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Célesta joue machinalement avec les clés dans sa main, s'amusant à les faire sauter en l'air puis à les rattraper. La jeune femme se tient devant une grande bâtisse, dont les planches composant sa façade ne semblent plus être de première jeunesse. La maison devant elle comporte un rez-de-chaussée et deux étages, ainsi qu'une toute petite cave, nichée sous la surface de la terre. La peinture devait être rouge longtemps auparavant, mais les intempéries ont délavé sa couleur. Des planches barrent les fenêtres pour empêcher toute intrusion. La maison est assez large à sa base, mais les deux étages s'élèvent face au vent, plus étroits que le reste du bâtiment. Elle se dresse au milieu de la forêt, au centre exact d'un petit terrain d'où l'on a enlevé les arbres. Le chemin pour y accéder est long, surtout à pieds, puisque le taxi venu la chercher au terme de son voyage n'a pas voulu s'engager dans l'allée caillouteuse.

Le petit manoir ne paraît pas exactement accueillant. Il semble froid, humide, plein de courants d'air et de recoins sombres et effrayants. C'est le genre de maison où les adolescents se lanceraient comme défi d'y passer la nuit entière, pour le plaisir de se faire peur. Pourtant, aussi délabrée qu'elle soit, c'est maintenant chez elle. Sa maison, à elle, rien qu'à elle.

La jeune femme sait que rénover la maison ne sera pas une mince affaire. Cela lui prendra longtemps, plusieurs semaines de travail acharné durant lesquelles elle ne pourra rien faire d'autre. Mais ça ne fait rien. Quelque part, c'était son but en venant ici. En travaillant d'arrache-pieds pour en faire un endroit habitable et agréable, elle compte se prouver que rien n'est perdu, qu'on peut tirer quelque chose même des cas désespérés. Et puis, Célesta doit bien avouer que le second avantage de cette maison était son prix : dans un tel état, et si éloignée du reste de la civilisation, elle a pu l'obtenir pour une bouchée de pain. Elle ne l'a même pas visitée, et l'a achetée avant d'arriver. Maintenant, elle commence à se demander si cette acquisition impulsive était une bonne idée...

Secouant la tête, Célesta reprend ses esprits et serre la clé dans son poing. D'un pas déterminé, elle s'avance vers la porte, et l'introduit dans la serrure. Étrangement, le mécanisme semble bien huilé, et l'entrée s'ouvre avec un cliquetis satisfaisant. Laissant sa valise sur le pas de la porte, elle s'avança dans la petite pièce qui s'ouvrait face à elle.

Elle devine être dans le vestibule d'entrée. Des traces d'humidité ont incrusté le plancher, signe de passages lors de jours pluvieux. L'espace d'un instant, elle se demande ce qui pourrait advenir s'il se mettait à pleuvoir et que le toit n'était pas étanche, avant de chasser cette pensée de son esprit. Elle passe à la pièce suivante, et s'arrête sur ses pas, impressionnée par le large espace devant elle.

Ce doit certainement être le salon, puisque l'endroit est vaste. Une fois que les planches seront enlevées, la lumière sera abondante et suffisante pour bien voir en journée. En revanche, les hiver nécessiteront certainement une source artificielle.

Ayant aperçu une porte conduisant vers une autre pièce, la jeune femme s'avance précautionneusement sur les planches, craignant qu'elles ne cèdent sous son poids. Pourtant, le bois doit être plus robuste qu'il n'y paraît, puisqu'elle arrive en un seul morceau à l'autre bout du salon. Elle pousse la lourde porte face à elle, puis laisse échapper un soupir.

Elle devine qu'elle se trouve désormais dans la cuisine. Cette pièce lui laisse aussi présager beaucoup de travail à venir... Des câbles électriques pendent du plafond sans aucune protection, et Célesta se surprend à penser avec soulagement que l'électricité était coupée. Ce qui ressemble à un évier se trouve au milieu d'un mur, et une odeur nauséabonde s'en échappe. La jeune femme ne s'attarde pas plus longtemps dans la pièce, ne désirant pas savoir la source de ce fumet. Elle passe à côté d'un placard vide, et pousse une nouvelle porte.

Metanoia [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant