Chapitre 2 : Trois Nuits

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Jour 4

Quelque part dans les égouts

Heure inconnue

Trois jours depuis son échec. Trois jours! Désespoir, honte et tourment pendant 72 heures. Trois putains de jours à être dégoûté de soi, à s'empoisonner l'esprit avec des idées folles, à ne pas dormir, trop dérangé par des pensées malsaines. Il voyait sans cesse des perversités tout aussi effroyables que la dernière. Souvent, un nœud coulant… Pour seul repas, il dégustait les rats qu’il saisissait dans l'urgence de vivre. Il se glisse tranquillement autour de mon cou… Lorsqu’il avait soif, il était obligé de se désaltérer avec l’eau par terre. Brune et pâteuse. Je suis suspendu à quelques centimètres du sol… À chaque lapée, ce qu'il avalait devenait une boule informe et épaisse. La vertèbre, cassée, de biais, bloquant l'air…

Le soir, quand il entendait les siens dans ce tintamarre digne d'une fanfare militaire ; ô comme il désirait qu’ils en attrapent un et qu’ils lui donnent le châtiment qu’il lui aurait infligé pour faire pardonner sa peine. Il rêvait… Dans les méandres de son délire, il dessinait des plans. Il se voyait qui les attaquait… Savourant chaque moment… Les quatre murs qui l’entouraient s'étaient transformés, en soixante-douze heures, en un immense plan de bataille. Il sentait le sang qui lui coulait dans la gorge… Leurs cris résonnaient déjà dans son tympan comme un acouphène réconfortant.

Il fut soudain terrifié par ce bruit de pas allant et venant. Viennent-ils pour moi? Il se coucha et commença à ramper vers la porte. Avec l'espoir de l'homme aux abois, il dévisagea le mince rai de lumière à la recherche de pieds s'attardant devant chez lui. Que ce jet blanc qui faisait briller les fleurs de poussières volant au vent. On doit être le matin… se dit-il. Étrangement, à ce moment, cette phrase emplit la pièce poussée par un murmure. Encore ses pensées qui divaguaient, pensa-t-il en revérifiant. Les sons ne sortent pas hors de ma tête… c'est l'inverse! J'en suis sûr! J'en suis sûr! Oui, c'est ça, j'en suis sûr!

Il s'avança vers le centre de sa prison. Devant lui, au fond, l'Autre l'observait. L'Autre ne disait rien. Il concoctait. Lui, il le regardait faire. Il contemplait muettement et, parfois, chuchotait une série de syllabes incompréhensibles. D'autres fois, quand la douleur le dévorait lui aussi, ils laissaient un hurlement se faire écho.

Quand lui se dirigeait à gauche, il allait à droite. Je sais qu’il me fixe. Si tout continuait ainsi, la raison les quitterait pour de bon et se changerait en une folie dangereuse. Je ne veux pas – je ne dois pas… je ne dois pas – devenir comme Colin!

Lorsqu'il essayait de dormir, les murs bougeaient, le sol tremblait. Souvent, il reniflait un pain de viande au four ; souvenir d'une ancienne vie. Un visage lancinant, l’odeur du métal chauffé au rouge et des pleurs. Beaucoup de pleurs. Et beaucoup de rage. Et une pluie de neige sur cette route dans la nuit où ses mains sont recouvertes de sang… Je ne veux pas – je ne dois pas… je ne dois pas – devenir comme Colin! Ou sinon la ligne verte d'un moniteur cardiaque s'arrêtant...

Pourtant la folie était là, juste en face.

Mais il devait y renoncer. Il se le devait s'il désirait accomplir le Plan. Se venger de ce qu'ils lui avaient fait. Ensuite, Colin… En trois jours, il avait commencé à mettre en œuvre une idée. Il s'était entraîné. Il était presque prêt. Il regarda les dessins et sourit. Les attaques seraient plus impitoyables et plus fréquentes. Plus aucun prisonnier ; plus aucun captif ; plus aucune offrande au grand chef. Que des morts.

Et un foutu paquet!

Les plus faibles d'abord. Après on va monter! Pensa-t-il. Je vais tous les tuer! Tous! Un par un s'il le faut!

...Hikayelerin yaşadığı yer. Şimdi keşfedin