Chapitre 1 - Nolan

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Après toutes ces années, c'est enfin la consécration; à chaque fois les stages ont été peu intéressants ou pas en rapport avec ce que je veux faire. Mais ça y est : pour ma dernière année d'internat, je suis choisi par le docteur Hampton pour intégrer le département d'épidémiologie de l'hôpital St Andrews ! Mes parents mis au courant - pour ce que ça les intéresse - j'ai attendu avec impatience la fin du passage en psychologie - formation certes obligatoire mais n'ayant aucun rapport avec mon projet médical final.

Je rejoins donc les cours ce matin, avec dans mon sac toutes les notes et commentaires que j'ai eus au fil des cinq années, avec la fac ou pendant l'internat. Malgré la complexité de la tâche dans le dernier département médical, mon référent a été très satisfait : sans être le meilleur je suis un bon futur médecin, mais je suis surtout empathique avec les patients - j'ai même calmé un malade qui était atteint d'une schizophrénie sévère, même si je ne sais pas comment j'ai réussi.

Toujours est-il que j'attends ce soir avec impatience, car je sais que le Dr Cunnings est un ami du Dr Hampton, et je suis certain que mon acceptation n'est pas due à un simple coup de chance. Surtout que, d'après ce qu'on dit, le Dr Hampton préfère travailler seul ou seulement avec son assistant, choisi il y a cinq ans dans la promotion de la faculté, alors qu'il venait lui-même de terminer il y a peu ses études.

Comment un si jeune médecin peut-il être le chef de service d'un des plus importants département d'un CHU, dans l'un des hôpitaux les plus réputés de la côte Est me direz-vous ? Son travail remarquable sur les virus phagocytaires ont largement contribué, surtout quand on pense aux possibilités qui peuvent découler en associant le pôle universitaire le plus poussé dans les maladies virales ainsi que les MST, à un esprit incroyablement brillant. J'en sais quelque chose, il est mon modèle depuis que j'ai assisté à l'une de ses conférences - et à toutes celles qu'il a pu faire depuis - surtout que je me suis intéressé très tôt aux MST : avoir des parents dont la mère meurt de syphilis après avoir passé vingt ans à élever son enfant dans la misère de l'addiction au sexe et à la drogue, ça donne envie de trouver un moyen de guérison, quand on en est au stade terminal. Traité assez tôt, oui les antibiotiques suffisent, mais au delà d'un certain temps, cette merde est incurable, comme bon nombre de saloperies. Dieu merci, ma génitrice l'a attrapé vers mes dix ans, quand j'étais apte à me débrouiller seul. Et depuis mes dix-huit ans, je me suis émancipé après l'obtention d'une bourse, un job dans un magasin de vêtements, et mon déménagement dans un minuscule appartement, cependant idéalement situé à moins de dix minutes des différents endroits qui requièrent ma présence.

J'ai bien entendu comme quoi le Dr Hampton était un homme de bon goût, toujours bien habillé. Je l'ai évidemment constaté lors de ses différentes présentations, et je me demande si je n'ai pas déjà vu passer une commande de costume à son nom au travail. Et maintenant j'ai hâte de découvrir comment il est dans un cadre plus "fermé". Volontairement, je suis resté très naturel, jean délavé un peu moulant, contrastant avec un pull large crème, les cheveux tout aussi naturellement coiffés. Mes amis savent que lorsque je fais des efforts dans ce style là c'est presque pour plus impressionner qu'en costard, je me suis fait charrier comme quoi je comptais draguer. Mais pas du tout! Même si je suis gay, c'est avant tout la réussite de l'homme qui fait que j'en suis fan, pas son physique - certes avantageux. Mais pour ma part, je me défends plutôt pas mal, un beau petit minet châtain clair, bien taillé et au cul rond, c'est pas si mal! Parfois mes amis me comparent à Tom Holland avec une puberté un peu plus développée... Je ne vois pas où je lui ressemble, nous sommes très différents ! Premièrement je ne suis pas connu. Deuxièmement j'ai des lunettes - ce qui me vaut parfois d'être comparé à Andy Taylor, surtout par mes conquêtes...

Toujours est-il que plus les heures passent, moins je tiens en place. Plutôt que d'occuper ma pause repas à manger avec mes amis, ou à étudier, je file au travail passer les quelques heures qui me séparent de ma rencontre. M'occuper des rayonnages et des quelques personnes qui veulent bien s'habiller empêche que je devienne une bombe en passe d'exploser. Et ces quelques heures de travail vont m'apporter quelques dollars supplémentaires pour acheter quelques capotes... soyons prudents on ne sait jamais ce qui peut arriver !

Je passe d'ailleurs faire cet achat express avant d'aller à mon entretien, remarque l'homme derrière moi qui regarde le paquet d'ultrasensitive et le gel infinity entre mes mains avec un petit sourire, mais je n'ai pas le temps de le détailler plus que cela. Balancé dans mon sac en vrac, je cours pour rejoindre l'hôpital, utilise les raccourcis et les escaliers plus que les ascenseurs, plus long pour seulement un étage, alors que je dois aller dans l'aile la plus éloignée du bâtiment.

Je salue mes quelques collègues, internes, infirmiers, que je croise le long des couloirs, avant de découvrir cette partie de l'hôpital qui ne m'est pas encore familière. En même temps, à part en cas de besoin, sinon personne ne s'amuse à visiter les différents pôles d'un tel lieu...

Alors que j'avance entre les numéros des portes de chambres, laboratoires, et autres pièces, que je cherche celui du bureau de mon cher Dr, que j'arrive presque au bout du couloir transversal, j'entends :

– Un sacré p'tit cul, bien que ce soit pas ça qui m'attire, mais toi, il va te plaire.

Deux infirmiers viennent de la droite et passent sans faire attention à moi, mais à gauche il y a également le Dr Hampton et le Dr Cunnings. Qui donc a parlé de fessiers ? Je parie sur les infirmiers, l'un des deux est super canon...

Un coup de stress me vient soudainement et je rougis, intimidé. C'est vrai que c'est le seul à rencontrer individuellement ses internes avant le début du stage, en plus d'être mon modèle je le rencontre en privé... Il salue le Dr Cunnings et m'invite à entrer dans son bureau, qui, malgré qu'il soit meublé avec les fournitures hospitalières, a une touche personnelle plus universitaire, avec ses étagères de livres et ses piles de paperasses - administratives ou non. Il m'invite à m'asseoir et engage la conversation, je suis à la limite de m'en coller une, j'ai l'impression de minauder. Et en plus de ça, en cherchant dans mon sac les bulletins et rapports de stages, je renverse mon bazar, il voit mes récents achats; je range précipitamment capotes et gel et lui tends la main tremblotante la liasse de feuilles. Je reprends contenance face à ses yeux sévères, je ne sais pas s'il me juge, s'il approuve ou est réprobateur de ma tenue. Exactement comme pendant ses conventions : ses mots sont autant d'énigmes qu'il faut suivre pour comprendre sa pensée, pas son regard, qui lui, semble sonder au plus profond des gens. Mais il ne me met pas mal à l'aise pour autant, au contraire je reprends confiance, nous parlons de quelque chose qui me tient à cœur : pourquoi j'ai choisi d'être médecin, mais surtout pourquoi spécialisé dans l'épidémiologie.

– J'espère que tu te rends bien compte de la chance que tu as, et que c'est surtout le parcours que tu as eu avec tes différents stages qui t'ont fait intégrer mon équipe.

– Oui bien sur Dr Hampton, je...

– Tu peux m'appeler Grégory quand nous sommes en privé, Dr Hampton c'est face aux patients. Mais la psychologie va te servir au même titre que l'acceptation de la mort que tu as pu avoir en gériatrie, ou les urgences; nous sommes en épidémiologie, et c'est une branche de la médecine qui concerne toutes les pathologies.

– Oui je le sais Mr...Grégory.

– Tu sais quelle est notre spécialité à St Andrews j'imagine ? Et tu te doutes aussi que parfois tu passeras des journées dans le labo à analyser des échantillons demandés par d'autres services ? Seuls les patients avec une pathologie très... complexe... viennent directement ici.

– Oui, j'ai vu qu'il y avait plus de bureaux et de laboratoires que de chambres dans cette aile de l'hôpital. Mais c'est très bien.

– De toute façon ce n'est qu'un stage, tu peux encore te décider à être médecin urgentiste, ou généraliste, ou te spécialiser ! Tu m'as l'air très empathique et d'aimer le contact avec les gens.

Je trouve fou l'analyse qu'il vient de faire de moi, nous ne nous "connaissons" que depuis une demi-heure, et il a déjà compris ma psychologie, mes doutes et mes faiblesses.

– Mais ne t'en fais pas pour le contact humain, tu ne resteras pas seul dans un laboratoire Nolan. Des questions sinon ?

– Non tout est très clair Dr Hamp...Grégory.

– Bien, alors je te dis à demain, treize heures, après tes cours. Tu feras avec moi la visite de nos quelques patients.

J'acquiesce en silence, me lève, saisi la main qu'il me tend. Sa poigne chaude et ferme, en supplément de cette demi-heure d'analyse personnelle passée avec lui fini de me faire perdre pied, je rentre chez moi avec une seule certitude : ce stage sera plus qu'intéressant, mais autant pour mon référent que le sujet traité.

*** Un chapitre écrit par @Valentinpitiga ***

Gay Anatomy (B&B)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant