Alors que je tournai la clé dans la serrure, je me souvins du bazar que j'avais mis avant de partir. J'ouvris la porte puis allumai la lumière avant de pousser un soupire de soulagement. Amine l'entendit et tourna la tête vers moi.
Amine : Pourquoi tu souffles ?
Moi : J'avais oublié que j'avais rangé avant de partir
Amine : Et alors ? C'est pas bien ?
Moi : Si justement, c'est un soupir de soulagement
Amine : Ah ouais ça devait vraiment être la guerre, dit-il d'un air moqueur.
Moi : Franchement ouais
Il enleva ses chaussures, accrocha sa veste puis avança vers le salon, avant de s'arrêter soudainement.
Amine : Attends, tu t'es parfumée là ?
Moi : Euh ouais tout à l'heure
Amine : Nan là tout de suite
Moi : Ah bah nan pourquoi ?
Amine : J'sais pas y'a une odeur qui flotte on dirait que tu viens de te parfumer
Moi : Ah bah je sais pas ça devait être avant que je parte, je me suis parfumée dans le salon ça a dû rester
Amine : Ah d'accord, bah ça sent super bon
Moi : Donc tu complimente l'odeur de mon salon mais pas moi alors qu'on sent la même chose ?
Amine : Bah ouais mais frère toi aussi tu sais pas prendre un compliment donc j'essaye de doser, faudrait savoir !
Moi :C'est vrai que là c'était subtile je reconnais, bien joué, dis-je en rigolant. Et arrête de crier j'ai des voisins !
Amine : Eh ouais toujours subtile, dit-il d'un air fier.
Il s'assit sur le canapé tandis que j'allai ranger mes affaires dans ma chambre. Je me rendis ensuite à la cuisine, remplis un soliflore d'eau dans lequel je mis ma rose et revins la poser au salon sur la table basse. Une fois mes affaires terminées, je pris place à côté de lui.
Moi : Tu veux boire quelque chose ?
Amine : Arrête de gesticuler partout, dit-il en rigolant tandis qu'il passait son bras derrière moi. J'ai besoin de rien reste là c'est bon.
Je rigolai à mon tour.
Moi : Vas-y c'est bon j'arrête.
Amine s'enfonça un peu plus dans le canapé et esquissa un petit sourire.
Amine : Putain.. J'ai passé une trop bonne soirée jsuis trop content. En plus ça faisait longtemps que j'étais pas allé au restaurant
Sa réflexion me fit sourire.
Moi : Ouais franchement moi aussi , d'ailleurs je t'ai même pas remercié donc merci, dis-je en lui embrassant la joue.
Amine : Me remercie pas, j'ai fait ça pour me faire kiffer moi aussi hein, dit-il en rigolant.
Il avait tourné sa tête vers moi et me regardait de ses petits yeux rieurs. Tout à coup, je me mis à penser à la proposition de mutation et sentis mon coeur se serrer. J'appréhendais la réaction qu'il aurait lorsque je l'aurais mis au courant. Je voulais profiter un maximum de ce moment.
Je me rapprochai donc un peu plus de lui sur le canapé. Il y fut réceptif car il se rapprocha à son tour, puis, plongeant son regard dans le mien, il porta sa main libre à mon visage et, de son pouce, me caressa la joue. Je posai mon regard sur ses lèvres. Il le remarqua et esquissa un sourire presque imperceptible puis, de son indexe, releva mon menton et posa ses lèvres sur les miennes.
Je sentis le sang me monter à la tête. Sa barbe me caressait le visage à chacun de ses mouvements et son parfum m'enivrait. Je passai mes bras autour de son cou. Il se redressa, posa sa main dans mon dos et m'attira vers lui, approfondissant son baiser. Il posa son autre main derrière ma nuque tandis que je sentais son pouce exercer une légère pression sur ma mâchoire. Un frisson me parcourut tout le corps. Il resserra son étreinte autour de moi tandis que je me mettais à genoux sur canapé afin de me retrouver surélevée par rapport à lui. Je pris son visage entre mes mains et approfondis le baiser à mon tour. Je pouvais sentir son souffle, presque haletant, contre mes lèvres. Il fallait s'arrêter avant que cela ne dégénère.
Je me reculais donc légèrement et, alors que j'avais toujours son visage entre mes mains, déposai un dernier baiser sur ses lèvres. Il me regarda quelques instants et un léger sourire se dessina sur son visage.
Moi : Qu'est ce qu'il y a ?
Amine : Bah rien j'ai pas le droit de te regarder ? Dit-il en m'imitant
Moi : Pas très ressemblante ton imitation
Amine : Sah si un peu quand même, dit-il d'un air moqueur. Nan en vrai, j'étais en train de penser à la première fois qu'on s'est vu
Moi : Ah ouais ? Et tu pensais à quoi exactement ?
Amine : À dans l'ascenseur quand tu m'as dit « Effectivement la situation n'est pas ouf », dit-il en rigolant. Qui dit ça wsh ?
Moi : Je sais pas j'étais stressée j'ai mélangé tous les registres de langues
Amine explosa de rire.
Amine : Ah nan jsuis mort. Putain, dit-il en se frottant la barbe tandis qu'il regardait dans le vide, si on m'avait dit ça y'a quelques mois..
Moi : Si on t'avait dit quoi ?
Amine : Bah tout ça, nous deux.. Et d'ailleurs c'est un truc de ouf parce que y'a absolument personne qui a remarqué, ça a leak nul part ni rien c'est grave étonnant
Moi : Je crois que Billy a remarqué hein, dis-je en rigolant
Amine : Nan mais je parlais des réseaux, mais ouais Billy c'est autre chose. Lui il est dangereux, il peut dire des dingueries et il s'en rend même pas compte !
Moi : Ouais donc je rectifie, ça a leak nul part POUR L'INSTANT
Amine : Nan sah sur ça il sait comment je suis. Je protège grave ma vie privée je suis trop parano
Moi : Il a quand même leak le prénom de ta mère hein, dis-je en rigolant
Amine : Mais nan mais ça c'est une vanne avec Inox, et en plus c'est faux elle s'appelle même pas comme ça c'est ça le pire !
Moi : Ah ouais ? Elle s'appelle comment ?
Amine : Elle s'appelle ******, je t'ai dit Marzouka ça existe même pas frère ça va me suivre toute ma vie cette connerie, dit-il d'un air dépité.
Moi : Ouais mais bon, en vrai c'est mieux dans ce sens là que l'inverse
Amine : Ouais c'est vrai.. Bon, attends deux secondes je reviens je vais aux toilettes.
Moi : Vas-y, dis-je en reculant afin qu'il puisse se lever. Bah je vais me changer en attendant.
Tandis qu'Amine était aux toilettes, je me rendis dans ma chambre et enfilai un jogging et un t-shirt en guise de pyjama. Tandis que je m'habillai, je repensai à la proposition de De Almeida et réfléchissais à la manière d'aborder le sujet. Il n'y avait pas 36 solutions. Je devais aller droit au but. Lorsque je revins au salon, Amine était déjà assis sur le canapé et regardait son téléphone. Je pris une grande inspiration puis m'assis à côté de lui. Il posa son téléphone au même moment et releva la tête vers moi.
Amine : Eh tu veux pas regarder un film ? Me demanda-t-il.
Moi : Ouais vas-y si tu veux, mais attends avant je voulais te parler de quelque chose, dis-je en me tournant vers lui.
Amine : Ouais vas-y dis moi ?
Moi : De Almeida m'a proposé un poste au siège d'Adidas
Amine : Mais nan ! Psahtek c'est archi bien nan ?
Moi : Ouais, sauf que c'est à Strasbourg
Amine : Attends mais donc tu vas partir à Strasbourg là ?
Moi : Ça serait pour deux ans, juste le temps que le siège soit transféré à Paris. J'ai pas encore donné ma réponse j'ai jusqu'à lundi pour me décider.
Il marqua une pause.
Amine : Ouais donc en fait c'est pas qu'une promotion c'est une mutation aussi
Moi : Ouais mais juste pour deux ans
Amine : Nan mais tu me dis « juste » comme si on parlait de deux semaines là. C'est loin Strasbourg et c'est long deux ans hein
Moi : Si je sais
Amine : On t'a proposé ça quand ?
Moi : J'ai eu la réunion lundi
Amine : Et tu m'en parles que maintenant
Moi : Je voulais t'en parler mardi mais finalement on s'est pas vu
Amine : Nan mais arrête toi aussi on s'est parlé toute la semaine, t'aurais pu m'en parler avant
Moi : Donc t'aurai voulu que je t'annonce ça par téléphone ? Je sais pas on parle pas de ça par téléphone nan ?
Amine : Eh je sais pas mais fallait m'en parler plus tôt que ça en tout cas. Franchement j'ai pas envie d'être désagréable ou quoi mais j'ai l'impression d'être au pied du mur et je sais même pas comment réagir là
Moi : T'as raison, j'aurai peut-être dû t'en parler avant et je m'excuse pour ça, mais dis pas que je te mets au pied du mur. T'es forcé à rien du tout, je te contraindrai jamais à m'attendre ou quoi que ce soit.
Amine : Nan mais c'est pas toi qui me contrains, c'est pas comme ça que ça marche quand t'apprécie quelqu'un. Même si demain tu pars et que tu me demande pas de t'attendre bah je serais quand même poussé à le faire
Moi : Je sais et jsuis désolée, c'est pas facile pour moi non plus. Je dois me décider rapidement, j'ai toute ma vie à Paris mais à côté de ça je sais pas si j'aurais deux fois cette opportunité.
Amine ne répondit pas. Il avait l'air pensif et regardait dans le vide, la mâchoire serrée. Je regrettais déjà d'avoir abordé le sujet.
Amine : Sah c'est ta carrière et je veux pas t'influencer donc fais comme tu le sens.
Je ne répondis pas et me contentai d'hocher la tête. Après quelques instants passés sans parler, je brisai le silence.
Moi : On regarde quand même un film ?
Amine : Ouais, vas-y choisis
Moi : Le voyage de Chihiro ?
Amine : T'aime bien les Ghibli ?
Moi : Ouais, pourquoi t'aime pas ?
Amine : Si si j'aime bien
J'allumai donc la télé et mis le film en route. Je le sentais un peu distant mais je ne pouvais pas lui en vouloir. Je m'étais donc assise un peu moins près que d'habitude afin de lui laisser l'espace dont il avait besoin. Au bout d'un certain temps, je sentis mes paupières devenir lourdes. Je luttais contre le sommeil lorsque je sentis le bras d'Amine s'enrouler autour de mon épaule et me tirer vers lui. Il déposa un coussin sur ses genoux.
Amine : Viens là, pose ta tête, dit-il doucement.
Sans dire un mot, je m'exécutais. Alors que je m'endormais, je sentis de légères caresses dans mes cheveux. Je sentais son regard sur moi. Je me mis donc sur le dos afin de voir son visage. À cause de la pénombre, je n'arrivai pas à savoir ce qu'il pensait. Je levai ma main droite et la posai sur sa joue, la caressant doucement de mon pouce. Il esquissa un léger sourire en coin, puis tourna sa tête et embrassa ma main. Je sentis un picotement familier dans mon nez tandis que ma vision se brouillait légèrement. Je n'avais vraiment pas envie de le laisser. Je pris sa main entre les miennes et y entrelaçait mes doigts. Quelques minutes plus tard, la fatigue eu raison de moi.
J'ouvris les yeux quelques heures plus tard. Amine était toujours là et s'était endormi lui aussi. Je me relevai en prenant soin de ne pas le réveiller et me dirigeai vers la salle de bain afin de me rafraîchir avant de dormir. Je me démaquillai, me brossai les dents et attachai mes cheveux en une tresse. Je revins au salon et vis qu'Amine s'était réveillé.
Moi : Ça va ?
Amine : Mmmh mmh, grogna-t-il en s'étirant. Putain je me suis endormi d'un coup
Moi : Tu veux dormir ici ? Je te laisse ma chambre si tu veux
Amine : Nan t'inquiète je vais rentrer, dit-il en se relevant.
Il ramassa quelques coussins qui étaient tombés du canapé, puis se dirigea vers la porte d'entrée. Je le suivis et restai à côté de lui le temps qu'il se rhabille. Une fois prêt, il se tourna vers moi, pris mon visage entre ses mains et pressa ses lèvres contre mon front. Ce baiser là était différent, plus appuyé, plus long, comme un au revoir. À cette pensée, mon coeur se serra encore plus fort.
Moi : Rentre bien, murmurai-je tandis qu'il me relâchait. Fais attention sur la route il est tard.
Amine : Ouais t'inquiète.
Je lui ouvrit la porte et il sortit. En refermant la porte, je sentis les larmes que j'avais retenu toute la soirée couler sur mes joues. C'était l'une des décisions les plus difficiles que j'avais eu à prendre jusque là. Je devais en parler à Sanaa.