebe : Did you give up on me ?
23 - Phoebe : Lost without you
24 - El : A full heart
25 - Phoebe : I wasn't ready to say goodbye
26 - El : Where I belong
27 - El : I See You
28 - Phœbe : Afraid of myself
29 - Phœbe : Don't Let The Fear Win
30 - Phoebe : Are You Flirting With Me ?
31 - El : Let there be the light
32 - Phoebe : Better a heartbreak than nothing
33 - El : Feeling the wave
34 - Phœbe : Only You
35 - Phoebe : Are we too far gone ?
36 - El : The final countdown
37 - Phoebe : Cause you make me feel alive
38 - El : Something just like this
39 - El : Whose side are you on ?
40 - El : You lied.
41 - Aspen
42 - Connor

17 - El : Scream if you want to

373 84 6
By NeoQueenSerenity28

— On va porter plainte.

Ana saisit le combiné du téléphone, les joues rouges de colère. Elle marmonne je ne sais quoi dans sa barbe, mais de ce que je parviens à saisir, je sais que ce n'est pas beau. Je lui cours après, en tentant de lui attraper le bras pour l'empêcher d'appuyer sur les touches. Voilà pourquoi j'avais hésité à lui en parler... Quand Aspen m'a appris que Phœbe avait appelé la police hier soir, j'étais morte de trouille. Et si elle avait donné mon nom, au téléphone ? Il a quand même réussi à me convaincre d'en parler à ma tante... voilà le résultat.

— Non, Ana... Ana, s'il te plaît !

Ma tante paraît m'entendre au bout de la troisième interpellation. Ses doigts se suspendent au-dessus du clavier du téléphone, et ses yeux me fixent avec impatience.

— Éléonore. Je ne le laisserai pas s'en tirer comme ça.

— Je sais, et j'en ai encore moins envie que toi, dis-je en articulant du mieux que je le peux.

Ma gorge est serrée à l'évocation de ce souvenir. Trois douches plus tard, j'ai toujours l'impression de pouvoir sentir ses mains sur moi... La dernière chose que je veuille, c'est bien qu'il sorte sans une égratignure de cette histoire.

— Réfléchis, repris-je. Si je donne mon nom, ça se retrouvera forcément tôt ou tard dans les journaux. Une plainte anonyme est irrecevable, et si ça l'est, je ne pourrais pas bénéficier du statut de victime et un procès ou toute mesure judiciaire sera impossible.

— La justice est un milieu très sérieux, me rassure doucement ma tante. On peut demander à ce qu'une clause de confidentialité soit signée. Tes avocats peuvent s'en assurer... Je peux en parler à ton père pour...

— Non ! l'interrompé-je.

Il dirait que je suis irresponsable, que je n'avais qu'à ne pas sortir en boîte sans protection... il enverrait quelqu'un me chercher et là, je n'aurais d'autre choix que de rentrer en France.

Ana semble comprendre ce que je sous-entends, puisqu'elle soupire. Ses traits se détendent, et elle reprend d'une voix douce :

— Bon, d'accord. Je n'appelle pas ton père. Mais nous nous rendons tout de même au commissariat. L'un des policiers est une vieille connaissance ; je lui expliquerai la situation, il comprendra. Nous ferons tout pour que cette histoire ne franchisse pas les portes des locaux de police, promis.

Je me tords les mains, peu convaincue, mais finis par opiner lentement. De toute façon, à part ne pas en parler — ce qui pourrait être tentant si je n'étais pas aussi décidée à obtenir justice — je ne vois pas d'autre alternative.

— Nous y allons maintenant.

Mon ventre se tord, l'anxiété se répandant dans mes veines comme une cascade déchaînée. J'observe ma tante attraper ses clés, son sac à main, puis s'arrêter à la porte. Ses yeux me sondent, et le regard qu'ils retransmettent se fait plus doux. Elle me tend la main.

— Je suis avec toi.

J'inspire à fond, puis saisis sa main.

*

— Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour vous aider. Grâce au certificat médical circonstancié délivré par le médecin, nous allons pouvoir l'interroger. Nous vous tiendrons au courant.

Le policier se lève de son fauteuil, et quitte son bureau inondé de paperasse pour nous accompagner vers la porte. Ma tante et moi nous levons de concert, et saisissons tout à tour la main que l'homme me tend. Il est d'âge mûr, la soixantaine, je dirais. Ses cheveux sont poivre et sel, ses yeux gris et son teint bronzé, comme la plupart de ses collèges.

— Au revoir, Ana. Mademoiselle Leutellier, me salue le policier, tandis qu'il me serre la main avec un sourire sincère.

Je lui rends son sourire, bien que le mien se fait un peu plus contenu. J'apprécie le respect que je lis dans ses yeux.

L'agent Mark Dexter — c'est ce que je lis sur son badge — a écouté sans m'interrompre tout le récit de la nuit dernière. Il hochait la tête de temps en temps tandis que le stylo qu'il tenait dans sa main noircissait un carnet de notes. Il m'avait ensuite posé de nombreuses questions, et ne s'était pas départi de son professionnalisme quand Ana lui avait fait part de ma condition pour le moins... particulière. Je lui en étais reconnaissante pour ça. J'ai déjà rencontré plusieurs policiers qui, au lieu de me venir en aide, ont préféré me prendre en photo.

— Au revoir, Mark, le salue ma tante. Merci pour ton aide.

— C'est mon métier. N'hésitez pas à revenir vers moi entre-temps s'il y a le moindre souci.

— Nous n'hésiterons pas.

— En attendant, ajoute l'agent en se tournant vers moi, restez aussi éloignée que possible de ce jeune homme. Il était peut-être saoul ce soir-là, mais une récidive sous le coup de la colère n'est pas à exclure. J'ai déjà traité un cas auquel c'est arrivé...

Un frisson me parcourt l'échine.

— Demandez également à votre ami de témoigner. C'est indispensable pour que le dossier soit pris en considération avec sérieux. Dans ce genre d'affaires, rien ne doit être négligé.

Je mets une seconde avant de saisir qu'il parle d'Aspen. Sans trop savoir ce que je fais, j'acquiesce, et nous sortons du bureau tandis que ma tante et Mark se saluent une dernière fois. Ana glisse une main dans mon dos, en m'entraînant vers la sortie.

— Nous pouvons lui faire confiance. Cet... il ne s'en sortira pas comme ça.

— Si tu le dis.

Une fois toutes deux à l'extérieur, sur le parking, nous nous dirigeons vers la voiture. Aucune de nous ne dit rien. Ma tante met le contact et nous rentrons à la maison. Sur le trajet, seule la radio comble le silence de l'habitacle. J'envoie un message à Aspen :

Moi

C'est fait.

Il me répond presque immédiatement, ce qui me laisse interdite quelques secondes.

Aspen

Ça s'est bien passé ?

Moi

On peut dire ça... Le policier a été compréhensif.

Aspen

Mark ?

Moi

Oui, Mark Dexter. Tu le connais ?

Aspen

On peut dire ça.

Tu as été courageuse. Sois fière.

Je souris et m'apprête à ranger mon téléphone dans ma poche quand un autre message survient. Je m'attends à ce que ce soit encore Aspen, mais il provient du groupe que les filles ont créé.

Fallen

Un smoothie au Shelter, dans vingt minutes ?

Une dizaine de secondes passent avant qu'une réponse n'apparaisse.

Phœbe

Pourquoi pas. Je dois vraiment vous aimer pour quitter mon roman...

Cora

Je finis mon service dans quinze minutes, donc ça me va.

Fallen

On sait, Phœbe.

Nickel !

Je décide de répondre.

Moi

Ana sera de retour au bar dans dix minutes. Va pour le smoothie.

Soudain, une notification apparaît sur l'écran de mon téléphone, annonçant un message d'Aspen. Sauf que c'est une photo de Connor, tirant la langue, un bras autour du cou d'un Aspen surpris. Tous deux ont leur planche au bras, sur une plage que je ne reconnais pas.

Connor

Souris, beauté. Ça chassera le nuage noir qui flotte au-dessus de la tête d'Aspen depuis dix heures ce matin. Sachant que j'ai besoin de lui pour m'empêcher d'aller casser la gueule à mon ex-pote... c'est préférable, parce que ce ne sera pas beau à voir. ;) Sauf si tu préfères ?

Moi

Si tu le fais, je viens avec toi. ;)

Encore en train de surfer ? À croire que vous ne faites que ça de vos journées !

Connor

On n'a rien sans rien. La WSL ne se gagnera pas toute seule !

Je réponds à son message par un emoji représentant une médaille, et range mon téléphone.

— Ce sont tes amis qui t'écrivent ? me demande alors Ana.

— Oui. Connor et Aspen.

— Ce sont de bons garçons, déclare-t-elle, un sourire dans les yeux.

— Ils s'entraînent pour la World Surf League, dis-je. Tu le savais ?

Elle opine. La fierté est lisible sur son visage, à croire que ce sont ses propres enfants.

— Un peu que je le sais, comme tout le village. Ils font la fierté de Whitepearl... Ce sont nos deux petits princes. Ils n'ont pas participé ces deux dernières années, mais il y a trois ans, tout le monde y a cru. Aspen a terminé cinquième, et Connor, sixième. Ils vont gagner cette année, c'est sûr.

— Pourquoi ne pas avoir participé depuis deux ans, s'ils sont si bons ? m'étonné-je.

Ana affiche une expression peinée, et son sourire disparaît.

— À cause d'un évènement horrible. La petite sœur d'Aspen est morte, dans un accident de voiture. Une bien sombre histoire... la pauvre petite. Elle n'avait que seize ans. C'est d'ailleurs Mark qui l'a découvert, et qui a eu la lourde tâche d'appeler la famille... Aspen a décroché le premier.

Un sentiment d'horreur et d'injustice me traverse. Mes pensées se tournent immédiatement vers Aspen, et je repense à la tenue et aux chaussures qu'il m'avait prêtées, à sa mine triste et pensive tandis que nous nous baladions sur la plage, à son allusion par message tout à l'heure, lorsque j'ai mentionné Mark... si mes calculs sont bons, il n'avait que dix-huit ans. C'est bien trop jeune pour perdre quelqu'un. Mon cœur se serre, et je laisse mes yeux se perdre dans la brousse, à travers la fenêtre. Lui et moi avons plus en commun que je ne le pensais.

Nous nous garons sur le parking à côté de la plage dix minutes plus tard. Ma tante est restée perdue dans ses pensées le reste du trajet, tout comme moi. Il faut dire qu'entre la révélation qu'elle vient de me faire, et les dernières vingt-quatre heures, nous sommes épuisées.

Il reste encore dix minutes avant que Fallen et Phœbe n'arrivent au bar, mais Cora est déjà là, puisqu'elle est de service... Je ne sais pas trop à quoi m'attendre : je n'ai revu personne depuis l'incident d'hier soir. Est-elle au courant de ce qui s'est passé ? Avant de partir de la boîte, nous n'avions rencontré que Phœbe, Connor et Noah. En ont-ils parlé aux autres ? Je le saurai quand je la verrai, à moins qu'elle se retienne d'en parler. Mais connaissant Cora, ce serait surprenant.

Il y a quelques clients assis en terrasse, mais le bar n'est pas pour autant bondé. J'aperçois Cora déambulant entre les tables, sans forcément presser le pas. Un autre serveur, que j'avais rapidement aperçu à la fête la semaine passée, l'aide à nettoyer les tables. En nous voyant arriver, la jeune fille incline la tête pour nous saluer. Ana répond à son bonjour muet et, la mine toujours soucieuse, part enfiler l'uniforme jaune pastel de son café-bar. Elle restera sûrement derrière le comptoir pour continuer de réfléchir, au calme.

Je m'installe à une table libre, dehors. Quatre places, avec un parasol. C'est parfait... Cora s'installe en face de moi, et je hausse un sourcil, surprise qu'elle me rejoigne aussi vite. Elle a enlevé la chemise du café, ce qui signifie qu'elle n'est plus en service. Un silence lourd s'installe entre nous, tandis que nous contemplons l'océan en silence.

— Vous savez, n'est-ce pas ? je lâche.

— Difficile de ne pas savoir quand Connor a failli réduire Tyler en pièces hier soir, répond-elle, d'une voix inhabituellement douce.

J'écarquille les yeux, ignorant tout de ce qui s'est passé après qu'Aspen et moi soyons partis.

— J'ai dit failli, insiste la jeune fille. Noah et Phœbe l'en ont dissuadé...

Je reste muette, la mine sombre. Mon altercation avec Tyler me revient en mémoire, et je croise les bras sur ma poitrine pour réfréner les tremblements qui me saisissent tout à coup.

— Je suis désolée, lâche-t-elle après un silence, ses yeux bruns et sincères plantés sur moi.

Elle poursuit, tandis que je reste de marbre, m'appliquant à chasser les pensées invasives de ma tête :

— Ça m'est arrivé, aussi. Deux fois. La première, je n'ai pas réussi à m'échapper à temps.

Je me fige, tandis qu'à ces mots lourds de sens, une vague de froid vient se répandre dans tout mon corps et éclipser la chaleur du soleil. La situation prend tout de suite un tournant que je n'avais pas imaginé.

— Des amis de mon grand frère... qui n'en avait pas grand-chose à cirer, d'ailleurs. Il était trop drogué ou saoul pour se soucier de sa petite sœur de seize ans...

Elle renifle, en se laissant tomber dans son siège. Je devine dans ses yeux toute la colère qu'elle ressent encore aujourd'hui... je n'ose pas rebondir sur sa déclaration : son frère se droguait ? Je l'observe sans rien dire, peinant à croire qu'elle se confie. Cora, qui n'a pas été une seule fois chaleureuse avec moi en deux semaines.

La belle afro doit cependant percevoir la lueur qui s'est allumée dans mon regard. Elle ajoute d'une voix traînante, comme si elle n'en avait plus rien à faire :

— Je n'ai pas grandi dans cette petite ville... je n'ai pas toujours eu la chance de vivre dans un quartier sécurisé entourée d'amis pour me raccompagner et se soucier de mon bien-être. Je n'ai jamais connu ma mère, et mon père m'a laissée seule avec mon grand frère quand je n'avais que dix ans et lui treize. Mon frère a beaucoup fait pour nous aider les trois premières années, puis il a peu à peu oublié qu'il avait le devoir de s'occuper de moi... Il m'a traînée dans ses soirées douteuses, qui se finissaient souvent en courses de voitures, bagarres et trafic de substances illicites. C'est là qu'on a posé les mains sur moi pour la première fois.

Je reste interdite, pétrifiée par l'histoire qu'elle me raconte. Je n'aurais jamais pensé qu'elle traînait derrière elle un tel passé. Le masque je-m'en-foutiste de Cora s'effrite peu à peu quand elle reprend, d'une voix bien moins assurée :

— J'ai connu quatre ans de galère avant de réussir à me faire émanciper de la tutelle de mon frère et à me barrer de ce trou pourri.

— Je suis désolée, je parviens à articuler, encore remuée.

Elle hausse les épaules, et la fissure que j'avais vue apparaître dans son masque se referme aussitôt, en même temps que les traits de son visage.

— J'ai appris à décocher mon meilleur crochet du droit et à lever la jambe assez vite et assez fort pour la prochaine fois où ça m'arrivera. Même si maintenant, je suis entourée.

Elle marque une pause, puis ajoute, en braquant ses yeux sur moi :

— Je t'apprendrai. Personne n'a le droit de nous toucher sans notre consentement. Non, c'est non. C'est notre corps, notre décision, notre droit. Celui qui ne comprend pas ça est un connard fini, auquel tu as droit d'abîmer les bijoux de famille sans remords.

Un silence s'installe, durant lequel je cherche mes mots.

Je comprends que les filles sont arrivées quand la belle brune se redresse, et qu'une expression plus détendue se peint sur son visage. En effet, des rires retentissent derrière moi, et je me retourne. Fallen est là. Je remarque qu'elle a encore une trace d'oreiller sur la joue, ce qui signifie qu'elle ne s'est levée que récemment... Phœbe, qui la suit de près, a troqué sa tenue d'hier soir pour retrouver ses vieux sweats XXL chéris.

Les deux jeunes filles s'assoient à nos côtés, après m'avoir étreint longuement.

— Comment tu te sens ? me demande gentiment Fallen, en me caressant le bras.

— Ça va mieux, réponds-je, d'une petite voix.

Toutes les trois opinent, et la jolie blonde ajoute :

— Nous sommes là, si jamais.

J'esquisse un petit sourire, pour lui signifier ma gratitude.

— Aspen t'a parlé du message de Noah ? me demande Phœbe.

— Oui... je suis allée au commissariat avec Ana tout à l'heure.

— C'est bien.

Ses yeux sont doux et bienveillants alors qu'elle m'adresse un sourire. Elle n'est pas aussi tactile que Fallen, mais son regard parle pour elle. Phœbe n'est pas la fille avec laquelle j'ai le plus sympathisé pour l'instant... il faut dire qu'elle m'impressionne beaucoup. C'est une force tranquille : douce et calme, mais dotée d'un fort caractère, elle m'a tout l'air d'être une personne droite et entière, dont le charisme naturel fait d'elle un leader insoupçonné, le genre qui n'a pas besoin de parler fort pour être écouté.

Les filles doivent comprendre à mon silence que je n'ai pas envie d'en parler, car Fallen lâche soudain, en saisissant la carte posée devant nous, sur le bois de la table :

— Je rêve d'un smoothie menthe-ananas-mangue. Et je prendrais bien une glace, aussi... autant profiter à fond de ma journée de congé.

Fallen a fermé la salle aujourd'hui, pour se remettre de la soirée d'hier. Forcément, mais je n'aurais pas été contre une petite séance pour me défouler.

— Kaia n'est pas là ? m'enquiers-je alors, remarquant seulement l'absence de sa petite amie.

— Partie surfer avec les garçons, me répond Phœbe.

— Elle était furieuse qu'ils ne l'aient pas attendue, d'ailleurs, ajoute Fallen en levant les yeux au ciel.

— Elle était complètement torchée, hier soir. Tu m'étonnes que les garçons aient pensé qu'elle ne viendrait pas, réplique Cora.

— Ils ont dû oublier sa résistance troublante à l'alcool, répond Phœbe, en piquant la carte des mains de Fallen, qui rouspète.

Elle l'étudie quelques secondes, puis lâche :

— Je vais prendre le même que d'habitude. Smoothie banane et fruit de la passion.

Puis, elle me tend l'objet.

— Je te conseille celui à la framboise.

J'opine, et après avoir inspecté la composition du smoothie, décide qu'il me plaît bien. Un serveur arrive, et nous passons commande. Cora porte son choix sur une limonade, et Fallen commande en plus une coupe glacée.

Un ange passe, puis Fallen intervient, tentant sûrement de réchauffer l'atmosphère :

— Nos soirées sont meilleures, d'habitude, je t'assure. Laisse-nous une deuxième chance.

— On pourrait se faire une soirée entre filles, dans les prochains jours, suggère alors Cora.

— C'est une excellente idée, l'appuie Fallen, en se redressant si vite que Phœbe sursaute presque. Kaia n'est pas là les deux prochains jours, les garçons se rendent sur la Golden Coast pour aller surfer... mais quand elle rentre, ça devrait être bon !

— Vous pensez à quoi, exactement ? demande Phœbe d'une voix méfiante, en faisant écho à mes pensées.

— Rien de trop fatigant, s'il vous plaît, ajouté-je.

La jolie brune m'adresse un regard reconnaissant, et l'espace d'un instant, nous nous comprenons plus que nous nous l'avons fait en deux semaines.

— Je pensais à aller au cinéma de Cairns, nous informe Cora, en lançant une œillade insistante à Phœbe. Il y a une salle d'arcade juste à côté, et un bar en face.

— Ça me va, approuve Fallen, tout sourire.

J'opine, et Phœbe acquiesce. Notre commande arrive, et nous continuons notre conversation en sirotant nos boissons.

*

Une heure et demie plus tard, le soleil entame peu à peu sa descente et nous avons migré sur le sable pour tirer profit des derniers rayons. Ma peau est maintenant aussi bronzée que celle de Cora, et mes origines brésiliennes n'ont jamais été aussi évidentes.

Phœbe lit, et, comme moi, Cora bronze en fermant les yeux. Fallen s'est rendormie, et je souris en pensant au fait que nous avons dû la retourner et lui remettre de la crème solaire pour éviter qu'elle n'attrape un coup de soleil. Elle ne s'était pas réveillée, et Phœbe, Cora et moi avions partagé un beau fou rire. Si Kaia est bien résistante à l'alcool, ce n'est pas le cas de Fallen. « C'est toujours pareil : sur le moment, elle se pense invincible, et le lendemain, elle n'assume plus rien du tout », avait ronchonné Cora, d'une voix faussement agacée.

Un cri retentit soudain, tout droit sorti de la bouche de Cora. Je me redresse d'un coup, rouvre les yeux, et découvre que Gabriel, tout mouillé, s'est allongé de tout son long sur sa copine. Cette dernière se débat, ne sachant pas trop si elle doit râler ou rire. Fallen subit le même sort avec Kaia, qui lui saute presque dessus. Puis, c'est au tour de Phœbe de crier quand Connor, lui aussi trempé, manque de mouiller son livre en surgissant au-dessus d'elle.

Quand mes yeux tombent sur Aspen, je recule, car je décèle dans son sourire en coin quelque chose qui ne me plaît pas. Ses cheveux et son bermuda dégoulinent. Ses yeux brillent, et je déglutis, attendant ma propre sentence. Je crains qu'il ne se colle aussi à moi, et m'imagine déjà sa peau froide rencontrant la chaleur de la mienne. À la place, ses deux mains recouvertes de sable se posent sur mon ventre, fraîchement enduit de crème solaire. Non seulement sa peau est froide, mais en plus, j'ai du sable partout. Je pousse un cri indigné, et un rire s'échappe de ses lèvres. Je ne tarde pas à le suivre, parce que c'est plus fort que moi. Son regard est illuminé d'une lueur indescriptible quand mon rire se joint au sien. Je crois qu'il est soulagé de voir que j'ai retrouvé le sourire. Je ne rate pas l'œillade reconnaissante qu'il échange avec Phœbe et Cora.

Nous complimentons les garçons (sur un ton empli de sarcasme) sur leur capacité à s'approcher sans qu'on les entende. Ils échangent un regard complice, c'est à peine si l'on ne voit pas apparaître deux petites cornes sur leur crâne.

La fin de l'après-midi sur la plage empiète finalement sur la soirée. Les garçons s'allongent à côté de nous, en nous faisant part de leur appréhension quant à la compétition qui approche. Nous discutons une bonne heure, et je suis frappée par la facilité avec laquelle nous communiquons les uns avec les autres. Ma poitrine est gonflée d'un sentiment doux et chaud, qui me berce et m'apaise. Je me sens bien. Connor et Gabriel ne renient pas leur nature et poursuivent leurs petites blagues, mais ils savent également se faire plus sérieux — même si cela semble plus dur pour le copain de Cora. Plus personne ne mentionne l'incident d'hier soir, et je leur en suis reconnaissante — je pense juste à demander à Aspen s'il consentirait à venir témoigner au commissariat, ce qu'il accepte immédiatement en me promettant de s'y rendre dès demain, avant de partir avec Connor et Kaia à la Gold Coast.

Noah nous rejoint quand le ciel se teinte de rose et la lumière d'or, et nous finissons par faire griller des marshmallows, en cercle autour d'un feu de camp. La soirée ne se poursuit pas trop tard, car tout le monde est encore fatigué de la veille, mais nous restons sur la plage jusqu'à ce que Fallen — et moi — ne soyons plus capables de garder les yeux ouverts. Je somnole contre l'épaule d'Aspen quand le groupe décide de rentrer.

— Je te raccompagne.

Il n'aurait pas eu besoin de me l'annoncer, je sais qu'il l'aurait fait sans me le dire ; la preuve : ce n'était pas une question. Il ne l'avait formulé que pour la politesse.

Je ne le dirai jamais, car je suis trop fière pour cela, mais je suis contente qu'il m'escorte jusqu'à la maison. Je suis encore moins sereine à l'idée de rentrer seule le soir qu'il y a quelques semaines.

Le groupe se salue de la main. Aspen marche ensuite à côté de moi, tandis que nous empruntons le chemin habituel pour rentrer chez Ana. Le bras du jeune homme frôle le mien à chacun de nos pas ; nous restons tous deux muets. Mes pensées ne cessent de dévier vers les récentes révélations d'Ana, sur sa petite sœur. Et moi qui l'imaginais vivre avec un ciel sans nuage... Aujourd'hui, je ne peux m'empêcher de remarquer la lueur triste dans son regard, son silence pensif, ses traits parfois tirés. Je redresse discrètement le menton pour l'observer à la dérobée. Je remarque alors son regard inquiet et furtif, qui inspecte chaque coin de rue, chaque recoin d'ombre qui n'est pas éclairé par les lampadaires. Ce n'est que quand nous arrivons sur le porche de la maison que ses épaules se détendent enfin. J'ose lui demander :

— Quelque chose ne va pas ?

Il semble hésiter quelques secondes, comme s'il sélectionnait avec attention chacun de ses mots.

— Tyler, finit-il par dire. Je l'ai déjà vu s'énerver pour moins que ça... et je n'ai pas envie qu'il t'arrive quelque chose.

— Tu veux dire qu'il serait capable de se venger ?

Je fronce les sourcils, tandis que mon cœur accélère la cadence.

— Je ne sais pas... Mieux vaut être prudent, c'est tout.

Et il me sourit, comme si ce qu'il venait de me dire ne venait pas de me donner la chair de poule. Il semble saisir ma crainte, car sa main vient rapidement caresser mon avant-bras. Il susurre :

— Je ne le laisserai plus t'approcher. Promis.

J'opine, mais je ne peux m'empêcher de penser à demain matin, quand j'irai courir puis que je me rendrai à la salle. Est-ce qu'il... ?

Aspen m'attire contre lui, dans un geste qui lui semble si naturel que je ne suis pas sûre qu'il le réalise pleinement. Je peux entendre son cœur battre sous sa cage thoracique. Son rythme régulier, traduit par un martèlement continu et sourd, m'apaise immédiatement. Son souffle vient s'échouer contre le haut de mon oreille quand il ajoute :

— Je ne voulais pas t'inquiéter, El. Ce n'est qu'une hypothèse, je ne suis pas sûre qu'il aura le courage de se ramener ici, pas alors que la police le surveille. Il est stupide, mais n'espérons pas à ce point... Et puis je pense lui avoir fait assez peur, hier soir. Connor aussi, si j'en crois Noah.

Sa main frotte mon dos, et il m'assure, d'un ton léger plein d'humour :

— On veille sur toi, petite chose fragile. Les preux chevaliers entrent en service.

Je m'écarte de sa poitrine, et lui donne une bourrade en arborant mon plus beau regard noir. Il ne bouge pas d'un mètre, campé sur ses pieds... Mon Dieu, il va vraiment falloir que je renforce les muscles de mes bras. Les hommes et les femmes ne sont pas égaux. Je dois passer plus de temps que lui à la salle, et pourtant...

— Remarque, si tu lui lances ce même regard, tu n'auras peut-être pas besoin de lever le petit doigt, commente-t-il en réprimant un fou rire. Le pauvre va prendre ses jambes à son cou.

Je secoue la tête, et l'étreins une dernière fois avant de rentrer dans la maison. Mon cœur bat avec ardeur dans ma poitrine.

Continue Reading

You'll Also Like

81.6K 2.5K 13
Ceci est ma première fanfiction. Il s'agit d'un commencement alternatif à l'histoire de Matt dans le jeu Is It Love. L'histoire de l'héroïne est d...
79.5K 1.2K 29
Seyana et une jeune fille simple et gentille qui et détruit depuis la mort de son père elle va croiser le chemin de smaïl un homme qui inspire la peu...
235 55 6
« Je dois juste m'endormir. Juste m'endor... M'endormir... Le matelas s'enfonce au niveau de mes pieds, comme si un poids s'y posait. » Aimeric pensa...
1.8K 55 28
Quand se retrouver au mauvais endroit au mauvais moment ne fait que précipiter sont destin . (L'histoire ne suivra pas totalement le mcu.)