Coming Back to Life - Chapitre 8

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Alors oui, peut-être que Harry ne faisait pas le travail le plus passionnant du monde. Peut-être qu'il n'avait pas un salaire mirobolant. Peut-être qu'il faisait souvent des horaires horribles, qu'il rentrait tard chez lui et dormait toute la journée, voyant à peine la lumière du soleil, certaines semaines. Peut-être que son cercle d'ami.e.s était assez restreint et qu'il menait une vie solitaire et ennuyeuse. Mais il se sentait bien. Bien mieux que lorsqu'il était en France. Ici, les gens ne lui demandaient rien. Ici, les gens gardaient pour eux leurs remarques acides. Harry aimait cette discrétion pudique. Harry aimait être une ombre parmi le paysage. Harry aimait la sensation de ne s'attacher à rien, d'être seulement de passage. Même Haku ne savait pas grand chose de lui, dans le fond. Mais il ne demandait rien. Et comme lui, Harry ne lui avait jamais posé de questions indiscrètes. Ils étaient amis et si un jour Harry partait, il savait qu'ils ne garderaient sûrement pas vraiment contact, ou très peu. Mais Haku serait toujours dans ses souvenirs. Harry aimait cette sensation. Il aimait ne pas vraiment compter. Il aimait que personne ne s'accroche à lui. Il aimait sa solitude, son indépendance farouche. Il aimait que seul Mochi soit là, tous les soirs, pour lui demander de l'affection et de l'attention. Personne d'autre.

Alors pourquoi.

Pourquoi le retour de Louis lui donnait-il l'impression de revivre ?

Pourquoi avait-il la sensation de sortir enfin la tête de l'eau, après avoir été des mois et des mois immergé sous un océan sombre ? Pourquoi avait-il l'impression que Louis était le soleil l'attendant à la surface, rayons doux sur sa peau fatiguée ? Pourquoi, depuis que Louis était apparu dans le konbini, ne pensait-il qu'à lui ? Pourquoi — alors même qu'il tentait misérablement de se persuader du contraire — espérait-il chaque jour que Louis apparaîtrait dans le magasin, adorable dans ses sweats trop grands, sa stupide boisson à la fraise entre les mains ? Pourquoi fermait-il les yeux le soir en repensant aux journées qu'ils passaient ensemble, arpentant les rues de Kyoto ? Pourquoi les souvenirs de l'été 1993, souvenirs lointains, qu'il avait passé tellement de temps à repousser au fond de sa mémoire, resurgissaient-ils et ne lui faisaient plus aussi mal qu'avant ? Il avait cru que revoir Louis lui ferait mal, il avait cru qu'il retomberait à cause de lui dans une mélancolie sans fond, que son sourire serait un signal suffisant pour fuir à nouveau, mais c'était le contraire. Louis était en train de réveiller en lui des sensations oubliées. Louis le faisait rire. Louis le faisait rougir. Louis était insolent, stupide, magnifique, agaçant, gamin, mignon, débordant d'énergie. Louis lui posait des dizaines de questions sur le Japon, Kyoto, la langue, la nourriture, la culture... Et Harry ne le repoussait pas. Harry était sincèrement heureux de lui répondre. Harry sentait ses mains devenir moites quand le jeune homme s'approchait de lui, posait ses doigts sur son bras, laisser errer son regard dans le sien un peu trop longtemps, riait à une de ses blagues. Harry ne se l'avouerait pas, non, jamais, mais il avait terriblement peur du jour où Louis entrerait dans le konbini pour lui dire qu'il retournait en France. Parce que ce jour arriverait, n'est-ce pas ? Louis ne pouvait pas rester ici indéfiniment. Il y avait maintenant plus d'une semaine qu'il était à Kyoto. S'il ne rentrait pas tout de suite en Europe, il finirait par en avoir marre de la ville et irait visiter une autre partie du Japon. Harry pouvait comprendre ça. Et il n'avait pas en être triste.

Définitivement pas.

En soupirant, il enfonce sa casquette — réglementaire au travail — sur sa tête, et passe la porte, reléguant ses pensées au fond de son esprit. Il est à peine huit heures du matin. Le carillon résonne, faisant lever la tête aux deux seuls personnes présentes dans la boutique.

Louis et Haku, visiblement en pleine discussion.

Et voilà, Harry ne devrait pas avoir envie de sourire à ce point en voyant Louis assis sur le tapis de la caisse, les pieds se balançant dans le vide, noyé dans son sweat Pikachu, un bonnet sur la tête laissant échapper ses mèches brunes un peu folles. Il avale sa salive — sa bouche étant soudainement assez sèche — et il articule :

Cela aussi passera - Larry StylinsonWhere stories live. Discover now