Chap XI : Un Peu De Chance (2/2)

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La voix enfantine et aiguë de Synda est progressivement remplacée par une voix muée et plus adulte. Moins dans les harmonies, mais reste cependant mielleuse, comme fredonnant à chaque mot.

— Qu'est-ce que tu veux dire par là ? dis-je, la curiosité piquée à vif.
— Ton animal de compagnie s'amusait dans une de mes geôles à te guider à travers la forêt, sans jamais penser à son sort. Il était déjà condamné à mort. Je suppose que c'est logique vu qu'il s'appelait abnégation.
— Il est vivant ?
— Non, évidemment. Porneia, l'e-motio du vice de la luxure l'a dévoré.
— Je l'avais déjà compris, la dernière fois. Pourquoi tout ce charabia ?
— Il se trouve que sa cellule a toujours été vide, mon trésor.
— Vide ?

Subitement, la réponse me vient d'elle-même. Je me souviens des premières questions que j'avais posées à Synda, lors de notre première rencontre. Je relie cela au moment de notre échange sur le petit sentier.

— Porneia ! m'exclamé-je, sans perdre mon calme.
— Oui, mon cœur. J'ai remonté ta trace depuis le district du souffle de la peur. Je t'ai menée lentement, mais sûrement jusqu'à ma demeure. Tu es un met de qualité, mon trésor. Te dévorer me conféra trois fois plus de puissances, que lors de ma dégustation de Gastrimargia. Mais ne t'inquiète pas de tout cela, tu ne ressentiras absolument rien, je te l'assure... avant de finir en moi pour l'éternité.

Cette mauvaise blague a le don de m'exaspérer. Par une force que je tiens à augmenter, je me débats pour me sortir de ce cauchemar. Je m'efforce, lançant une bataille dans ma chair.

Je finis par ouvrir les yeux. Je sens un effroyable mal de tête. Je remarque que je suis dans une grande pièce aux parois d'un violet prononcé. Je tente de bouger mon bras droit pour la porter à mon front, quand je sens une sorte de lien m'en empêchant. Je tourne de suite mon regard vers mes membres et remarque que je suis liée, non pas avec un câble, mais avec de la toile d'araignée.

J'ai beau me débattre, je n'arrive pas à déplacer le moindre membre. Tout mon corps est coincé contre une toile plus grande et plus longue, allant jusqu'à la paroi en arc de voûte au-dessus. En considérant l'endroit, je la comparerai à l'intérieur d'un tronc creux.

Lorsque j'abaisse mon regard, j'aperçois une centaine d'autres corps dans la même situation. Enfermés dans des cocons pour les uns, liés presque dans la précipitation, pour d'autres. Ce sont des e-motios classiques, des dévoreurs aussi bien inférieurs qu'évolués, mais aussi des tvaraks, de toutes formes et de toutes les tailles.

— Qu'est-ce que c'est que... lâché-je, ne trouvant pas de mots pour décrire ce que j'ai devant moi.

En regardant plus loin, droit devant moi, bien au fond de tout ce champ de cadavres, je vois des dizaines de créatures. La lumière y est plus intense, là-bas. Des particules de gaz et de lumière virevoltent autour de dizaines de bêtes à l'apparence relativement humaine.

Je distingue sur elles : des cheveux fermés en boule sur la tête. La moitié du corps paraît dévorée par le sol. Elles sont assez maigres, sont étrangement belles, mais leur corps nageant entre le noir et le violet a l'air d'être désarçonné, telles des poupées qu'un marionnettiste a plaisir à manipuler.

Et au milieu de toute cette scène, un monstre tel un dieu se tient au centre. Je perçois un chant lancée à l'intention de la créature qui lève la tête, les paupières fermées, se délectant de cet instant comme en pleine euphorie. J'arrive à la décrire de là où je me situe : un corps bâti telle une immense mygale poilue, de son abdomen à sa tête, c'est une créature au profil étonnamment humain. Elle a de longs cheveux noirs de jais qui se jette tout le long de son corps. Elle a un visage d'une beauté renversante, un nez fin, un teint assez pâle avec des lèvres noires. Alors que je considère encore son visage, mes iris sont attirés par le mouvement en contrebas du corps, juste en dessous de l'abdomen, sur la partie arachnide de son corps. J'y détaille une gueule, énorme, ayant la gorge déployée alors que ses canines précisent une bestialité farouche.

Ce Que Tes Émotions Leur FontOù les histoires vivent. Découvrez maintenant