Problématiques numériques à l'adolescence

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L'adolescence est un passage compliqué, parfois même difficile à passer. Le numérique qui accompagne désormais les jeunes dans leur construction se retrouve forcément impliqué. Cependant face à un ado en difficultés, il faut toujours se demander si ce dernier est une cause ou une conséquence, et s'il fait partie du problème ou de la solution. Solution que l'adolescent bricole pour tenir le coup et passer le cap.

Ordalie et prise de risque

L'adolescence est souvent décrite comme une période initiatique jalonnée de rites de passage à l'âge adulte. Les prises de risques prennent alors une dimension rituelle où l'adolescent teste sa force et son courage ou remet sa vie entre les mains du hasard. Nombre de comportements en ligne et hors ligne des adolescents illustrent ce point. Ainsi les contenus qu'ils postent peuvent remplir cette fonction. Rouler sur une roue sans casque au milieu de la voie publique est un comportement fréquent qui illustre parfaitement ce point. Ces pratiques datent d'avant les smartphones. Cependant, au-delà de l'acte lui-même, le fait de diffuser les images à plus ou moins grande échelle vient témoigner de cette bravoure ou de cette inconscience. La différence tient du fait que l'adolescent ne met pas directement son corps en danger, mais son image et sa réputation. Numérique ou réelle, l'ordalie intervient quand l'adolescent n'a d'autres moyens de trouver « un regard significatif sur soi » et que personne n'est en mesure d'aider l'adolescent à mettre des mots sur la mise en image de son comportement (Lachance, 2015).

Retrait et isolement

Les hikikomoris sont apparus au Japon dans les années 80. Il s'agit de personnes qui vivent recluses, limitant leurs interactions humaines au stricte minimum et uniquement avec leur entourage proche, le reste de leur interactions sociales se déroulant par écrans interposés. Il n'y a pas de mot équivalent en français. Les notions les plus proches seraient les phobies sociales ou le décrochage scolaire. Le phénomène de retrait social ne doit pas être confondu avec un état dépressif. De même l'isolement ne s'accompagne pas forcément d'anxiété. Il s'agirait plutôt d'une mise en retrait volontaire, le temps que l'adolescence se passe. Certains adolescents qui s'isolent avec leurs outils numériques partagent des points communs avec les hikikomoris. Ils conservent une curiosité, une vie sociale et des centres d'intérêts, mais les expriment en ligne (Vellut, 2015b, 2015a, 2017).

L'isolement chez un adolescent peut être le signe que quelque chose ne va pas. En revanche, qu'un ado préfère rester seul n'est pas une raison de s'inquiéter. Il faut alors considérer la vie de l'adolescent dans sa globalité : ses résultats scolaires, ses relations sociales, les activités qu'il pratique, l'ambiance dans la famille (les adolescents sont très sensibles aux problèmes des parents et ne le verbalisent pas toujours). Surtout, ne pas oublier qu'un adolescent peut passer beaucoup de temps connecté et être parfaitement épanoui. En tant que parent, il faut juste s'assurer que ce temps passé ne vient pas empiéter sur le reste.

Usages excessifs

Le mot addiction est entré dans le langage courant. Il est fréquent d'entendre qu'untel est "accro", ou entendre untel dire qu'il est "addict" à quelque chose. Dans le registre des addictions du quotidien le numérique est en bonne position. Cependant les choses sont un peu plus compliquées que cela lorsqu'on aborde l'addiction dans son volet médical. Aussi, il est préférable de parler d'usage excessif.

L'addiction a à voir avec le plaisir. C'est lorsque quelqu'un passe de la recherche de plaisir à l'évitement du déplaisir. Jusqu'à 'il y a peu seuls les jeux d'argents (ou gambling) étaient reconnus comme addiction comportementale ou addiction sans produit. Récemment l'Organisation Mondial de la Santé a souhaité reconnaître un trouble du jeu vidéo (gaming disorder) dans la section concernant les troubles provoqués par la consommation de substances et ceux liés à des comportements addictifs. Or avec les jeux vidéo, il n'y a ni manque ni rechute (Griffiths, 2012) c'est la raison principale pour laquelle la notion d'addiction est contestée.

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