°• Quand la théorie ne suffit pas •°

Chapitre 4 Tic Tac

Il ne me faut finalement que 30 secondes pour rejoindre les toilettes, j'ai pris ma décision. Je me lave les mains et m'isole dans la cabine, heureusement propre à cette heure. J'ai déjà lu le mode d'emploi 10 fois. Je pourrais le réciter si on me le demander. J'ai pris en passant au distributeur d'eau un gobelet et trempe la languette dans mon urine.

Trois jours de retard.

Qui suivent 15 jours d'angoisse.

Je dois savoir.

Je tapote des  doigts le carrelage gris et surveille ma montre. C'est mon père qui me l'a offerte pour mes 15 ans, il y a presque un an. Un vieux truc genre gousset, rien à voir avec les gadgets que l'on trouve partout maintenant. Je l'adore, mais la trotteuse est lente. Horriblement lente.

Je me lave les mains une autre fois. Cela va devenir un TOC.

Je me sens bête. Très bête. Je suis réputée être intelligente. Et Cameron Myers aussi d'ailleurs. Nous sommes les meilleurs élèves de la classe.

Pourquoi... Vibration du portable. Encore ! C'est Pia j'en suis certaine. Je vérifie et en effet 3 nouveaux messages m'attendent.

Pia : « Mark est aussi rouge que le gyrophare de ton père !! »

Dix secondes plus tard.

Pia : « Que fais-tu ? »

Elle patiente trente secondes

Pia : « Ça va ? »

Non, ça ne va pas.

Mais je ne vais pas le dire à Pia. Je ne lui ai rien avoué et pourtant c'est ma meilleure amie. Rien. Ni sur la clairière. Ni sur notre bêtise. Ni sur ses probables conséquences. La petite voix qui hurle dans ma tête jour et nuit me suffit.

Je regarde ma montre. Plus que deux minutes.

Et moins de dix secondes avant le prochain SMS de Pia. Ça me distrait un peu. Tant mieux.

Pia : « Maddie, JE VEUX QUE TU REPONDES ! »

Un . Deux. Trois. Quatre. Cinq. Six. ....

Pia : « Cameron embrasse Jessie dans le cou »

Maddie : « Quoi ? . »

Pia : « Enfin ! T'es vivante ! Je blague. Zen ! »

Maddie : « Idiote ! »

C'est bien de moi ça ! La traiter d'idiote alors que... je suis celle qui est partie se promener en forêt avec Cameron.

Celle qui s'est laissée dominer par ses hormones.

Bon, j'ai des circonstances atténuantes. Il faisait beau à Dungeness, la clairière à l'automne était splendide, recouverte de minuscules fleurs violettes formant un tapis qui nous invitait à nous asseoir pour discuter. Avec Cam. C'est mon meilleur ami, mais c'est aussi celui dont je suis amoureuse depuis la dernière année de collège, depuis la seconde où mes yeux se sont posés sur sa silhouette svelte.

Cam ... Le garçon à la démarche féline et la crinière fauve désordonnée, le garçon au regard vert qui vous transperce et qui fait palpiter le cœur de toutes les filles du lycée. Il était ce jour-là magnifique et plus encore, et plus adorable que d'ordinaire.

Et il m'avait fait des avances pour la première fois.

Ou alors, était-ce moi qui avait fait le premier pas ?

Je soupire. Est-ce vraiment le moment de repenser à tout cela ?