Chapitre 20

Depuis le début
                                    

J'essaie juste de voir ce dont j'ai besoin. Je me sens con. Après les tonnes de conversations avec Rosa à lui répéter qu'un truc à plusieurs me semblait plus sain qu'un truc à deux, et me dire maintenant que je n'assumerais pas du tout un truc comme ça... j'en sais rien. Y avait rien de sérieux quand on formait ce groupe de couples. Maintenant que ça tend vers une vraie relation, ça me paraît différent, ça m'angoisse. Je ne veux pas m'engager dans quoi que ce soit.

Je n'ai pas su quoi lui répondre. Nous sommes restés quelques minutes dans cette position, tous les deux allongés, les petits doigts noués et la tête sur un seul et même oreiller. Je sais que la situation se montre compliquée. Même en n'ayant jamais eu peur de l'engagement, je me sens terrifié en pensant à tout ce que ça signifie, tout ce que ça pourrait engendrer, à la réaction de nos parents, surtout des miens...

Tu vas aller la voir ?

J'ai le choix ?

Oui, mais si tu ne le fais pas, je pense qu'elle sera extrêmement peinée.

Très bien... alors on y va.

Toi tout seul, je rentre moi.

... Parfait, soupire-t-il agacé. Envoie-moi l'adresse de votre hôtel. Je dors avec vous ce soir.

Si tu veux prendre la voiture, il faut que tu me ramènes.

T'es chiant.

Depuis cette soirée-là, nous n'avons pas eu un seul message de sa part si ce n'est pour nous demander si nous étions bien rentrés. Il est revenu en pleine nuit et nous a rejoint dans le lit sans un mot. Nous ne sommes pas ensemble, pas vraiment. Nous avons à peine discuté de ce qu'il voulait, il préfère fuir la conversation que d'admettre qu'il se lance avec nous, à chaque fois. Il insiste sur la partie « je fais ce que je veux, je n'ai de compte à rendre à personne » mais quand il passe son temps avec nous, il ne va jamais voir ailleurs comme il en avait l'habitude lorsque que nous n'habitions que tous les deux. Depuis son retour, il n'a pas découché une seule fois pour s'amuser avec d'autres filles. Parfois pourtant, il déserte l'appartement, prétextant aller courir... mais nous savons très bien qu'il nous laisse nos moments d'intimité comme je leur laisse les leurs.

— Je suis rentrée ! annonce Rosa en passant la porte.

— T'étais pas censée être en courses toi ? lance Zaz'.

— Si, j'y étais.

— Et tu n'as encore rien pris ?

— Je n'ai pas trouvé ce que je cherchais, se renfrogne-t-elle en lui tirant la langue.

— Tu cherchais quoi ?

— Des trucs de fille ! ment-elle pour lui clouer le bec.

J'éclate de rire face à son ton agacé tandis qu'Ezra m'adresse un clin d'œil accompagné de son éternel sourire en coin, celui qui est tout fier de ses bêtises. Si nous nous laissons nos moments libres avec elle de temps en temps, parfois c'est Rosalie qui prétend aller faire des courses et elle revient presque systématiquement les mains vides, seulement pour nous laisser l'opportunité de nous retrouver comme avant, dans notre bulle d'amitié. Nous le savons très bien tous les deux mais elle ressemble un peu à notre musicien pour ça, elle refuse de l'admettre.

Depuis que j'ai repris les cours, je me sens épanouis. Ezra travaille à la bibliothèque universitaire puisqu'il a arrêté ses études mais qu'il souhaite quand même passer du temps avec nous. Rosalie commence sa deuxième année de Lettres Modernes et moi d'Éco-Droit. Tous les midis nous nous rejoignons au restaurant universitaire avec Jenny, Iris et Denis. Parfois Alyssa nous fait l'honneur de se joindre à nous, mais je crois qu'elle préfère éviter le plus possible Rosalie. Nos amis se questionnent beaucoup sur la nature de notre relation. Est-ce que Rosa fréquente Ezra ? Est-ce qu'elle est avec moi ? Nous finissons toujours par répondre que nous sommes seulement un trio très proche. Ils peuvent faire de multiples interprétations avec ce genre de réponses, nous en sommes conscients. Heureusement pour nous, eux se fixent sur une belle et forte amitié.

Jamais deux sans toi - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant