Chapitre 15 - Nolan

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Je n'ai même pas le temps de dire que c'est une erreur, que le message a été envoyé sans faire exprès, j'ai déjà une réponse :

– Chez toi ou chez moi ?

Attendait-il que je lui parle ? N'était-il pas occupé, à cette heure là il est encore dans son bureau normalement.

– Nolan, ça va ?

– Je fais des pancakes, je ne bouge pas de chez moi.

Je ne prête pas attention à la nouvelle vibration et fonce sur mes placards pour faire ce que je viens d'annoncer. Je trouve une recette de crêpes au lieu des petits ronds aérés et épais que je cherche, mais ma foi... ça ira, surtout que je suis certain qu'il va débarquer d'un instant à l'autre.

Il doit y avoir du monde dans les rues car ma pile est bien avancée lorsqu'il toque à ma porte. Je le laisse entrer, le regard vide, et retourne surveiller ma poêle. Que dois-je faire, ou lui dire ? Je ne sais pas. Lui se colle à moi, sans rien tenter de spécial, alors j'appuie ma tête contre son épaule - c'est une idée ou il a un autre parfum que le sien sur sa peau ? Je me roule une crêpe plutôt que de réfléchir, profite de l'odeur vanillée et de la douceur sucrée.

– Vas-y sers toi, je vais pas tout manger seul.

Je lui fais un clin d'oeil qui se veut amusé. Vu le tas de crêpes, c'est certain que je ne peux tout manger. Grégory s'en plie une et la goûte presque du bout des lèvres. Après la première bouchée, il la dévore un peu plus franchement.

– Délicieux, tu as vraiment une bonne recette !

– C'est une recette de pâtissier c'est pour ça. Mais celui qui me l'a donné n'a jamais voulu me dire son ingrédient secret, elles étaient encore plus délectables.

– C'est pourtant un régal là, elles peuvent se manger sans rien.

Le silence revient, seulement interrompu par le bruit de la cuisson. Je sens qu'une question lui brûle les lèvres, mais il reste juste accroché à moi.

– Ah au fait j'ai terminé et imprimé le dossier qu'on devait faire, je peux te le donner maintenant.

– Pourquoi es-tu si froid Nolan ?

Je me tourne vers lui.

– Parce que si j'étais chaud tu serais déjà dans mon lit.

Son entrejambe pulse immédiatement. Voilà le vrai pouvoir qui existe, plus puissant que l'argent, mais aussi que l'amour. Car on peut désirer sans amour, et ce qui tient deux amants liés, c'est bien plus souvent le sexe que les sentiments. Et j'ai ce pouvoir sur lui. Il me désire ; peut-être m'aime t-il, mais c'est surtout l'envie qui pointe en cet instant. Mais lui aussi a un pouvoir sur moi : celui de me faire sentir moins seul, de calmer mes peurs, et tantôt d'accélérer ou d'apaiser mon cœur. Car tout solitaire qu'on soit, l'on a toujours besoin de chaleur humaine...

Peut-être était-ce le but de Gabriel, éloigner les gens de moi jusqu'à ce que, me sentant trop seul, j'accepte de coucher avec lui. Hélas pour ce petit con manipulateur, ses mensonges n'ont pas dû fonctionner.

J'éteins la plaque et mets la poêle dans l'évier, puis pousse Grégory jusque dans mon lit. Là je m'allonge à moitié sur lui et ferme les yeux. Tout le reste peut attendre désormais, je dois d'abord me recharger.

Le lendemain au réveil, je décide de récompenser sa venue. Qu'il se soit accroché malgré mon manque de gentillesse hier soir - causé par des émotions totalement contradictoires - est bien la preuve de son intérêt, non ? De sa bienveillance également ; qui laisse tomber toute occupation pour venir réconforter un mec ? Et c'est sans parler du stage où il m'a placé. Je baisse donc son boxer alors qu'il dort encore, probablement dans un rêve érotique au vu de l'érection présente. Et bien, je vais lui donner de quoi avoir des rêves érotiques au moins pour les jours à venir ! Je laisse mes lèvres courir sur son torse avant d'arriver entre ses cuisses.

– Nolan, te force pas si tu as pas envie, j'ai pas envie de me refaire envoyer balader.

– Mais j'ai envie là, et je peux pas te laisser encore dans cet état. On verra plus tard pour être sage.

Je lui fais un clin d'oeil et retourne à mon jeu...

***

Je sors de l'amphithéâtre pour la dernière heure d'examen. Le dernier de ma scolarité. Désormais, je vais être à temps plein à l'hôpital, et c'est la note de mon tuteur qui déterminera l'obtention de mon diplôme. Dans six mois je termine peut-être mes études. En attendant, l'air frais pénètre mes poumons et je frissonne, me demande si je rentre de suite chez moi ou passe par le parc pour profiter des flocons qui tombent du ciel - la météorologie est tout aussi fascinante que le médecine à mon sens. Le vent se met à tourner autour de moi, fait valser les petits points blancs ; mon téléphone vibre, sans doute une invitation à venir le rejoindre, nous passons tous nos moments hors de l'hôpital ensemble, chez lui ou chez moi.

Comment nous définir ? Incontestablement, amants. Sans être parfaits, nous comblons nos attentes. Puis de toute façon, personne n'est parfait. Je ne compte pas le nombre de fois où je le laisse frustré, simplement parce que ce que je veux, c'est juste une présence apaisante. Je lui ai bien dit de voir d'autres que moi, puisque je suis plus souvent un ami à câlin qu'un amant sexuel, mais il ne doit pas souvent s'amuser. Pour ma part, j'ai abandonné toutes ces applications sur lesquelles j'ai pu bien m'amuser par le passé. Finalement, mon dernier plan a eu raison, voir un "psy" m'a fait du bien. Juste j'ai une relation un peu plus poussée qu'un médecin et son patient. J'ai besoin de lui. Je ne sais pas si je peux dire que je l'aime, mes humeurs changeant régulièrement, mais il est devenu indispensable. Enfin les blessures cicatrisent, doucement mais sûrement ; en plus de ce qu'il a deviné, il a appris à me connaître, et il s'est aussi dévoilé. Comme deux amis intimes. Oui, amis-amants, c'est ainsi que je peux le définir. Et très important, indispensable même, capital. Il remplace tout ce que je n'ai pas eu, tout ce dont j'ai pu avoir ou ai besoin...

Mes pas me conduisent au sommet du petit promontoire, et, chose amusante, Grégory m'y attend. Avait-il lui aussi l'envie de se retrouver dans le silence de la nuit, coupé de la ville avec la chute tranquille des petits cristaux blancs voletant autour du belvédère ? C'est en tout cas une rencontre romantique, avec une vue splendide sur la forêt endormie, le temps comme ralenti au rythme des doux flocons. D'ailleurs, c'est presque en murmurant qu'il se met à parler, comme s'il ne voulait pas perturber la tranquillité des lieux :

– Alors, quelles notes vas-tu avoir à ces examens ?

– Oh, j'ai l'impression que j'ai un peu raté, ça ne va pas être si glorieux.

– Il me semble que c'est ce que tu as dit pour tes examens passés, ou alors j'ai mal compris ce que tu m'as raconté.

– C'est pas pareil, là c'était plus dur, c'est la dernière année, après on va vraiment être médecins.

– Quelle différence avec maintenant ? Je suis sûr que tu as réussi, tu connais tout.

– On verra. Bon, on rentre ?

Je lui tends la main qu'il saisit sans hésiter, et nous partons doucement pour passer encore une délicieuse soirée.

*** Un chapitre écrit par @Valentinpitiga ***

Gay Anatomy (B&B)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant