« J'aurais évité si j'avais pu... Je ne voulais pas t'impliquer. Se justifia-t-il.

- On devrait s'impliquer un peu plus souvent l'un et l'autre. Regarde où on en est, à force d'essayer de ne pas s'attirer d'ennuis.

- Tu as peut-être raison. » Soupira-t-il.

C'était étrange, cette atmosphère. Ils avaient pourtant beaucoup de choses à se dire, mais ni l'un ni l'autre ne semblait vouloir prendre d'initiatives. Trop de questions se posaient encore, il était difficile de décider par où commencer.

« Tu as une mine affreuse. Finit par murmurer Isa, desserrant son étreinte pour pouvoir observer ses traits. Ils ne t'ont pas fait de mal, au moins ? »

Il semblait bien faible, comparé à la dernière fois. Le morceau de tissu qu'on avait utilisé pour l'empêcher de se mordre la langue avait frotté contre les commissures de ses lèvres, y laissant deux traces rouges. De même, la peau de ses poignets était sérieusement abîmée. En dehors de ça, et de sa côte douloureuse, il était intact, mais la fatigue avait marqué son visage.

« Ils ne m'ont rien fait, je suis juste épuisé. La rassura-t-il, calant une mèche de cheveux derrière son oreille.

- Qu'est-ce qu'ils te voulaient ? S'enquit-elle d'un air inquiet.

- Je ne suis pas censé t'en parler, pour le moment tout du moins. Je suis désolé, mais je ne le ferai que lorsque j'en aurai l'autorisation.

- Ne t'excuse pas, ça ne dépend pas de toi... On a le temps, maintenant. Je n'ai pas l'intention de m'enfuir à nouveau. Sourit-elle tristement.

- Pourquoi être partie ? » Demanda-t-il dans un souffle.

La réponse l'effrayait. Il n'avait que des hypothèses floues, mais sentait qu'elles ne pouvaient pas vraiment correspondre à la réalité. Quelque part, il avait peur que ce soit de sa faute. Et lorsqu'Isa le lâcha, reculant d'un pas incertain, son inquiétude n'en fut que plus intense.

La jeune femme s'assit sur une caisse au hasard, lissant sa jupe du plat de la main.

« Le soir où tu es venu, la situation était... Très compliquée. Pour tout dire, il y avait trois autres personnes chez moi qui n'étaient pas censées se trouver là. Murmura-t-elle.

- Trois ? »

Elle hocha doucement la tête, les lèvres pincées, comme pour s'empêcher de parler trop vite. Il fallait qu'elle prenne son temps, qu'elle pèse ses mots pour ne pas partir en roue libre, et surtout pour qu'il comprenne ce qu'elle était sur le point de dire.

« J'ai retrouvé Marie. Finit-elle par lâcher. Enfin, disons plutôt que c'est elle qui est venue me trouver, avec son enfant. Elle était morte de peur, elle était blessée et disait qu'on l'avait suivie.

- Si elle était suivie, pourquoi est-elle venue chez toi ? Demanda-t-il, incompréhensif.

- Elle était terrorisée, mais n'osait pas aller se réfugier au quartier général des brigades spéciales, ils lui faisaient peur. Elle pensait peut-être que je pourrais l'aider, sauf qu'elle était déjà à l'agonie quand elle a franchi ma porte. Je ne sais même pas comment elle a fait pour courir jusque là. J'ai rien pu faire du tout, elle s'est vidée de son sang en quelques minutes à peine...

- Attends une minute. L'interrompit-il. C'était elle, le corps dans ta chambre ? »

Les phalanges de son interlocutrice prirent une teinte cireuse, ses poings se refermant sur le tissu de sa jupe.

« Alors elle est restée pourrir là ? Murmura-t-elle, son timbre d'ordinaire léger voilé de colère et de chagrin mêlés.

- Quand je suis rentré et que je l'ai trouvée, j'ai demandé à ce qu'on l'enterre décemment. Elle a une sépulture convenable, j'ai noté l'emplacement si tu souhaites t'y rendre. Tenta-t-il de la rassurer.

LunaireWhere stories live. Discover now