Mélodie désaccordée

By ClaireTimgorsen

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Prête à tout pour s'éloigner de la relation toxique qu'elle entretient avec son petit ami du moment, Thea Løv... More

𝄞 Avant-propos 𝄞
𝄞 Chapitre 1 : Göteborg 𝄞
𝄞 Chapitre 2 : La Suède à l'honneur 𝄞
𝄞 Chapitre 3 - Une journée au studio 𝄞
𝄞 Chapitre 4 : Diana Ekern 𝄞
𝄞 Chapitre 5 : La tournée 𝄞
𝄞 Chapitre 6 : Édimbourg 𝄞
𝄞 Chapitre 8 : Carmen Odden 𝄞
𝄞 Chapitre 9 : Celtic Park* 𝄞
𝄞 Chapitre 10 : Le contrat 𝄞
𝄞 Chapitre 11 : Stockholm 𝄞
𝄞 Chapitre 12 : Un dénouement inattendu 𝄞
𝄞 Chapitre 13 : Dépôt de plainte 𝄞
𝄞 Chapitre 14 : Mauvaise surprise 𝄞
𝄞 Chapitre 15 : Retour à l'hôtel 𝄞
𝄞 Chapitre 16 : Breakfast 𝄞
𝄞 Chapitre 17 : Argentina 𝄞
𝄞 Chapitre 18 : Kidnapping 𝄞
𝄞 Chapitre 19 : La pampa 𝄞
𝄞 Chapitre 20 : La positive attitude 𝄞
𝄞 Chapitre 21 : À cœur ouvert 𝄞
𝄞 Chapitre 22 : Vacances bien méritées 𝄞
𝄞 Chapitre 23 : Créations 𝄞
𝄞 Chapitre 24 : Le destin 𝄞
𝄞 Chapitre 25 : Toxicité 𝄞
𝄞 Chapitre 26 : Einar Roed 𝄞
𝄞 Chapitre 27 : Les sœurs de Søren Hedgeland 𝄞
𝄞 Chapitre 28 : Midsommar 𝄞
𝄞 Chapitre 29 : Un show pas comme les autres 𝄞
𝄞 Chapitre 30 : Paris 𝄞
𝄞 Chapitre 31 : Le mariage 𝄞
𝄞 Épilogue : Toutes les histoires ont une fin 𝄞
𝄞 Mots de l'auteure 𝄞

𝄞 Chapitre 7 : Showtime 𝄞

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By ClaireTimgorsen

Dans le taxi qui nous mène au Easter Road*, j'échange par SMS avec Nils à propos de notre arrivée prochaine. À côté de moi, Søren dort à poings fermés. Il a raison, il va avoir besoin d'être en forme ce soir. Et puis, j'imagine qu'il aura dû puiser beaucoup d'énergie pour répondre aux questions des journalistes tout à l'heure. Lui qui en a une peur bleue et qui panique dès qu'il s'agit de promouvoir ce qu'il fait, il aura réussi à prendre sur lui, mais à quel prix ?

Enfoncée dans mon siège, je détourne mon attention de lui et laisse le paysage typique de l'Écosse – bâtiments, parcs et jardins – défiler sous mes yeux. Bien que notre itinéraire ne soit pas long, je prends le temps d'admirer chaque monument. Nous surplombons maintenant le centre-ville et mon GPS m'indique que nous nous trouvons à Calton Hill, une des nombreuses collines qui contribuent à la notoriété de la ville. À son sommet, se dressent deux observatoires, une tour en la mémoire de Horatio Nelson* et la Old Royal High School qui aurait dû abriter le Parlement à une époque.

Quelques instants plus tard, le véhicule aux vitres teintées emprunte une route de campagne  inhospitalière et peu fréquentée. Seuls des arbres centenaires aux branches asymétriques et fourchues dans lesquels s'engouffre un vent sans doute glacial viennent troubler la quiétude du moment. Le conducteur roule encore sur un bon kilomètre et ralentit.

— Voilà, c'est ici, nous prévient-il, en s'arrêtant complètement près d'une des entrées du stade.

— Merci beaucoup. Søren, réveille-toi. On y est, murmuré-je à son intention.

— Oh ? Déjà ? s'étonne-t-il, d'une voix ensommeillée.

— Oui, il faut y aller.

Comme un enfant qui vient d'émerger d'une sieste, il se frotte un œil et se redresse. Et, alors que je me détache, il m'imite et sort à son tour de l'habitacle. D'un pas assuré, nous rejoignons le reste de l'équipe qui se tient près de la scène couverte tout juste installée. Pour l'occasion, deux-trois artistes ayant collaboré sur plusieurs titres avec Søren ont fait le déplacement plus tôt que prévu.

— Ah ! Les voilà ! nous accueille Olav, d'excellente humeur. Tout s'est bien passé ?

Un sourire scotché aux lèvres, nous opinons du chef.

— Parfait. Bro'*, je te laisse filer te positionner à ta table de mixage ? enchaîne illico le manager. Les musiciens, les chanteurs et les intermittents sont prêts pour une dernière répétition avant ce soir.

Aussitôt dit, aussitôt fait. Avec souplesse, Søren monte les marches quatre à quatre, salue d'un geste de main amical l'ensemble assis sur des chaises rembourrées noires puis se hisse jusqu'aux platines qui l'attendent en hauteur.

Le moins qu'on puisse dire, c'est que ce jeune homme a une santé de fer. Et c'est un euphémisme... En plus de bénéficier d'une excellente condition physique, il aura récupéré plus vite que la moyenne avec cette brève période de repos !

Alors qu'une première mélodie envoûtante et entraînante charge l'air d'Édimbourg d'électricité, Olav me fait signe d'approcher.

— John ne vous a pas donné trop de fil à retordre ?

— Non, du tout. Il est resté correct et s'en est tenu aux sujets concernant sa carrière.

— Et Søren, il n'était pas trop angoissé ?

— Je l'ai trouvé plutôt détendu. Il a su gérer son stress à merveille et il s'est montré très précis dans ses explications.

— Aurais-tu oublié de me mentionner que tu avais des pouvoirs magiques ? Tu l'as ensorcelé, c'est ça ? plaisante-t-il.

— Saperlipopette, je suis impardonnable et démasquée, blagué-je.

— Jamais, ô grand jamais, il n'a su rester maître de lui-même, m'explique-t-il, à nouveau sérieux. C'est un vrai supplice pour lui, tu sais. Il fait des malaises habituellement.

— Oh... Le pauvre... me désolé-je. Je n'imaginais pas que ça pouvait aller aussi loin...

Un sourcil arqué par la stupéfaction, Olav recule d'un pas.

— Tu l'ignorais ?

— Oui. Nils m'avait bien mentionné qu'il détestait faire la promotion de ce qu'il produit mais c'est tout. Me voilà prévenue désormais...

Les bras croisés contre ma poitrine, je ne parviens pas à m'empêcher de pester intérieurement. Et si Søren s'était évanoui lors du trajet nous conduisant à l'hôtel ? Comment étais-je censée réagir ? N'étant pas préparée à cette éventualité, j'aurais pu le mettre en danger et empirer les choses en voulant bien faire... Pourvu qu'il ne s'agisse là que d'une erreur qui ne se reproduira plus et qu'ils ne me cachent plus, volontairement ou non, d'autres éléments importants...


✧·゚: *✧·゚:*


Sans nous préoccuper vraiment du nombre d'heures que nous lui avions consacré, la séance de travail s'achève. Il ne nous reste plus qu'à nous détendre et nous restaurer avant que les portes ne s'ouvrent et laissent entrer le public.

Je dois l'admettre : décompresser avant un show est indispensable.

Dans une ambiance bon enfant, nous mangeons en cercle les plats italiens qui nous ont été livrés et rions à gorge déployée. Puis, vient le moment tant attendu. La boule au ventre, j'observe du merch la foule déjà déchaînée remplir l'espace jusqu'à ne laisser aucun interstice. Les affaires vont bon train. Malgré les tarifs élevés pratiqués, les bijoux, t-shirts, sweat-shirts, pantalons de jogging et casquettes se vendent comme des petits pains.

Juste avant que le concert ne débute, je galope vers les vestiaires. Pour être sûre de ne pas les perdre, j'y ai laissé des affaires qui vont maintenant m'être utiles. Après avoir brandi tout mon attirail, je rejoins au pas de course le staff qui donne les dernières instructions au DJ.

Lorsque Søren fait son apparition, des cris stridents transpercent l'atmosphère étouffante. Des jeunes femmes, le visage ruisselant de larmes, s'arrachent les cheveux. D'autres, brandissent des pancartes sur lesquelles sont tenus des propos abjects.

Et bien, ça promet...

— Bonsoir, Édimbourg ! dit-il, au micro. Je suis ravi d'être ici ce soir, j'espère que vous aussi ?

En guise de réponse, l'assemblée hurle à pleins poumons et sautille sur place.

— Je vois que vous avez envie de passer un bon moment. Ça tombe bien, moi aussi, conclut-il.

Dès que les premières notes retentissent, les fans commencent à chanter et se déhancher au rythme de la musique. C'est là que j'entre en scène. Armée d'un Reflex*, je mitraille de photos l'événement de mon œil expert et filme ce qui me paraît essentiel. Tout y passe : les jeux de lumière grandioses, une mamie qui porte sa petite-fille sur ses épaules et qui danse, le visage émerveillé et le sourire béat d'un adolescent qui admire Søren jouant un morceau au piano, une magnifique fillette en fauteuil roulant qui pleure de joie tant elle est heureuse d'être là...

Rattrapée à mon tour par les émotions, je m'agrippe et m'adosse à une des barrières métalliques qui quadrille la scène. Le cœur battant à tout rompre, je me sens défaillir. Comme si j'allais tomber dans les pommes, mes oreilles se bouchent, ma vision se recouvre d'un voile opaque. Je défaille.

— Thea ? s'enquiert Nils, en me secouant énergiquement. Thea, tu m'entends ?

Le verre d'eau fraîche qu'il porte à mes lèvres ne me fait pas grand effet. Les jambes tremblantes et transformées en coton ne pouvant plus soutenir mon poids, je me laisse glisser à même le sol. Depuis qu'Einar m'a envoyée à l'hôpital il y a deux mois, je souffre de vertiges et de migraines qui ne disparaissent pas.

Bordel, qu'est-ce-qui cloche chez moi ?

— Thea !

Sa voix me fait l'effet d'un électrochoc. Bien que mes paupières se fassent lourdes, je lutte de toute mon âme et rouvre les yeux.

Søren accourt vers moi, s'accroupit et pose ses mains sur mes genoux.

L'air hagard, je le fixe. Suis-je en train de rêver ?

— Qu'est-ce-que tu as ? Tu veux que Nils te ramène ?

— Non, non. Il faut que je me relève et travaille.

— Tu n'es pas en état.

— Mais si. Regarde, je suis à nouveau debout, tenté-je de le rassurer en me redressant.

La mine inquiète, il m'entraîne plus loin.

— C'était quoi ça ?

— Rien de grave. Je t'expliquerai plus tard. Il faut que tu reprennes, les gens s'impatientent.

— Tu es sûre que tu vas tenir le coup ?

— Oui, je te promets.

Dubitatif, il m'emmène à proximité des coulisses improvisées.

— Tu ne bouges pas d'ici, m'ordonne-t-il. On rentre bientôt.

Encore peu gaillarde, je reste sagement sur la caisse en bois qu'il m'a indiquée. Les minutes défilent sans que je n'en prenne réellement conscience. Et puis, ça y est. C'est terminé. Craignant que je ne m'écroule par terre, Søren me saisit fermement par la taille et me guide jusqu'à la limousine qui nous attend dehors. Délicat, il m'aide ensuite à m'asseoir entre les différents membres de l'équipe.

— J'ai surpris Thea en train d'envoyer des informations confidentielles aux personnes que vous avez rencontrées cet après-midi, rapporte la pimbêche qui sert de petite-amie à Søren.

— Qu'est-ce-que tu inventes encore ? susurre le pianiste entre ses dents.

— La vérité enfin, mon amour... roucoule-t-elle, ses faux-cils battant presque la mesure. Tu n'as pas remarqué qu'elle n'était ni au merch ni dans la salle vers la fin ? C'est là que je l'ai vue...

— Ne dis pas n'importe quoi. Tu étais où ?

— Je l'ai suivie dans les vestiaires.

— Et bien, manque de pot, Thea se trouvait derrière moi. Tu n'as donc pas pu la croiser.

La mâchoire contractée, Carmen me toise. Cette fille est une vraie teigne... Pourquoi diable m'en veut-elle autant ?

Soulagée d'être arrivée à bon port, je prends rapidement congé et monte dans ma chambre. Éreintée comme je suis, je ne vais pas faire long feu... Revêtue de mon pyjama gris perle, je me glisse sous les draps et, alors que je m'apprête à éteindre ma lampe de chevet, je remarque que l'écran de mon portable vient de s'allumer. Imaginant déjà que c'est Diana qui m'envoie un message pour me souhaiter une bonne nuit, je le saisis.

De : Einar

Ma petite fleur, on s'amusait bien au lit... Tu ne crois pas qu'on pourrait repartir de zéro ? J'ai été con, je ne voulais pas te quitter...

Horrifiée, je déglutis avec difficulté. Mon téléphone glisse entre mes doigts et disparaît sous le lit. Comment réussir à fermer l'œil après ça ?


*Easter Road : stade de football à Édimbourg d'une capacité de 20 421 places.

*Horatio Nelson : duc de Bronte et vice-amiral britannique. Il s'est illustré pendant les guerres de la Révolution française et napoléoniennes, notamment à la bataille de Trafalgar où il remporte une victoire décisive pour la Grande-Bretagne mais il y perd la vie. Il est couramment appelé l'amiral Nelson par les Français et Lord Nelson par les Anglo-Saxons.

*Bro' : diminutif affectif de Brother.

*Merch : « Merchandise Store ». Stand qui propose des produits à l'effigie d'un artiste.

* Réflex : appareil photo de bonne qualité. 


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