Watson 2/3

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Lorsqu'il se réveilla, le lendemain, la pluie battait les carreaux. Il avait mal à la gorge. Une dizaine de pétales rouges parsemaient l'oreiller autour duquel il était toujours crispé. L'esprit vide, il les fit glisser dans la corbeille à papier et les recouvrit de brouillons froissés. Il n'avait pas envie de descendre, mais il le faudrait bien. Alors il poussa la porte de sa chambre et descendit, une à une, les marches menant au salon. Holmes était debout, près de la fenêtre, dans une attitude qui laissait généralement présager qu'il s'apprêtait à broyer du noir.

- Bonjour, Watson, lança-t-il sans se retourner en l'entendant approcher.

- Bonjour, répondit le docteur d'une voix enrouée en s'asseyant à la table du petit déjeuner, que Madame Hudson devait avoir monté quelques heures plus tôt.

Il se servit du café, mais, constatant qu'il était complètement froid, le reposa. Ils restèrent ainsi quelques longues minutes, tous les deux immobiles, perdus dans leurs pensées, avant que Holmes ne s'écarte de la fenêtre pour se diriger vers son fauteuil.

- Vous avez une mine affreuse, Watson, commenta-t-il en passant. Mal dormit ?

- Oui, répondit le docteur.

Holmes hésita un instant avant de demander :

- Des cauchemars ?

Il savait que lorsque Watson descendait le matin, la voix enrouée, les yeux rouges et le regard hagard, cela signifiait généralement que la guerre s'était invitée dans son sommeil.

Watson hocha la tête, trop heureux d'avoir une aussi bonne excuse, et se leva.

- Je vais marcher un peu, dit-il en se dirigeant vers le porte-manteau. J'ai besoin d'un peu d'air frais.

- Par ce temps ? s'inquiéta Holmes.

- Je prendrai un parapluie, répondit laconiquement Watson en quittant la pièce.

Holmes le regarda disparaître, le cœur un peu serré. Il aurait aimé pouvoir faire quelque chose pour l'aider.

Watson prit bien un parapluie, mais le ferma au coin de la rue. Il mourrait d'envie de sentir les gouttes battre ses joues, mouiller son front et couler dans son cou, le lavant temporairement de toute cette noirceur qui lui collait à l'âme. Il voulut ouvrir la bouche, pour recueillir un peu de pluie sur le bout de la langue, mais quelque chose bloqua soudain sa respiration et il se mit à tousser, plié en deux, sur le bord du trottoir. Durant quelques terrifiantes secondes, il crut qu'il ne parviendrait jamais à retrouver sa respiration. Puis sa gorge se débloqua d'un coup et une chose soyeuse au goût doucereux lui emplit la bouche. Il la cracha dans sa main.

Une rose.

À la pluie glacée s'ajoutèrent ses larmes brûlantes. Il laissa tomber la fleur et la piétina. Il devait chercher de l'aide, vite.

~

Le Docteur Moore Agard contempla l'amas de pétale qui reposait sur son bureau. Son regard glissa jusqu'à John Watson, un ami et très estimé collègue, retourna aux pétales, puis se fixa définitivement sur la figure pâle celui qui avait fait irruption dans son cabinet de consultation, dix minutes plus tôt.

- Vous dites que vous avez craché ces pétales ? Demanda-t-il d'une voix toute professionnelle.

Watson enfouit son visage dans ses mains.

- Je sais que ça ne fait aucun sens, Moore, mais... Je vous jure... Mon Dieu... Je n'y comprends rien, je vous en prie... Je sais que vous vous spécialisez dans les maladies rares et j'ai pensé que peut-être, vous sauriez...

Hanahaki (Johnlock - Mormor)Kde žijí příběhy. Začni objevovat