Chapitre 10 - Partie II

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Shane


Je perds le contrôle des battements de mon cœur quand Roxane gravit les marches de la bouche de métro, pressée de regagner la lumière du jour.

Du calme, Shane. Après tout, ce n'est pas la première fois que tu te retrouves dans ce quartier là.

Après quelques pas dehors et deux carrefours traversés, je ralentis l'allure face au panneau de Madison Avenue. Nerveux, je baisse la tête ; y a-t-il pire endroit que Upper East Side pour quelqu'un comme moi ? La prison, peut-être. Roxane se retourne vers moi et incline son visage. Voyant que j'hésite à faire un pas de plus, elle fait marche arrière et attrape mon bras qu'elle serre alors contre elle.

— Si ça peut te rassurer, avec moi, à Manhattan, tu ne risques pas grand-chose.

Je me recule, elle m'adresse un clin d'œil. Si je m'étais attendu à entendre mes propres mots sortir de sa bouche... Espiègle, elle laisse échapper un petit rire, puis entraîne mon bras avec elle. Je ne l'ai jamais vue comme ça. Sa peine et son désespoir semblent s'être évaporés sous la chaleur de son sourire et de ses pommettes roses.

Au bout de quelques mètres, Roxane libère enfin son emprise. C'est là. J'y suis presque. Les yeux braqués vers les nuages, au pied d'un des plus hauts gratte-ciel du secteur. Le voiturier discute avec une femme d'une quarantaine d'années, puis s'empresse d'aller récupérer son véhicule au garage. J'observe attentivement la scène.

— Viens.

Roxane m'intime à la suivre, tandis qu'elle pousse la lourde porte du hall d'entrée et de s'engouffrer à l'intérieur. Les caméras de surveillance de l'immeuble nous scrutent. Par réflexe, je baisse alors la tête, laissant mes cheveux recouvrir mon visage, avant de me glisser discrètement derrière elle.


*


Quarante-deux étages plus haut, les portes de l'ascenseur s'ouvrent sur un hall de marbre blanc. Roxane se précipite hors de la cabine, toujours aussi enthousiaste. Je la suis d'un pas lent, laissant mes yeux gambader d'un bout à l'autre du corridor. De tous les immeubles que j'ai visités, celui-là est de loin le plus luxueux. Les portes des appartements sont recouvertes d'une peinture blanche virginale et les poignées dorées semblent être en or véritable. Roxane s'arrête devant l'une d'entre elles et s'applique à rechercher les clés dans son sac. Je m'approche d'elle, avant de laisser mon épaule s'appuyer lourdement contre la porte.

— Donc, ça ne te pose aucun problème de ramener chez toi un inconnu de Brooklyn, rencontré une nuit, dans une ruelle mal famée ?

— Un inconnu qui m'a sauvé la vie. Deux fois. Qu'est-ce que je risque de pire ?

Elle lève son visage vers moi, je me redresse pour assurer le maintien d'une certaine distance entre nous.

— Où sont encore passées ces foutues clés...

Je déglutis. Mes yeux scrutent la porte centimètre par centimètre. Une véritable forteresse à elle seule ; non contente d'être déjà blindée, son bâti est en acier renforcé, impossible à fracturer. Mon dernier espoir réside dans la serrure...

— Ah, ça y est !

Roxane secoue le trousseau sous mon nez, avant d'enfoncer la clé la plus imposante dans l'ouverture. Le bruit des verrous ne présage rien de bon. Lorsque le battant s'écarte enfin, elle se décale pour me laisser entrer.

Le Dernier Vol des Oiseaux de Sang | TERMINÉEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant