Les promesses du parc

נכתב על ידי ElisaBerger039

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Jeune professeure de français, Clémence vient remplacer Adèle à Saint-André pour la seconde fois. Elle y retr... עוד

Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
Chapitre 10
Chapitre 11
Chapitre 12
Chapitre 13
Chapitre 14
Epilogue

Chapitre 9

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נכתב על ידי ElisaBerger039

Les vacances de Pâques approchaient à grands pas. Une certaine animation régnait auprès des adolescents qui attendaient ces deux semaines de congé pour profiter du beau temps ou partir en voyage. Les professeurs aussi avaient hâte même s'ils étaient moins agités que leurs élèves. Clémence était moins enthousiaste. Elle n'avait aucun projet et elle ne verrait pas son élève favori pendant ces longues semaines. Cette pensée l'attristait. Elle devait trouver quelque chose à faire pour ne pas se morfondre dans son canapé. Elle avait une semaine pour y réfléchir. Pour l'instant, elle devait dispenser ses leçons. Elle se motiva mentalement avant de retrouver ses élèves. Ses deux premières heures ne lui avaient pas laissé le temps de penser. De retour à la salle des professeurs, elle s'appuya contre la fenêtre et s'évada un instant parmi les nuages. Elle fut ramenée à la réalité par un message. C'était Bertrand qui avait écrit dans leur conversation de groupe :

"Salut, les jeunes ! Avec Alice, on trouve que ça fait trop longtemps qu'on s'est vus. Alors, quand, où et quoi ? On attend vos propositions."

Ce message tomba à pic. La perspective de revoir ses amis ravit Clémence. Elle voulut répondre mais la sonnerie annonça la reprise des cours. Elle prit ses affaires et se dépêcha de rejoindre les sixièmes.

En classe, elle leur donna un exercice à réaliser individuellement. Pendant qu'ils étaient penchés sur leur feuille, l'enseignante jeta des coups d'œil discrets vers Jordan. Elle emmagasinait dans sa mémoire le maximum d'images afin de se les remémorer quand elle ne le voyait pas. Elle s'en rendit compte et se trouva stupide.

— Pire qu'une ado ! pensa-t-elle en ayant un rire bref.

— Vous riez toute seule, M'dame ? demanda Xavier, spontané comme à son habitude.

— Oui. Il faut bien que je m'occupe l'esprit pendant que vous travaillez. D'ailleurs, vous avez eu assez de temps. On va corriger l'exercice ensemble.

La correction fut rapide. Il restait quelques minutes seulement avant la fin du cours. Clémence décida de ne pas entamer une nouvelle matière et demanda alors à ses élèves leurs projets durant le congé qui arrivait. Quand ce fut au tour de Jordan, il précisa qu'il restait en ville et qu'il irait certainement dessiner au parc les après-midis. La jeune femme écouta à peine les autres élèves. Elle venait de recevoir une information essentielle et ses vacances prirent une tournure plus positive. Lorsque la sonnerie retentit, la jeune femme retourna à la salle des professeurs et envoya un message à Bertrand précisant qu'elle était disponible les deux semaines de vacances. Elle proposa à ses amis de venir chez elle puisqu'ils n'avaient jamais vu son appartement. Elle rangea son téléphone en attendant leurs réponses. Finalement, ce futur congé la réjouissait. Le soir, tous ses amis avaient répondu par l'affirmative à sa proposition et ils fixèrent le mardi de la semaine suivante à midi pour se revoir. La jeune femme passa une belle soirée. Cette journée avait eu son lot de nouvelles agréables.

Le mardi des retrouvailles arriva vite. Clémence avait passé son week-end entre les courses et le nettoyage de son appartement. La veille, ses parents l'avaient invitée à dîner chez eux. Elle y était finalement restée tout l'après-midi. Elle n'avait donc pas eu l'occasion d'aller au parc mais elle se rattraperait aujourd'hui. En effet, en proposant à ses amis de venir chez elle, l'enseignante n'avait plus penser que sa table ne pouvait accueillir que quatre personnes. Elle avait alors élaboré un plan B. Ils iraient manger dans le parc après avoir pris l'apéritif à l'appartement. La météo annonçait du soleil et des températures atteignant les 22° C. Elle avait acheté une grande nappe carrée ainsi que de la nourriture pour pique-niquer.

La vaisselle était déjà dans un panier quand les premiers invités sonnèrent à sa porte. L'hôtesse servit les boissons ainsi que les chips et ils échangèrent les nouvelles. Alice et Bertrand étaient en plein déménagement, Anna et Simon essayaient toujours d'avoir un enfant et Estelle était partie en Croatie un mois plus tôt. Clémence leur annonça qu'elle enseignerait encore à Saint-André l'année suivante. Tout le monde était heureux pour les autres. Subitement, Estelle demanda pour visiter l'appartement. Son amie, sans bouger, pointa du doigt les pièces de son appartement.

— Ici, c'est le salon d'où tu vois la cuisine qui sert aussi de salle à manger. Là, à droite, tu as un petit couloir qui mène à la salle de bains, à gauche, et à la chambre, à droite. Voilà !

— N'essaie pas d'éviter la visite, Clem'. Lève tes fesses et montre-moi !

Estelle avait ce franc-parler qui plaisait beaucoup à Clémence. Elle se leva.

— Suis-moi, curieuse !

— Je préfère ça.

— Je viens aussi, dit Alice en les suivant accompagnée d'Anna.

— Nous, on reste ici, entre hommes et avec l'alcool, plaisanta Bertrand.

La jeune professeure présenta rapidement la cuisine aux filles puis leur montra la salle d'eau.

— C'est plutôt une salle de douche, précisa Estelle. Il est préférable de ne pas y être à deux car c'est assez petit. Ceci dit, ça peut être sympa avec un bel homme.

A ces mots, Clémence rougit en se rappelant la fois où elle s'y était trouvée avec Jordan. Elle tenta de masquer sa gêne en répondant simplement à son amie :

— T'es bête !

Les quatre jeunes femmes rirent de bon cœur avant de passer à la chambre.

— Elle est plus grande que je ne le pensais, lança Alice.

— C'est super beau, ça ! Qui l'a dessiné ?

Estelle avait remarqué le dessin de l'arbre affiché sur le mur. L'enseignante ne l'avait pas enlevé car elle ne s'était pas imaginé que ses amies y feraient un tour. Elle s'insulta mentalement.

— Une ancienne collègue. Elle me l'a donné quand je suis partie. On s'entendait bien.

— Et la carte, ça vient d'elle aussi ?

— Oui, oui. C'est suite à une anecdote d'un prof de géo qui avait une chienne qui avait fugué et qui s'appelait "Rose".

Clémence se félicita intérieurement de trouver des mensonges avec une telle facilité. Son amie eut l'air satisfaite de ces réponses et retourna dans le salon, suivie d'Alice. Clémence allait faire de même mais Anna passa devant elle et ferma la porte.

— Je te connais assez bien pour savoir quand tu mens, chuchota-t-elle. Les seuls dessins dont tu m'aies parlé sont ceux de cet élève qui était amoureux de toi. Ce sont les siens ?

— Oui, avoua la jeune femme un peu honteuse.

— Pourquoi les as-tu gardés et surtout mis sur ton mur ?

— Écoute, Anna, ce n'est pas le moment. Les autres sont juste à côté et tu es la seule à être au courant. Je te jure que je t'expliquerai tout mais pas maintenant.

— Bon, d'accord. Mais tu ne te défileras pas aussi facilement.

Anna sortit de la chambre. Clémence expira profondément avant d'aller retrouver les autres.

Il y a trois ans, lorsque la jeune enseignante avait quitté Saint-André après sa discussion houleuse avec Jordan, elle avait trouvé refuge auprès de son amie à lunettes. Bien que proche d'Estelle, elle avait une amitié plus profonde avec la compagne de Simon. C'est sur l'épaule de cette dernière qu'elle avait pleuré et confié tout son désarroi et sa tristesse après cet événement. Anna l'avait écoutée, consolée et remotivée. C'était la sœur qu'elle n'avait jamais eue.

Après l'apéritif, les hommes demandèrent à leur hôtesse quel était le menu. Elle leur annonça donc le pique-nique et l'idée plut à tous ses invités. Clémence mit la nourriture et les boissons dans un sac isotherme. La petite bande sortit en direction du parc. Ils trouvèrent facilement un coin d'herbe où se poser. Clémence et Bertrand déplièrent la nappe pendant que les autres préparaient la vaisselle et la nourriture. Alice ouvrit et servit les vins. Ils trinquèrent à l'amitié et dégustèrent leur repas en se remémorant leurs années estudiantines. Bertrand fixait quelque chose au loin quand il s'adressa à Clémence :

— Ce n'est pas ton élève, là-bas ? Celui que tu as ramené chez lui au Nouvel An.

La jeune femme regarda dans la direction que lui indiqua son ami.

— Oui, c'est lui.

— Il est plutôt mignon, lança Estelle.

— Estelle ! C'est un gamin, quand même, lança Anna.

Cette remarque poignarda le cœur de Clémence. Cela faisait des semaines qu'elle considérait Jordan comme un adulte mais aux yeux des autres, c'était encore un adolescent. S'ils savaient ce qu'elle ressentait pour lui, ils la jugeraient sûrement comme elle le ferait si ça arrivait à quelqu'un d'autre. Pour la première fois depuis qu'elle avait compris ses sentiments pour le jeune homme, elle se détesta.

— Ça n'a plus vraiment l'air d'un gamin. Il a quel âge ? 17 ans ?

— Non, 18... Il a raté une année suite à une longue hospitalisation.

— Ah ! Tu vois, Anna ! Il a seulement 8 ans de moins que nous. Regarde toutes ces stars qui sortent avec des hommes plus jeunes qu'elles.

— Attention ! Estelle est la nouvelle Madonna, blagua Bertrand.

La jeune femme brune lui tapa l'épaule et les autres éclatèrent de rire. Clémence tenta de s'enlever de la tête ce qu'Anna avait dit. Elle regarda son élève qui passa à quelques mètres d'elle. Il croisa son regard et lui sourit. Elle aussi. Elle ne se détestait plus. Elle l'aimait et c'est tout ce qui comptait.

L'enseignante profita du reste de l'après-midi avec ses amis. Ils restèrent dans le parc jusqu'au moment où l'air se rafraîchit trop. Ils ramassèrent ce qui était déposé sur la nappe, replièrent celle-ci et retournèrent à l'appartement pour y boire un dernier verre. Alice et Bertrand partirent les premiers suivis de peu par Estelle. Les deux autres demeurèrent encore une demie-heure. Quand Clémence les embrassa pour leur dire au revoir, Anna lui chuchota à l'oreille :

— Je n'oublie pas qu'on doit discuter. Ne l'oublie pas non plus.

Le lendemain, le soleil était timide mais toujours présent. Clémence n'avait pas mis son réveil et ce fut le chant des oiseaux qui la réveilla. Elle paressa une dizaine de minutes dans son lit. Elle se leva et ouvrit les rideaux de sa chambre. La lumière de l'extérieur l'aveugla avant de lui donner l'énergie dont elle avait besoin. Elle contempla un instant les dessins sur son mur. Elle était de bonne humeur. Elle savait que l'après-midi, en allant au parc, elle y rencontrerait sûrement Jordan. Elle déjeuna avec appétit et s'installa ensuite dans son canapé. Elle visionna un film afin que le temps passe plus rapidement. A midi, elle se doucha puis se maquilla et enfila une robe en jean. Elle chaussa ses baskets et mit sa veste pour sortir. Elle fit un détour par la boulangerie pour s'acheter un sandwich. Elle marcha jusqu'au parc et s'assit sur un banc. Elle avala son repas en observant les alentours puis entama la lecture du roman qu'elle avait emporté. Elle le lisait tout en levant de temps en temps les yeux pour repérer son élève. Elle se sentit ridicule mais continua tout de même. La jeune femme n'avait lu que quelques pages en 40 minutes. C'était pourtant une bonne lectrice quand elle était concentrée. Elle entendit une église sonner quatorze coups. Elle soupira puis fut prise d'un doute : était-il passé sans qu'elle ne le voie ? Elle s'allongea sur le banc et posa le livre fermé sur ses jambes. Elle était dépitée à l'éventualité de l'avoir manqué. Elle ferma les yeux quelques minutes pour s'accorder une pause dans ses pensées. Lorsqu'elle les rouvrit, elle aperçut Jordan qui se tenait debout près d'elle.

— Drôle d'endroit pour faire une sieste.

— Drôle de façon de saluer son enseignante, répondit-elle en se relevant tout sourire.

— Vous avez raison. Bonjour, Madame Leduc.

— Bonjour, Jordan. Comment vas-tu ?

— Très bien et vous ?

— Pareil. Je viens profiter du soleil.

— On est deux, alors.

Inconsciemment, elle lui fit une place à côté d'elle. Il s'y assit sans demander.

— Je vous ai vue hier avec vos amis...

— Ils t'ont vu aussi. Mon ami, Bertrand, t'a reconnu de loin.

— Reconnu ?

— Il m'a aidé à te mettre dans ma voiture après la soirée du Nouvel An.

Il rougit et baissa la tête.

— Je ne m'en souviens pas du tout. Cette soirée est très floue pour moi. La dernière chose dont je me rappelle, c'est un morceau de gâteau. Après, c'est le trou noir jusqu'à mon réveil chez vous...

— Tes amis ne t'ont rien expliqué ?

— Pas plus que ce vous m'aviez déjà dit. J'étais saoul, en train de vomir aux toilettes pendant que Marie paniquait puis vous lui avez proposé de me ramener chez moi pour qu'elle se calme. C'est tout. J'ai des bribes de souvenirs qui me sont revenues mais je ne suis même pas sûr que ce soit vraiment arrivé.

— Dis-moi, je pourrais peut-être te dire si c'était réel ou non.

— Il me semble que Max m'ait amené aux toilettes, que j'ai pris un ascenseur, qu'on m'ait caressé la joue, que je suis tombé... Ce genre de trucs.

Clémence tiqua à l'évocation de la caresse. Il l'avait sentie ! Elle fut mal à l'aise mais resta aussi naturelle que possible.

— Pour l'ascenseur, tu as pris celui du bâtiment où j'habite. Je n'allais pas monter les escaliers en te soutenant. Tu n'es pas bien gros mais tu étais quand même lourd pour moi. Quant au reste, je ne sais pas t'éclairer.

— Je crois que certaines choses de cette soirée resteront un mystère. C'est assez drôle quand j'y pense même si c'était très gênant de me réveiller chez vous.

— Tu aurais préféré te réveiller dans les toilettes du restaurant ?

— Pour être franc, je ne sais pas, dit-il en lui lançant un regard taquin.

— La prochaine fois, je t'y laisserai. Tu pourras comparer, ainsi.

— J'espère qu'il n'y aura pas de prochaine fois !

Ils rigolèrent tous les deux. Cependant, ils évitèrent de croiser leurs regards. C'était à chaque fois pareil lors de leurs conversations dans cet écrin de verdure. Ils se parlaient mais se regardaient à peine. Mais lorsque cela arrivait, le moment était toujours très intense.

— Pourquoi venez-vous dans ce parc ?

— Comme je te l'ai dit, je viens profiter du soleil.

— Non... J'aimerais savoir ce qui vous pousse à venir ici ? Vous y venez même quand il fait gris...

— C'est une bonne question. Je n'y ai jamais vraiment réfléchi à vrai dire. Toi, tu sais pourquoi tu viens ici ?

— Bien sûr. Cet endroit est inspirant. Il est toujours en mouvement : les personnes, les oiseaux, le vent dans les arbres. Il n'est jamais tout à fait pareil. C'est ça qui m'attire ici.

Clémence réfléchit un instant.

— Il m'apaise. C'est le lieu où je respire le mieux. J'aime aussi son côté vivant. Il est rare de n'y croiser personne. Depuis que j'ai quitté la maison de mes parents, c'est ici que je me sens le mieux. Je peux rester des heures assise sur un banc juste pour me sentir moins seule. C'est un refuge.

Elle sourit avec une certaine mélancolie. Elle venait d'admettre qu'elle se sentait seule mais elle n'en était pas embarrassée.

— Vous savez, on se sent tous un peu seul à un moment. Il faut simplement se dire que la solitude est plus sympa quand on la partage. Il suffit parfois d'une personne ou d'un instant.

— Jordan ?

Il se tourna vers elle.

— Merci de partager ma solitude.

Il n'eut pas l'air surpris par cette réflexion. Il se leva.

— Je vais aller dessiner. Je risque de venir souvent donc, si vous avez encore besoin de partager votre solitude, vous savez où me trouver. Au revoir, Madame Leduc.

— Merci, Jordan. A bientôt.

Il la quitta en lui adressant un signe de la main. Clémence le regarda s'éloigner. Cette conversation lui avait fait énormément de bien. Ils avaient eu un échange tellement sincère. Elle n'en avait pas l'habitude. Surtout avec les hommes. Elle se coucha de nouveau sur le banc pendant quelques minutes. Elle absorbait toute l'essence de ce moment.

Les jours suivants, elle se rendit au parc tous les après-midis. Elle y rencontrait Jordan et ils parlaient de choses banales comme la météo ou les cours. Ils n'avaient néanmoins pas eu de conversations aussi profondes qu'ils avaient eues auparavant. Cela n'empêcha pas Clémence de savourer chacune d'elles.

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