A sa grande surprise, Driss y avait découvert un environnement encore très sauvage bien loin des îles surpeuplées qu'il connaissait depuis son enfance. Ce nouveau paysage, oscillant entre plaines verdoyantes et forêts denses aux essences inconnues, était d'une beauté inégalable aux yeux du jeune Berz. Il était ravi de se lever aux aurores pour s'entraîner ou participer aux tâches d'entretien du camp dès lors qu'il pouvait profiter du lever de soleil sur cette diversité enivrante à ses yeux.

Après son arrivée sur la côte, il avait été conduit au sein du principal camp militaire du continent situé à une trentaine de kilomètres à l'intérieur des terres. De simple poste d'observation sur les rives d'un fleuve à ses débuts, le camp s'était élargie jusqu'à devenir la base principale du général Haruk. Représentant de l'autorité impériale sur ce continent, il y commandait les troupes d'invasion tout en supervisant l'arrivée des civils et en s'assurant d'accorder à chaque clan une part de territoire conséquente.

En tant que novice, Driss avait été placé sous le commandement du lieutenant Zrot. Après quelques jours à s'entraîner sous les ordres de ce Berz au caractère bien trempé, leur unité venait de se voir affecter à une mission de reconnaissance.

L'objectif était de lever le mystère sur cet esprit des eaux dont la simple évocation terrorisait nombre de guerriers sur toute la côte. Le continent sur lequel ils cherchaient à s'installer était initialement habité par une population humanoïde, fragile d'apparence mais capable d'une certaine résistance. La première vague de colons avait accosté sur la zone la plus accueillante avec ses plaines herbeuses parsemées de larges forêts ancestrales. Dès les premiers jours, ils avaient dû affronter les autochtones et les repousser vers l'est, à l'intérieur des terres. L'ardeur et la férocité des Berzs avaient facilement eu raison de ces indigènes lors des premières batailles leur permettant de gagner du terrain sur une large bande de terre et privant les autochtones de tout accès à la mer.

Puis, les combats s'étaient faits plus rudes et l'ennemi mieux équipé et organisé qu'ils ne l'avaient cru au départ. Une fois passé l'effet de surprise, leur avancée avait brutalement été stoppée lors de plusieurs batailles intenses là où les montagnes septentrionales se prolongeaient au sud en un haut massif escarpé. Depuis une vingtaine d'années maintenant, l'empire Berz ne parvenait plus à s'étendre vers l'ouest, bloqué par l'importante force armée ennemie patrouillant sans relâche. Seuls quelques raids éclairs parvenaient à briser le blocus avant d'être repoussés par cette armée extrêmement mobile. Même un bataillon Berz au pas de course ne pouvait rivaliser avec les créatures quadrupèdes à l'encolure haute que les autochtones avaient su dompter.

Vers le nord, un massif montagneux aux neiges éternelles partait de la côte à l'ouest avant de s'étendre vers l'est indéfiniment formant une barrière non négligeable. Enfin, au-delà s'étendait le désert septentrional que Driss et ses compagnons foulaient actuellement.

La volonté du général Haruk était de s'installer aussi dans les territoires désertiques du nord avant d'essayer de trouver un passage à travers les montagnes plus loin à l'est de manière à prendre à revers les troupes indigènes et ainsi relancer la conquête. Pourtant rien ne s'était passé comme prévu. Depuis le début de cette initiative, aucun camp n'avait pu être établi durablement dans le désert. Les premiers temps, on évoqua l'impétuosité de la mer et ces tempêtes imprévisibles peut-être dues aux courants d'air chauds en provenance du désert. Puis, on retrouva des survivants qui commencèrent à forger la légende d'un esprit féminin vengeur. Elle attendait les bateaux avant qu'ils n'accostent sur la plage, silhouette éthérée flottant sur l'eau, prête à déchainer la puissance des océans, engloutissant équipages et embarcations dans l'oubli des bas-fonds. Toutes les tentatives furent vouées à l'échec quel que soit le lieu où ils avaient cherché à accoster. A chaque fois, la mer réclamait son dû, nettoyant toute trace de leur passage. Jamais aucun camp n'avait subsisté plus de trois jours. Parfois certaines tentatives étaient même avortées en pleine mer, les bateaux étant submergés par une vague titanesque qui les emportait vers le fond.

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