Reiner Braun, quatorze ans, passait le plus clair de son temps avec Bertholdt Hoover. Liesel croyait également se souvenir qu'ils venaient du même village. Leur amitié était relativement étrange, vue de loin, ils n'avaient strictement rien à voir l'un avec l'autre. Le premier s'entendait bien avec tout le monde, parlait fort et souriait beaucoup, tandis qu'elle n'avait jamais entendu la voix du second ou presque. Mais bon, les opposés s'attirent, selon ce vieux dicton stupide que lui sortait sa mère quand Liesel lui avait demandé pourquoi elle avait épousé son père. Elle n'y avait jamais cru, mais en voyant l'amitié qui unissait ses deux camarades, elle se disait que ce n'était peut-être pas si absurde que ça.

Elle ne connaissait rien d'autre de ce garçon, à part qu'il s'était récemment fait botter le cul par Annie Leonhart à l'entraînement. Une sacrée scène, qui était restée ancrée dans l'esprit de la plupart de leurs camarades comme un avertissement : il valait mieux éviter de s'approcher de cette fille. Eren était le seul qui ne semblait pas avoir compris la leçon... Mais bon, aux yeux de Liesel, le petit brun était juste un agité complètement nerveux, qui passait son temps à s'énerver et à brailler dans tous les coins qu'il allait exterminer tous les titans. Enfin bref, rien de bien étonnant à ce qu'il soit inconscient au point de côtoyer Annie. Mais revenons-en à Reiner, qui attendait patiemment que sa camarade ait fini de cogiter, un sourcil haussé en signe d'interrogation.

« Je pourrais te poser la même question. » finit-elle par répliquer, haussant les épaules dans un geste indifférent. 

En temps normal, elle aurait souri d'un air amical et aurait tout simplement expliqué. Mais là, elle n'était pas d'humeur, et elle n'avait pas envie de se casser la tête à avoir l'air sympathique. Ce genre de coups de mou était rare chez elle, mais quand ça arrivait, en général, elle était capable de devenir extrêmement sèche et désagréable.

« Pigé, je me tais. Tu permets que je m'assoie deux secondes ? 

- Comme tu veux, mais si t'es sorti prendre l'air, je suis pas sûre que ce soit l'idée du siècle, je dois puer sévère... 

- Je dors dans un dortoir de mecs, c'est pas comme si j'avais pas l'habitude. dit-il simplement avant de se laisser tomber près d'elle. 

- J'empeste pas autant qu'une trentaine de mecs en pleine puberté, rassure-moi ? répliqua-t-elle en levant un sourcil amusé, tournant la tête vers lui. 

- Non, juste comme quelqu'un qui vient de s'acharner sur un sac de frappe pendant ... Deux heures, je dirais ?

- Comment t'as su ? demanda-t-elle d'un air soupçonneux.

- Tes phalanges.»

Il désigna ses mains d'un petit signe de tête. Liesel les ramena instinctivement contre elle, observant ses phalanges abîmées d'un oeil circonspect. Malgré les bandages dont elle les avait entourées, elles s'étaient ouvertes à nouveau.

«Effectivement, ça casse pas trois pattes à un canard...» murmura-t-elle en laissant retomber ses mains sur ses genoux. 

Elle commençait sincèrement à se décourager. Tous ses efforts pour s'améliorer ne menaient pas à grand chose. Elle n'avait sans doute pas la bonne méthode. Ou alors, elle était juste physiquement incapable de faire mieux. Cette option n'était pas à exclure, elle le savait parfaitement.

« Pourquoi tu t'acharnes autant ? Le corps à corps n'est même pas pris en compte dans l'évaluation.

- J'en sais rien... Peut-être parce que c'est le seul truc que je peux faire de nuit sans risquer de me faire griller par tête d'oeuf.

- Je crois qu'il t'a déjà grillée, tu sais ? dit-il avec un sourire amusé.

- Ça m'étonnerait, ou il m'aurait déjà passé un savon pour non-respect du couvre-feu. le contredit-elle.

LunaireWhere stories live. Discover now