Une fois seuls, le conducteur se tourna à nouveau vers moi afin de m'étudier longuement. Finalement, il prit ce qui me sembla être un paquet de cigarettes et descendit du véhicule sans un mot.

Bien consciente que ce sera sans doute ma seule chance de m'en tirer, je profitai de cette soudaine tranquillité en cherchant un moyen de scier la corde qui me rongeais les poignets. Après avoir méticuleusement parcouru l'habitacle du véhicule, mes yeux tombèrent sur un petit défaut de la carrosserie. Me traînant comme je le pus dans sa direction, je remarquai petit à petit que ce « défaut » était en fait un impact de balle. Rassurant... Était-ce trop demandé d'espérer ne pas ressembler à une passoire à la fin de ce merveilleux road-trip ?

Visiblement tirée depuis l'extérieur, la balle avait déchiré l'acier formant alors une sorte de fleur aux pétales aiguisés. Je sélectionnai le morceau de carrosserie ayant l'air le plus tranchant et commençai à m'activer en silence. Chaque frottement était une torture et mes poignets se trouvèrent rapidement en sang. Pour sa part, la corde ne fut que partiellement usée tant elle était épaisse.

Lorsque la portière se rouvrit, deux minutes plus tard, j'étais déjà de retour à ma place. Le conducteur monta dans le véhicule avant de refermer la portière et de me rejoindre à l'arrière. J'étais tétanisée par l'idée qu'il découvre ma tentative d'évasion infructueuse. Heureusement pour moi, ce n'était pas ce qui semblait l'intéresser à l'heure actuelle.

- Je ne pense pas trop m'aventurer en prétendant que celui qui t'achètera fera une bonne affaire.

Il sembla me sourire alors qu'il s'approchait pour allumer une petite lumière au-dessus de ma tête.

Pour la première fois, je pus voire son visage. Contrairement à son collègue lui avait des cheveux châtains en désordre et un visage qui faisait sûrement tourner de nombreuses têtes. Entièrement vêtu de noir, son T-shirt mettait en valeur les innombrables tatouages qui lui recouvraient bras et cou.

Je ne peux nier qu'il m'aurait plu s'il n'avait pas été un sombre connard qui enlève des femmes pour le business de la Camorra.

Je remarquai aussi qu'il était un peu moins musclé que le chauve même si je ne doutais pas du fait qu'il pourrait facilement me maîtriser.

- C'est un plaisir de revoir tes beaux yeux mia bella, dit-il en me retirant le bâillon.

J'hésitai fortement entre le fait de lui mordre la main ou de lui cracher à la gueule mais un incident pareil risquerait certainement de ruiner mes chances de fuir... Ou en tout cas celles de fuir en un seul morceau. Il reprit.

- Je m'appelle Giovanni, quel est ton nom ?

- Je n'en ai rien à foutre de comment vous vous appelez et on sait tous les deux que c'est réciproque, dis-je, acerbe. Vous n'avez qu'à m'appeler « table basse » ou « crayon » puisque je vais être vendue de la même manière.

Il me toisa longuement comme pour me laisser le temps de retirer mes paroles. Eh bien il pouvait toujours attendre parce que même si j'avais regretté ce que je venais de dire, ma fierté démesurée m'aurait empêché de faire une telle chose. Il m'envoya alors une gifle monumentale. Ma joue irradiait et je n'eus aucun doute sur le fait que j'allais en garder une trace pendant un petit moment. Pour autant, je ne laisserai pas mes émotions me submerger. Il était hors de question de me montrer faible dans un moment pareil. Quand je redressai la tête, il me sourit presque amicalement et je ne pus m'empêcher de penser qu'il lui manquait une case. Putain, ce type était vraiment un fou furieux !

- Comment tu t'appelles, mia bella ?

Il me souffla à la figure son haleine puant la cigarette ce qui me permit de le reconnaître. C'était donc lui, celui qui avait ruiné toute mes chances de m'enfuir. J'avais désespérément envie de l'étrangler mais, avec les mains liées dans mon dos, il ne me restait plus que mes yeux pour pleurer.

SediciWhere stories live. Discover now