Kevin est couché sur le dos et fait face à un black qui me semble gigantesque. Son cul qui va et qui vient est magnifique. Il tient les deux jambes de Kev et les tend vers des directions opposées. Un pied pointe vers le haut, l'autre vers le bas. La scène est particulièrement torride. Il laboure généreusement mon colocataire qui gémit tout en se mordant les lèvres. Kevin tente visiblement de faire le moins de bruit possible. Il a les yeux fermés et secoue de temps en temps la tête. Quand il la tourne de droite à gauche, ses petits cris se font plus insistants.
– Vas-y, plus vite. Baise-moi. Plus profond. Là, c'est bon, continue.
Les bras de Kevin qui étaient tendus perpendiculairement au reste de son corps jusque maintenant se déplacent à présent au-dessus de sa tête. Il se donne la main à lui-même tout en oscillant au même rythme que son partenaire.
Je sens sa respiration s'accélérer et je le vois ouvrir les paupières. Il fixe son bel étalon dans les yeux puis baisse le regard pour profiter de sa pénétration. Tout d'un coup, il tourne un peu la tête vers moi et je devine qu'il me remarque. Il me fixe à présent tout en subissant le pilonnage de plus en plus fort de son amant.
J'ai l'impression qu'il exagère les mouvements de ses yeux et de l'ensemble de son visage. Sa bouche s'ouvre et se ferme sans qu'aucun son n'en sorte nécessairement. Tout d'un coup, tout s'enchaine :
– Oh oui, mmmm, c'est bon. Là, oui, vas-y. Oh oh oh baise-moi, han, aaah oh oui Aleeeeeex.
Sans même se toucher, Kevin décharge de beaux et puissants jets blancs qui viennent s'écraser sur la tête de son lit puis, sur son visage et enfin, sur son torse et la région de son nombril. Pendant tout cet orgasme, Kevin me fixe du regard et j'ai l'impression de participer à son plaisir. Mon cœur fait un bond dans ma poitrine lorsqu'il prononce mon prénom.
Kevin baisse les yeux et j'ai l'impression qu'il regarde à présent mon entrejambe. Je fais de même et je me rends compte que je suis en train de me masser la queue à travers le tissu de bon boxer.
– Euh, moi c'est Demba... C'est qui Alex ?
Kevin ne répond pas tout de suite, il a du mal à reprendre ses esprits. Quand Demba prononce mon prénom, Kev cesse de me regarder et se tourne vers son beau black.
– Tu peux pas comprendre.
– Putain, tu m'as coupé dans mon élan là. Je suis en train de débander. Tout ce cinéma pour rien.
– T'as qu'à rentrer chez toi si t'es pas content.
– Mais arrête, qu'est-ce qui t'arrive ? J'ai fait quelque chose de mal ?
– Non, excuse-moi. Je suis pas bien en ce moment et j'ai cru que tirer un coup me ferait du bien. Viens, laisse-moi te sucer.
– Nan c'est bon. De toute façon, je le savais que revoir un ancien plan ça sert à rien. Va te faire foutre.
Le black, qui a entretemps déculé, prend un pan de la couette de Kevin pour essuyer son sexe démesuré. Une fois débout à côté du lit, il ramasse un t-shirt qu'il utilise pour se frotter tout le corps, le rejette et rassemble ses vêtements. Je n'attends pas plus longtemps pour me réfugier fissa dans ma chambre et ne pas risquer de le croiser.
Il quitte l'appart rapidement et ne prend aucune précaution au moment de refermer la porte d'entrée qui, fort heureusement, ne réveille pas Sam.
Je n'ai pas débandé et je décide d'aller me branler dans la salle de bain. L'expression de Kevin, pratiquement défigurée par le plaisir, me revient sans cesse et je me repasse le film de ce que je viens de voir : son visage arrosé par la pluie de son sperme. Le mien vient se déverser, de manière bien moins sexy, dans la cuvette des WC.
Je ne crois pas un instant que l'orientation sexuelle de quelqu'un puisse changer avec le temps. Je me souviens avoir regardé une vidéo porno gay dans le passé et cette position du missionnaire, fort proche de celle entre un homme et une femme, ne m'avait rien apporté. Je l'avais même trouvée un peu grotesque. Mais ce soir, imaginer les sensations qui devaient parcourir tout le corps de Kevin, le plaisir qu'il a ressenti au moment de l'orgasme m'ont mis dans un état d'excitation particulièrement intense. Comment puis-je être amoureux d'une fille, me sentir bien au pieu avec elle et bander si fort à la vue d'un rapport homosexuel.
Mais il y a autre chose. Je ressens une forte envie de prendre à nouveau Kevin dans mes bras. J'ai bien compris qu'après avoir joui, il ressentait une grande tristesse. Ca se lisait sur son visage comme dans un livre ouvert. J'ai mal pour lui car je sais être la cause de son malheur. J'ai envie de le serrer fort, de le caresser et de le rassurer.
A-t-il crié mon nom parce que nos regards étaient soudés ? S'imaginait-il baisé par moi et non par son plan Q ? D'ailleurs, je suis rassuré que celui-ci ait utilisé cette expression. Ce n'était que du sexe et ma jalousie s'estompe un peu. Je tire encore une autre conclusion : je viens de me masturber et de jouir et malgré ça, je continue à penser à Kévin. Si mon attirance n'était que sexuelle, une fois les couilles vidées, je ne devrais avoir aucun mal à chasser son image de mon esprit. Mais l'envie me brûle de le rejoindre pour le réconforter et pour lui présenter des excuses. Ce que je craignais le plus est-il en train de se confirmer ? Les sentiments que j'essaie de me cacher sont-ils bien réels ? C'est un problème et je dois arrêter d'être dans le déni.
Je quitte la salle de bain et je suis obligé de passer par ma chambre pour retourner vers celle de Kevin. Il faut que je mette les choses au clair avec lui et surtout, il faut que je fasse amende honorable.
– Qu'est-que tu fabriques Alex ?
– Euh, j'arrive pas à dormir, je tourne en rond mais c'est rien, ça va passer princesse.
– Viens ici, je suis réveillée aussi maintenant. Viens te coucher. Tu veux un verre d'eau ?
Je me rappelle avoir été interrompu tout à l'heure, alors que j'allais me servir à boire. Et même si je l'avais oubliée, ma gorge sèche se rappelle à présent à mon souvenir.
– Je veux bien. Merci mon amour.
Je n'ai d'autre choix que d'attendre sous la couette le retour de Sam. Nous finissons par nous endormir, en chien de fusil. Sam est calée contre mon ventre et dans mes bras. Je suis son Morphée, elle est mon Alcyone et de naufrage de couple, il est bien question ici aussi.
***
La journée de dimanche est plus calme que la veille : un repas bien plus simple à midi et uniquement du travail scolaire ensuite. J'ai bien avancé dans tout ce que je devais terminer cette semaine et je peux aborder la dernière ligne droite de l'année en toute sérénité.
C'est un peu plus compliqué pour Sam mais j'ose croire l'avoir aidée en anglais et en espagnol, comme je l'espérais. Sam a une grande culture et connait une foule de détails sur l'histoire ancienne et récente de centaines d'endroits dans le monde et plus particulièrement au Mexique, USA et Canada. Ses cours de communication et tout ce qui a trait à l'organisation des voyages sont une spécialité où elle aura tous ses points mais les langues sont vraiment un problème pour elle. Pour l'instant, elle se destine à l'international et donc, elle doit faire des efforts.
– C'est clair que même si tu décidais de rester uniquement en France, tu ne peux quand même pas te passer de l'anglais.
– Nan mais, de toute manière, je dois viser plus haut. Je me suis lancée tête baissée dans l'histoire et la géographie nord-américaine pensant que je pourrais remettre l'apprentissage de la langue à plus tard mais y a urgence là.
– C'est con parce que c'est vraiment ta spécialité ce continent. Tu es la Beethoven du tourisme !
– Hein ? Pourquoi ?
– Ben c'était un maître de musique mais sourd. Et toi, une guide touristique hors-pair mais muette.
– T'es con. Et c'est pas marrant. Même si je rêve d'emmener des groupes français découvrir l'Amérique du Nord, je dois absolument maîtriser l'anglais et l'espagnol.
– On a toujours remis ça à plus tard mais on devrait y aller pendant les vacances. Je t'ai déjà dit que c'était chaud de se lancer dans tout ça sans y avoir mis un pied avant.
– De toute façon, c'est pas cette année que les voyages touristiques seront autorisés. Ni aux States, ni au Canada et encore moins au Mexique.
– Mais si c'est pour tes études ?
– Nan, si on y va à deux c'est pas vraiment autre chose que du tourisme.
– Et finalement, tu avais postulé pour ce programme en immersion ? Tu y as donné suite ? Parce que maintenant, pour l'année prochaine, ça va être tard.
– Si, justement, il paraît que plein de candidats ont changé de plans et mon père m'a inscrite sur une liste d'attente. Il y aurait des places vacantes à combler en last minute.
– Comme ça, sans te demander ?
– Ben non, j'en avais touché un mot il y a quelques temps et là, il a sauté sur l'occasion, la liste se remplissait vite apparemment. Mais il aurait pu me demander confirmation avant, ne serait-ce que vis-à-vis de toi.
– Non mais attends, qu'on soit à 500 km ou à 5000 km de distance, ça change pas grand-chose et tes études c'est important. Je ne veux pas que tu gâches tes rêves à cause de moi.
– Je suis soulagée que tu le prennes comme ça. J'avoue que je ne savais pas comment aborder cette inscription avec toi. Je comptais le faire ce week-end mais par moment, je me disais que mes chances sont tellement minces alors autant attendre que ça se concrétise pour t'en parler.
– Mais arrête, ça serait génial pour toi. Tu le mérites tant et ça te fera le plus grand bien. C'est ce qui te manque, de la pratique et pour ça, l'immersion ça sera top. Je suis sûr que si tu peux partir un an, tu reviendras au moins bilingue en anglais et pour l'espagnol, ça va t'aider aussi si tu vas dans le sud.
– Oui, le but c'est la région de Los Angeles. Mon père connaît un type qui bosse dans la commission d'attribution mais bon, y a les lois sur la Covid aussi. Et puis ça tombera peut-être simplement à l'eau cette année. C'est compliqué.
– Tu sauras quand ?
– A tout moment. Mais si le 15, je n'ai pas de news, c'est mort.
– Ca va être chaud pour les démarches et le logement. Je vais déjà en parler à mes parents. Ils ont déjà été faire des séminaires là-bas et ils ont plein de contacts. Et je t'ordonne déjà d'accepter leur aide s'ils veulent donner de l'argent hein.
– Ca me gênera. Mais je t'avoue que j'accepterais de bon cœur. Mes parents ne roulent pas vraiment sur l'or.
– N'y pense plus, tu aurais dû m'en parler plus tôt, on aurait déjà lancé la machine.
J'ai vraiment l'impression d'être un monstre. Comment puis-je penser au fait que si elle part aux États-Unis, l'année scolaire prochaine, cela me facilitera les choses par rapport à Kevin. Mais c'est pourtant bien ce qui me vient d'abord en tête. Quelle lâcheté, je me répugne moi-même.
En parlant de Kevin, il semble bien être parti en pleine nuit car aucune trace de lui aujourd'hui. J'ai dormi trop profondément pour l'avoir entendu quitter l'appart. Je me demande bien où il est et avec qui.
– Tu avais envoyé un message à Kevin finalement ?
Je ne dois pas mentir pour lui répondre, j'ai vraiment oublié de le faire. Pas comme si je ne pensais pas à lui, au contraire, mais je ne sais pas trop quoi lui dire. J'aimerais tellement lui parler de vive voix et j'ai bon espoir que cela sera possible dès ce soir ou demain. Il ne va pas quitter l'appart tout le reste de l'année scolaire tout de même.
– Tu exagères ! C'est pas cool de ta part, il va se sentir rejeté si on ne prend pas de ses nouvelles. On devrait tout de même s'inquiéter d'être la cause de son éloignement après tout.
– Tu as raison...
– Fais-le maintenant.
Si je n'ai pas encore envoyé ce message, c'est aussi parce que je sais la vraie raison de son éloignement. Et je n'ai pas envie de simplement lui demander où il est, si ça va ou s'il veut bien revenir. Avant tout ça, ce que j'ai envie de faire, c'est m'excuser. Mais avec Sam qui est quasiment plus proche de l'écran de mon iPhone que moi, je ne peux écrire ce que je veux.
– Est-ce que tu te rends compte que tu me colles littéralement ?
– Excuse-moi, j'ai tellement envie de savoir ce qu'il te répondra, ça commence à m'inquiéter et je ne vais penser qu'à ça sur la route tout à l'heure.
Ce qui m'inquiète aussi, c'est qu'en commençant un nouveau message à Kevin, l'historique de nos conversations va s'afficher. Mais, en théorie, rien de compromettant. Le petit empilement de bulles bleues se révèlent finalement bien anodin et elles ne parlent que détails pratiques sur le quotidien de deux colocataires.
Je me lance : "Salut Kev. Tout va bien pour toi ? Sam et moi nous inquiétons un peu j'avoue. Elle me demande de l'excuser si ses propos t'ont choqués vendredi soir. Donne-nous de tes nouvelles et à très vite. Alex et Sam"
J'espère qu'en incluant Sam dans ce message, il comprendra que je le fais sous son contrôle ou du moins, en sa présence.
– Ca va comme ça ?
– Impec ! Envoie.
Ce que je fais d'une pression sur le bouton idoine. La petite mention "Distribué" apparaît sous mon message et je sais déjà que nous ne verrons pas s'il l'a lu. Cela n'apparait jamais dans les conversations avec Kevin, il a sans doute désactivé cette fonctionnalité. Sam qui n'est pas aussi observatrice et qui jongle moins que moi avec tous ces détails techniques ne relève pas et s'impatiente d'une réponse. Après quelques minutes, nous passons à autre chose.
Sam tente de faire durer cet après-midi le plus possible mais elle doit prendre la route et il est déjà 16h. Elle a 500 km à faire ce qui fait que, si ça roule bien, elle sera chez elle vers 21h.
– Je n'en reviens toujours pas de ce que tu as fait pour moi ce week-end. Toute cette route pour, finalement, moins de 48h ensemble. Mais quelle bonheur de te retrouver.
– Merci mon chéri. Ca m'a fait plaisir à moi aussi. Et en prime, je vais gagner 10 jours sans mes vieux. Ha ! Ha !
– Tu auras Internet là où tu vas faire ta quarantaine ?
– Non, pas de wifi mais bon, on se parlera en 4G.
– Super.
– Bon, bisou mon amour.
– Attends, je viens jusqu'à la voiture.
Je l'aide à placer son sac dans le coffre, je l'embrasse une dernière fois et là voilà à manœuvrer pour quitter son emplacement. Un petit signe de la main, un coup de klaxon et un dernier craquement de la boite de vitesse en guise d'au-revoir. Sam avait les larmes aux yeux au moment d'entrer dans le véhicule et moi, la seule pensée qui me venait était que j'allais pouvoir faire le point avec Kevin. Quel égoïste je suis.
***
Une heure, c'est le temps qu'il m'aura fallu pour tout ranger dans l'appart et lancer une machine avec mes draps. Je suis à présent affalé dans le divan avec pour seule occupation de faire défiler mon pouce sur Instagram. J'exécute ce geste machinalement sans vraiment regarder les photos qui défilent.
La porte de l'appart s'ouvre, Kevin est de retour. Il jette un œil dans toute la pièce, il vérifie sans doute que Sam est partie. Son tour d'observation ne passe pas par mes yeux qu'il semble éviter cette fois.
– Hey Kevin. Ca va ?
Je n'obtiens pas de réponse. Il m'ignore totalement et entre dans sa chambre sans en claquer la porte en la refermant cette fois. Mais, pour moi, c'est tout comme. Il a fait comme si je n'étais pas là et ça me fait mal. Cette fois, des larmes me viennent, que je fais disparaître du pouce et de l'index.
Sans plus attendre, je me lève et me dirige vers cette porte qui nous sépare. Elle est à deux pas, elle n'est pas fort épaisse et Kevin est juste derrière mais il a mis des millions de kilomètres entre lui et moi par la manière dont il est rentré chez nous. A l'appart je veux dire...