Chapitre 2

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Dans le véhicule de transport en commun qui la ramenait dans son quartier  à Marcory Remblais, Pauline ne décolérait pas. Elle avait toujours le visage fermé et la bouche tirée. Contre Sandra, Pauline était très remontée. Pendant tout le trajet en voiture, elle rumina sa rancœur. Pauline était blessée. Les remarques dures de son amie lui avaient fait du mal. Dans sa tête, elle entendait  toujours ses reproches.
Insinuer que c'était de sa faute si elle était toujours célibataire à trente ans ! Non mais pour qui Sandra se prennait-elle ? Soit disant parcequ'elle avait eu la chance de se marier très tôt avec un bon parti tel que Léandre Konan, son amie pensait que ce devait être aussi facile pour les autres.

— N'importe quoi ! siffla Pauline amère. Si elle revoit mes deux pieds encore chez elle, qu'elle change mon nom.

Pauline était décidée, elle n'irait plus jamais chez Sandra. Leur amitié, elle la décréta comme terminée.
Convaincue par cette idée, elle arriva enfin à destination. Du véhicule, Pauline descendit avant de prendre le chemin de sa maison. Un pied devant l'autre, la jeune femme marcha.
Passant devant le portail de l'église Sainte Bernadette située non loin de son immeuble, elle s'arrêta.
Il était midi. C'était l'heure de la messe. Les cloches de l'église  résonnaient. Celles-ci appelaient à la prière. Sur un coup de tête, Pauline pensa à s'y rendre. Il y avait longtemps qu'elle n'avait pas prié. Partagée entre la volonté de pénétrer dans le lieu de culte et celle de continuer sa route, la jeune femme hésita un court instant. Finalement, elle finit par renoncer à l'idée.
L'église, la prière et tout le reste, c'était de l'histoire ancienne. Pour Pauline, ça ne servait plus à rien. Combien de fois depuis toutes ces années n'avait-elle pas passé de temps agenouillée entre les bancs de cette église à implorer Dieu de lui donner un bon mari ?
Determinée, elle avait même participé à des croisades d'évangélisation. Elle avait également assisté à d'inombrables veillées de prière. Sur les injonctions d'hommes de Dieu à la moralité douteuse, elle leur avait fait des offrandes importantes. Allant jusqu'à se priver de nourriture, elle avait également jeûné. Plusieurs fois !
Mais malgré son acharnement, Pauline
n'avait pas obtenu le moindre exaucement. Dieu semblait être dur d'oreille. La situation matrimoniale de Pauline, le tout puissant paraissait ne pas vouloir la changer. Les années passaient et Pauline était toujours célibataire.
Profondément découragée ce jour là, la jeune femme décida ni plus ni moins que de renier sa foi chrétienne. Prier, c'était fini pour elle. Pour enfin avoir satisfaction, Pauline résolut de se démerder toute seule.
En quête de solution, la jeune femme se décida à prendre le taureau par les cornes. Le soir même, elle alla frapper chez  sa jeune voisine, Coralie. En l'apercevant sur le pas de sa porte, cette dernière ne masqua pas son étonnement.

— Pour une surprise, ça c'est une surprise ! s'exclama celle-ci en dévisageant Pauline. Enfin, tu as daigné venir me rendre visite. Quel bon vent t'amène tantie Pauline ?

Sur le visage de cette dernière, son sourire qui étirait ses lèvres disparut aussitôt. Se sentant tout à coup vieillir de dix ans, elle reprit immédiatement sa jeune voisine :

— Pauline ! Appelle-moi Pauline. Je te l'ai déjà dit mainte fois Coralie. Ne  m'appeler pas tantie. Appelle-moi Pauline.

Une main sur la bouche, la petite Coralie s'excusa sur le champ.

— Pardon tantie...heu Pauline.

S'effaçant derrière la porte, elle se dépêcha de l'invita à entrer.

— Mais ne reste pas planter comme ça, viens voyons !

S'exécutant, Pauline ne se fit pas prier deux fois. Précédent sa jeune voisine à l'intérieur de chez elle, elle laissa son regard errer partout. La maison de Coralie était tellement bien meublée. Comme toutes les  fois où elle y mettait les pieds, Pauline restait émerveillée. Le salon dans lequel Coralie l'invita à s'assoir était si vaste. Rien à voir avec l'étroit studio que louait Pauline ! Non, le trois pièces qu'occupait Coralie était  plus spacieux. Le luxe criard du décor à lui seul faisait mal aux yeux.
En contemplant la pièce, Pauline demeurait de plus en plus intriguée. Elle se posait plusieurs questions. En outre, elle se demandait quel pouvait être l'origine de toute cette opulence.
Pauline le savait, sa jeune voisine ne travaillait pas. Âgée d'à peine vingt ans, la petite Coralie se disait être étudiante. Pourtant Pauline ne l'avait jamais vu étudier. Elle ne l'avait jamais vu aller à l'université non plus. Ses journées, la jeune fille qui avait un physique plutôt avantageux les passaient plutôt à paresser chez elle ou à vagabonder dans la ville. 
Comment donc la petite Coralie réussissait-elle à vivre dans un tel luxe ?
Où trouvait-elle les moyens nécessaires pour mener la grande vie ?
Dans l'esprit de Pauline, le doute germa.
Sérieusement, la jeune femme commença  à demander si toutes les rumeurs n'étaient pas vrai.
Il fallait dire que dans tout l'immeuble, Coralie faisait parler d'elle. Sur son compte,  toutes sortes de ragots circulaient. Dans le quartier, la jeune fille était devenue célèbre pour sa mauvaise réputation. On l'accusait de mener une vie débrider. Il se disait qu'elle multipliait les relations sentimentales. Il paraissait également qu'elle avait  la fâcheuse manie de piquer le mari des autres. Aux hommes, on disait qu'elle avait le pouvoir étrange de faire tourner la tête. Ce pouvoir là, les ragots prétendaient qu'elle le tenait de pratiques mystiques. Ces rumeurs étaient-elles fondés ? Pauline n'en savait rien.  A vrai dire, c'est pour en avoir le cœur net  qu'elle était venue la voir.

— Voisine, lui dit Pauline, c'est vrai que tu as un secret pour attirer les hommes ?

Prise au depourvu, la petite Coralie  fit mine de ne pas comprendre.

— Comment ça ? De quel secret est-ce que tu me parles ?

Sans détour, Pauline s'expliqua :

— Je te parle de tout ce qui se raconte sur toi. Est-ce vrai ? As-tu le pouvoir de séduire les hommes ?

La tête renversée en arrière, Coralie partit d'un fou rire.

— Pauline, répondit-elle enfin. Je ne vois pas de quoi tu parles.

— Pourtant moi je suis convaincue que si, insista Pauline qui n'était pas prête à lâcher l'affaire aussi facilement. J'ai le pressentiment que tu sais très bien à quoi je fais allusion.

Amusée, Coralie continua de feindre l'ignorance.

— Ah bon ? fit-elle énigmatique.

Devenue subitement sérieuse, Coralie lâcha :

— Les rumeurs, il ne faut pas toujours les croire. Quand ils s'ennuient, les gens se plaisent à inventer n'importe quoi.

Soupirant de lassitude, la jeune fille se dépêcha de clôre ce sujet.

— Parlons d'autres choses tu veux ? Dis-moi que me vaut l'honneur de ta visite ?

Pauline ne répondit pas.  Biensur, elle n'avait pas envie de changer de sujet. Mais un moment, elle se contenta de garder le silence. Intérieurement, elle réfléchissait. Elle voulait trouver une solution, un autre moyen pour tirer les vers du nez à Coralie. Pauline souhaitait connaître le fameux secret  de Coralie. Si elle s'était déplacée de chez elle jusqu'à chez sa jeune voisine ce n'était pas pour parler de la pluie et du beau temps. Qu'avaient-elles à se dire d'ailleurs ? Pauline et Coralie étaient trop différentes. En commun, les deux jeunes femmes n'avaient rien. Elles n'étaient pas de la même génération et n'étaient pas des amies. Certes, toutes les deux s'entendaient très bien. Souvent, il leur arrivaient de discuter. Mais les seuls liens qu'elles entretenaient n'étaient que des simples rapports de voisinage. Même si elles avaient pris l'habitude d'échanger quelques conversation, leurs discussion restaient purement superficiels. Pourtant, Pauline s'en rappelait bien, Coralie n'avait pas hésité une fois à lui proposer son aide. Quand elle lui avait fait part de sa quête au mariage, Coralie avait prétendu avoir la solution.

— Je connais quelqu'un de très efficace, lui avait-elle dit. Avec quelques potions, il peut régler ton problème en un clin d'œil. Viens me voir si ça t'interesse.

Pauline n'était jamais venue. Elle n'en avait jamais eu le courage. Elle savait très bien ce qu'insinuait l'offre de sa voisine et ne se sentait pas désespérée au point de tomber dans de tels extrêmes. A présent, Pauline l'était.

— Coralie, lui dit-elle posément, si je suis là c'est pour que tu m'aides.

— Comment ça ? s'enquit tranquillement celle-ci.

Droit dans les yeux,Pauline  fixa Coralie avant de baisser honteusement la tête.

— Je veux que...begaya t-elle soudain mal à l'aise. Je veux que...que... tu m'accompagne chez ton féticheur.

Mari de nuit : un incube dans la villeWhere stories live. Discover now