Le chapitre 64 a été posté ce matin, vérifiez de bien l'avoir lu :)
24 septembre 2023
Suzuka, Japon
Pierre ne répond pas et la pianiste sent ses jambes faiblir. Elle avait déjà eu peur l'année dernière sur ce même circuit quand la monoplace de Pierre s'était retrouvée avec un panneau publicitaire sur le nez de l'aileron avant. Elle avait eu peur en voyant la grue au milieu de la piste sur les ralentis des images.
Elle est certaine de détester ce circuit désormais. La pianiste sent ses jambes faiblir en imaginant que Pierre ne s'en sorte pas et qu'elle se retrouve avec un enfant toute seule sur les bras. Heureusement que le directeur de l'écurie est à ses côtés pour la rattraper avant qu'elle ne touche le sol. Sans un mot, l'un des ingénieurs stratégiques libère son tabouret sur la passerelle et ils prient la pianiste de bien vouloir s'asseoir.
- Il y a la voiture médicale, souffle le team principal. Nous attendons des nouvelles.
Esmée acquiesce faiblement. Elle ne se sent vraiment pas bien, elle pense aux parents du pilote qui n'ont toujours pas de nouvelles. Son ventre se contracte une nouvelle fois, elle n'était pas prête et laisse échapper un petit gémissement qui alerte les ingénieurs autour d'elle.
- Esmée...
- C'est rien, assure-t-elle d'une voix tremblante face aux coups qu'elle vient de recevoir.
Esmée ferme les yeux un court instant en serrant les dents pour faire passer la douleur qu'elle ressent lors de quelques contractions bénignes. Elle se masse le ventre d'une main pour tenter de décontracter son utérus qui joue des siennes.
Rien ne va, encore moins en voyant les autres monoplaces s'arrêter dans la voie des stands suite au drapeau rouge. Elle croise le regard clair du monégasque au travers de sa visière relevée, et, ses yeux scintillants ne la rassurent pas tandis que Charles s'extirpe de sa monoplace rouge pour rejoindre son garage.
Soudainement, l'ingénieur de Pierre fixe son écran de commandement en constatant qu'une lumière clignote signifiant que la radio est allumée. Il appuie sur un bouton tout en parlant, il demande des nouvelles à Pierre.
Esmée n'entend pas la réponse à cause du casque mais elle voit les traits de l'ingénieur se relâcher instantanément. Il ajoute à l'ensemble de la passerelle de commandement :
- Il est conscient, les médecins essayent de le sortir de la monoplace.
Esmée soupire de soulagement et elle relève les yeux vers l'écran de diffusion et constate que Pierre bouge à l'intérieur de sa monoplace. Il détache son volant avant de le repousser hors de son cockpit, plusieurs médecins s'activent autour de lui pour l'aider à se détacher.
La voiture est en piteux état, trois suspensions se sont rompus et le font plat est abîmé. Esmée l'observe quitter sa monoplace par le halo avec difficulté, il est aidé par un médecin qui le soutient. Pierre paraît sonné en ayant une démarche mal assurée. Ils finissent par le faire monter dans une ambulance.
Une main presse l'épaule d'Esmée pour attirer son attention. Elle se tourne pour faire face à Otmar Szafnauer, le team principal, qui murmure aussi soulagé qu'elle :
- Je viens d'avoir les commissaires, il va être amené au centre médical du circuit.
Il n'en faut pas plus à la pianiste, elle se lève d'un bond en jetant un coup d'œil à Laurent Rossi qui acquiesce. Il va l'accompagner. Sans un mot, ils repassent par le garage où se trouvent Ilies et Elena.
- Je vais aller au centre médical, dit-t-elle à leur attention.
Sa voix tremble tandis que Elena acquiesce. En voyant le directeur de l'écurie à ses côtés, elle ne demande pas pour l'accompagner, ce n'est pas la peine. Elle voit bien qu'Ilies souhaite s'y rendre aux côtés de l'espagnole.
- Esmée !
Elle se retourne pour faire face à Charles, se tenant dans sa combinaison, à l'entrée du garage de l'écurie française. Il ne pénètre pas à l'intérieur de celui-ci, son genou tremble et il passe une main dans ses cheveux en étant inquiet.
- Est-ce que tu peux... envoyer un message à Isa pour qu'elle nous prévienne, moi et Carlos, à la fin de la course... je vais devoir y retourner et... tiens nous au courant pour Pierre...
La brune se pince les lèvres, elle est vraiment désolée de ne pas en savoir plus que lui. Son mouvement de tête est imperceptible mais les traits de Charles s'apaisent aussitôt, elle devrait probablement le serrer dans ses bras pourtant elle est incapable de bouger.
Elle finit par s'éclipser derrière Ilies pour se rendre au centre médical. En arrivant là-bas, Esmée a le cœur qui bat à cent à l'heure. Elle croise différents médecins et heureusement que Laurent Rossi est à ses côtés pour demander où se trouve le pilote dans un anglais fluide car Esmée serait incapable d'aligner quelques mots en temps normal, encore moins avec ses lèvres tremblantes.
Elle passe une porte et aperçoit enfin Pierre allongé sur un lit, des dizaines de fils reliés sur son torse dénudé et il esquisse un faible sourire en voyant la brune. Ses jambes tremblent et Guillaume, le manager de Pierre est déjà à ses côtés. Ce se lève en disant :
- Je vais appeler tes parents.
Pierre acquiesce en ne lâchant pas la pianiste du regard, il se pince les lèvres en constatant qu'elle tremble comme une feuille. Elle reste plantée à l'observer depuis l'encadrement de la porte, elle n'ose pas vraiment s'approcher. Le manager passe devant Esmée en lui lançant un faible sourire avant de refermer la porte derrière son passage.
C'est Ilies qui prend les devants en posant une main dans le bas du dos de la pianiste pour l'accompagner jusqu'au lit où se trouve Pierre. Elle se laisse tomber sur la chaise que Guillaume vient de quitter, ses yeux sont rivés sur les électrodes disposées sur le torse du pilote.
- T'es un sacré, lâche Ilies.
Il ébouriffe les cheveux du pilote d'un geste de la main. Ce dernier esquisse un faible sourire à son ami. Ilies finit par s'éclipser pour les laisser seuls, il referme la porte derrière lui et Pierre se tourne vers sa brune.
Esmée n'a toujours pas bougé et il sait que le moindre mot pourra la faire exploser en profonds sanglots. Elle a les yeux rivés sur le cathéter planté sur le dos de la main du pilote, et Pierre bouge faiblement sa main pour entremêler ses doigts à ceux de la pianiste.
A ce simple contact, Esmée relève la tête pour croiser son regard bleuté. Les larmes affluent aussitôt dans ses yeux chocolat, Pierre augmente la pression dans sa main pour rassurer qu'il se tient bel et bien devant elle.
- J'ai eu si peur, murmure-t-elle d'une voix étranglée.
- Je sais que tu n'aimes pas venir dans ce genre d'endroit.
Elle acquiesce mais elle se tient tout de même parmi toutes ces machines, à tenir la main du pilote jonchée de fils, reliés à différents machines émettant des bruits sonores qui lui rappellent bien trop de mauvais souvenirs.
- J'ai juste des petites ecchymoses sur le dos, rassure Pierre.
Et il n'en faut pas plus pour que la brune explose en sanglots, elle lâche la main de Pierre. Elle pleure la tête plongée dans ses petites mains. Le pilote ne comprend pas tout de suite ce qu'il a dit et il se souvient de ce qu'elle avait raconté à propos de son fils quand il était à l'hôpital dans un état critique. Il avait un hématome dorsal conséquent et Pierre se pince les lèvres.
- Je suis désolée, sanglote-t-elle.
Il aimerait la prendre dans ses bras si seulement il pouvait se lever de son lit. Pierre répond simplement d'une voix calme :
- C'est rien, c'est pas grave. Viens, j'te fais un peu de place.
Esmée relève les yeux vers lui en reniflant péniblement, il lui fait signe de s'approcher en se déplaçant légèrement sur le côté du lit. Elle comprend, et s'assoit sur le bord du lit en prenant garde à n'écraser aucun fil et elle se glisse dans ses bras.
Toute la tension accumulée disparaît dans les sanglots qu'elle lâche la tête dans le creux du cou de Pierre. Il ne dit rien, il se contente de frotter son dos d'un geste doux pour tenter de la calmer, sachant pertinemment que les mots n'ont pas beaucoup d'impact dans ce genre de situation.
Avec le temps, Pierre a compris qu'il devait juste être à ses côtés et que cela suffisait. Les minutes passent, ses sanglots se calment peu à peu sous le contact de sa main et elle finit par essuyer ses yeux larmoyants d'un revers de manche en se redressant pour rester assise sur le bord du lit.
Un soulagement énorme libère la cage thoracique d'Esmée quand elle parvient à mieux respirer. Elle masse son ventre d'une main en gardant la seconde dans celle du pilote, ce geste n'échappe pas à Pierre qui murmure :
- Ça va ?
Esmée comprend qu'il ne pose pas cette question à son attention, il ne la poserait pas en voyant son état émotif. Ses yeux bleutés se posent sur son ventre arrondi et Esmée acquiesce faiblement d'un geste de la tête.
- J'ai eu si peur, t'as pas répondu à la radio tout de suite, j'ai cru que t'étais...
- Ne termine pas cette phrase, coupe Pierre. Je vais bien, j'ai perdu connaissance quelques minutes avec le choc, et dès que j'ai pu, j'ai répondu.
La pianiste acquiesce en soupirant, elle comprend désormais l'interminable absence de réponse de Pierre à la radio. Elle essuie ses larmes une seconde fois, et sans un mot, elle décroche le pendentif appartenant au pilote pour le lui rendre. Esmée l'attache autour de son cou en déposant un chaste baiser sur ses lèvres, faisant sourire Pierre.
- Je ne suis pas prêt de te lâcher p'tit cœur. J'espère que tu le sais.
Esmée esquisse un faible sourire en se sentant mieux. Elle s'éloigne pour se réinstaller sur sa chaise en entremêlant ses doigts à ceux du rouennais. Il sourit avant qu'Esmée ne sursaute tandis que la porte s'ouvre sur le directeur général d'Alpine.
- Ça va, Pierre ?
- Ça va, répond ce dernier. Heureusement que j'ai lâché le volant, j'aurai pu me péter les deux poignets.
- Les médecins veulent s'assurer que tout va bien en faisant encore un scanner et une IRM complète sur le cerveau. Ils vont t'emmener à l'hôpital de la ville voisine.
Pierre acquiesce avant que le directeur principal ne s'approche pour lui rendre ses deux téléphones qu'il a récupéré au près de son manager et Pierre l'en remercie. Il se tourne vers la pianiste qui s'est de nouveau crispée en resserrant sa poigne autour de la main de Pierre, elle n'a pas l'air de mesurer qu'elle lui fait mal avec la pression qu'elle exerce.
- P'tit cœur, murmure Pierre. Il va falloir essayer de te détendre avant de me briser les phalanges, j'ai envie de conduire au prochain grand-prix avec mes deux mains.
Esmée semble s'en rendre compte et desserre immédiatement son emprise en s'excusant. Elle est anxieuse vis à vis des examens qu'il doit encore passer et quand ils sont transférés à l'hôpital le plus proche, la tension ne diminue pas en l'attente des résultats des scanners et du moment de l'IRM crânienne.
- Ça va aller, rassure Pierre. Je vais appeler mes parents en attendant de faire la dernière IRM.
La brune tend son téléphone au pilote qui compose le numéro qu'il connaît par cœur, sans prendre la peine d'ouvrir l'application contenant tous ces contacts. Il les rassure de vive voix :
- Tout va bien, je suis avec Esmée. La course est terminée ?
Son père répond que le podium vient d'être célébré, que le monégasque a remporté la course et un sourire étire les lèvres de Pierre face à cette nouvelle. Esmée panique aussitôt à l'entente du prénom de Charles et elle déclare rapidement :
- Je devais prévenir Isa pour qu'elle puisse leur dire... j'ai oublié mon dieu...
Elle se lève précipitamment de sa chaise mais Pierre l'attrape fermement par le poignet pour qu'elle puisse rester assise.
- Je suis sûr qu'Ilies l'a fait, assure Pierre. Je suis sûr et certain de ça.
Les parents de Pierre appuient immédiatement les propos de leur fils pour rassurer la pianiste. Elle se réinstalle sans un mot sur sa chaise en soupirant, tandis qu'elle les écoute discuter entre eux d'une voix lointaine.
- Est-ce qu'ils ont montré des ralentis de l'accident ? finit par questionner Pierre à son père.
- Oui.
- C'était bien sur le vibreur ?
- L'avant-gauche a explosé dessus, tu ne pouvais rien faire, confirme son père.
Pierre lâche un juron, il peste aussitôt contre la durée de son relais de pneumatiques qu'il a souhaité prolonger à fin de ne pas effectuer un arrêt supplémentaire. Cette stratégie avait pour but de dépasser la Ferrari de Carlos, finalement il s'est retrouvé dans le mur.
- Pérez t'est passé devant, il est quatrième, murmure la mère de Pierre.
Un autre soupir s'échappe des lèvres de Pierre avant qu'il ne raccroche après avoir assuré que les résultats de ces examens n'indiquent rien de mauvais. Il n'a aucun organe déplacé, ni d'hématomes crâniens, seulement des contusions sur son dos.
- Pierre...
Il se tourne vers la brune jouant avec sa main, elle s'amuse à entremêler leurs doigts. Esmée relève un regard vers lui, elle murmure d'une petite voix :
- Je ne suis pas prête de te lâcher, même si t'es cinquième. J'espère que tu le sais.
Et Pierre esquisse un sourire, sa déception s'évapore aussitôt quand il se trouve à ses côtés et que ses lèvres effleurent les siennes.
- Mais il faudra peut-être enlever ta pseudo moustache, souffle-t-elle contre ses lèvres.
je devais poster après la maj de demain, mais bon, vous avez une ange gardien... ✨️