Chapitre 21

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Lyon, 27 octobre 2018.

18ans.

- Ezra -

Rosalie claque la porte en partant se cacher dans la chambre, encore une fois. Je soupire longuement, exaspéré et fatigué, en m'allumant une cigarette sur le balcon. Je ne sais même plus comment cette dispute a commencée. Les premiers jours, même si on ressentait le manque de Raph', on restait super enthousiastes à l'idée de se retrouver en tête à tête, vivre un peu comme un vrai couple, un couple ''normal'' je dirais même. Mais depuis trois jours, ça n'a plus rien d'excitant ou d'enthousiasmant. Sans lui pour faire le tampon, nous rappeler à l'ordre ou nous pointer du doigt le ridicule de la situation, Rosa et moi nous entre-tuons et, honnêtement, j'exagère à peine. Les remarques acerbes, les mots blessants, les regards noirs et foudroyants... je passe la majorité du temps dehors avec des potes du boulot. Je pense que le fait d'agir comme un vrai couple sans réellement pouvoir le faire, ça joue sur nos nerfs. On ne peut pas se comporter comme ça en dehors de l'appartement, donc nous restons presque toujours cloîtrés à l'intérieur à vivre uniquement l'un sur l'autre. Je maudis Raphaël de vouloir finalement rentrer plus tard que prévu. Trois jours qu'il devrait être revenu, trois putains de jours que je prends sur moi pour éviter d'agir en sale con comme je sais si bien le faire avec le reste du monde.

J'entends Rosalie pleurer en revenant dans le salon et très sincèrement j'en suis arrivé à un tel haut point de colère que je n'en ai rien à cirer. Je prends mes clés, j'attrape mon cuir et je me tire. J'appelle Jenny, elle décroche en moins de deux secondes et accepte que je passe la voir, alors je fonce, soulagé. Une fois dans ma voiture, je n'hésite pas une seule seconde pour me tirer plutôt que d'être moins vache et moins fier. Plutôt que d'aller voir si ma nana va quand même bien. Plutôt que d'aller la prendre dans mes bras et la rassurer, lui dire que ça ira et que j'en reste dingue. Mais même ça je ne sais pas lui dire, que j'en suis vraiment fou amoureux. Et puis la vérité c'est que je ne sais même pas si ça ira. Je ne sais pas non plus si j'ai envie de continuer ça, cette espèce de relation complètement délirante, à partager la femme que j'aime avec mon pote d'enfance. Ouais, la plupart du temps je suis heureux et j'ai du mal à m'imaginer un matin où je ne me réveillerais pas dans le même lit qu'eux, ou un soir où ils manqueraient à l'appel au moment d'aller se coucher. Je dois bien admettre que je ne dors que d'un œil depuis le départ de Raph' parce que malgré moi, malgré mon orgueil qui souhaiterait que je sois le seul à rendre Rosa heureuse, il fait partie intégrante de ce que nous sommes tous les deux. En la choisissant elle comme partenaire, j'ai accepté qu'il fasse partie de notre vie de couple. Je ne regrette pas en règle générale. Y a d'autres fois où je me trouve sacrément con d'avoir laissé passer une chose pareille.

Une fois arrivé devant la maison de Jen', elle m'ouvre immédiatement la porte. Je lui montre sa balancelle d'un geste du menton et m'allume une autre cigarette.

— Encore une dispute avec ta super-brune ? se moque-t-elle gentiment.

— Ouais.

— Pourquoi cette fois ?

— M'en rappelle pas.

Elle rit franchement et même si je n'apprécie pas vraiment qu'elle s'amuse de ma colère, ça m'allège un peu le cœur. J'en lâche moi-même un rire bref et exaspéré.

— Vivement que Raph' revienne, mh ?

— Ouais, lâche-je dans un souffle empressé. Carrément !

— Pourtant quand je vous ai vu à la patinoire il y a quatre jours, ça avait l'air d'aller. Et même plutôt bien, si tu vois ce que je veux dire, me taquine-t-elle avec un petit coup de coude complice.

Jamais deux sans toi - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant