Chapitre 2 - La découverte

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Ce n'est qu'au bout de plusieurs longues années dans le désert australien, que Jo Meynet, le scientifique, pu établir enfin, un contact direct avec la tribu aborigène des Mundrukayous. Il lui fallut beaucoup de patience et de persévérance pour imposer, centimètre après centimètre, sa présence au cœur de son sujet d'étude. Il avait perdu quelques dizaines de kilos et, ne ressemblait plus à rien ou, pour être plus précis, disons qu'il avait quelque chose assez proche d'un cure-dent, enrobé dans un vieux cuir tanné. Jo, se nourrissait d'asticots, de vers, d'insectes en tous genres, qu'il rencontrait sous ses pieds. De temps en temps, la tribu lui laissait les restes des repas de la veille. Le scientifique les déterrait, sous le sable, à quelques dizaines de mètres du campement et les mangeait fébrilement, sans savoir si ces miettes lui étaient vraiment destinées. Mais qu'importe, il aimait y voir un début de contact et, se réjouissait des progrès de son étude. La tribu continuait à le tenir dans une profonde indifférence et, à bonne distance, mais la méfiance avait complètement disparu, enfin presque. Comme c'est bien souvent le cas, ce furent les enfants qui s'approchèrent en premier du blanc barbu. Toujours est-il, qu'à force de patience, Jo avait fini par percer le mystère des Mundrukayous, le secret de leur différence avec les autres peuplades aborigènes et leur spécificité par rapport au reste du monde civilisé.

Il faut savoir que, les aborigènes d'Australie entretiennent une relation particulière avec les rêves. Le temps du rêve (Tjukurrpa en langue anangu), aussi appelé « le rêve », est le thème central de la culture des aborigènes. Le « temps du rêve » explique les origines de leur monde, de l'Australie et de ses habitants. Dans la conception aborigène du monde, chaque événement laisse une trace sur terre et tout dans la nature découle des actions d'êtres métaphysiques qui créèrent le monde. La signification de certains lieux et de certaines formations naturelles est liée à leur origine dans le temps du rêve. Certains lieux, ont donc un pouvoir de rêve dans lequel réside le sacré.

La plupart des tribus aborigènes croient que toutes les formes de vies, plantes, animaux et humains, font partie d'un vaste et complexe ensemble d'interactions dont, l'origine remonte aux grands esprits des ancêtres, de l'époque du temps du rêve. Selon certaines versions, les esprits des ancêtres, qui ont créé la terre se retirèrent au fur et à mesure que le temps du rêve s'évanouissait. Dans une autre version, Altjira était le dieu du temps du rêve qui créa la terre et se retira comme le temps du rêve disparaissait.

Selon leur croyance, la vie consciente serait la création par le rêve d'entités désignées sous le nom de « fourmis vertes » ou « hommes éclairs » jaillis tels la foudre du titanesque « serpent arc-en-ciel » pour ensemencer la terre en y créant les plantes et les animaux, dépendant étroitement les uns des autres, avant de se réfugier, profondément enfouis sous les blocs de grès présents sur les sites sacrés, tel celui d'Uluru, ainsi que sous l'épais manteau du continent des brumes glacées, à la suite du grand cataclysme engendré par l'affrontement de deux de leurs frères, à cause du don de la mémoire aux humains. Elles sont en sommeil depuis, et cela jusqu'à ce que le monde de la surface soit de nouveau propice à leur règne, utilisant la télépathie afin de diriger les pensées et les actes de leurs créatures.

Pour les Mundrukayous, les croyances varient sensiblement. Selon eux, et aussi loin que remonte la mémoire ancestrale, les rêves n'existent pas. Autrement dit, vie consciente et rêve ne font qu'un. Il n'y a pas et, il n'y aura jamais de coupure entre le rêve et la conscience, pas plus qu'il ne peut y en avoir entre le jour et la nuit qu'ils ne considéraient pas comme deux éléments opposés. Pour la tribu des Mundrukayous, tout est réalité. Tout est une suite d'expériences de vie qui se transmet au fil du temps. D'une certaine manière, chaque élément est interconnecté et nécessaire au développement des individus. Au même titre que les usages quotidiens aident les membres de la tribu à grandir et affronter les dangers de la vie. Les rêves contribuent à stabiliser et façonner l'homme face à son propre destin. Tout est linéaire et sans interruption. De la naissance à la mort, les évènements dans la vie des Mundrukayous sont de nature à faire grandir la connaissance du groupe. La pensée collective est en perpétuel avancement, comme une gigantesque roue, battue par les vents. La vie tourne, la mort tourne, mais la connaissance générale de la tribu, elle, ne s'arrête jamais. Implacable et immuable, elle absorbe tout sur son chemin.

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