*Dix Sept*

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En arrivant en Chine mes attentes étaient d'arriver dans une de ces maisons traditionnelles. Celles qui étaient très ornées, dorées et rouges avec un dragon vert en guise de fronton. Encore une fois Hollywood m'avait bien lavé le cerveau. Ma déception se lisait sûrement sur mon visage car Ad'Erwyn me tapota l'épaule tout en haussant les siens comme pour dire « eh oui ».

L'endroit était moderne. Très Ikea. Les murs étaient blancs, les meubles gris et les plantes vertes. Ce coté épuré ne me déplaisait pas à bien y réfléchir. La demeure de Dyn était à son images, simple. Rien dans la maison ne laissait penser qu'un mage y vivait. Tout était si humain, si « terrien ». Terrien . Quelques jours plus tôt, dire ce mot aurait été absurde. Ici elle trouvait sa place car toutes les personnes remplissant cette pièce n'étaient en rien des humains de la branche terrienne comme j'aimais souvent me le dire. Ils étaient humains mais asariens.

Pour en revenir à la maison, effectivement il n'y avait ni fiole, ni babioles, de symboles étranges.

Soudain, à coté de moi Si'Ion lança avec une voix légèrement brisée :

-Dyn, ces tableaux... Ton père m'avait conté la beauté des peintures terriennes.

En suivant le regard de la Mage, je tombais sur un tableau très coloré. Je sentis quelqu'un s'approcher de moi. Dyn. Il s'arrêta à ma hauteur, sourit faiblement et dit :

-Il s'agit d'une peinture de Zhang Daqian. Il faisait parti de l'un des grands peintres du vingtième siècle. Mon père affectionnait ses tableaux car selon lui l'Art terrien est la magie de ceux qui y habite. Sur Terre il n'existe aucune magie mais l'esprit des terriens, leur imagination, leur soif de connaissance, leur soif de s'élever toujours plus haut est ce qui font d'eux des êtres aussi magiques que nous. Sans pouvoir ils peuvent tout de même faire des merveilles. C'est ce que pensait mon cher père.

Bouche bée, le tableau me transporta vers un endroit qui m'était inconnu. J'imaginais ce Zhang Damian ou Datian peindre ce tableau. Avait-il ce paysage devant lui ? Ou l'avait-il imaginé ?

J'aimais bien la perception qu'avait le père de Dyn de notre monde. Par là, une envie d'en savoir plus sur cette homme, dont l'existence venait de m'être révélé, m'envahit. Que lui était-il arrivé ? Avait-il connu la même fin que mon père ?

Voulant poser la question qui me brûlait les lèvres, je me tournais vers le garçon aux cheveux ébènes.

Celui-ci était à quelques pas de moi alors par timidité, je m'étais tue.

Il lança tout en claquant les doigts vers le haut :

-Nous avons cinq chambre en haut et cinq en bas. A vous de choisir, ma demeure est vôtre.

-Merci Dyn, répondit ma mère. Je t'en suis très reconnaissante.

Dyn fit une révérence bien maîtrisée. Puis à ma surprise il s'attacha les cheveux. Ce fut un spectacle déstabilisant. Il maîtrisait le geste, il maîtrisait ses cheveux. Une queue de cheval imparfaitement réalisée mais cela affinait encore plus son visage anguleux et bien dessiné. La seule chose qui me venait à l'esprit était le nombre d'après shampoing qu'il utilisait pour avoir des cheveux aussi brillants. Peut être de l'huile de coco qui sait ?

Je m'égarais dans mes pensées mais mes yeux étaient encore posés sur lui. Il capta mon regard mais cette fois ci je ne détournai pas les miens comme à mon habitude. Son discours sur son père attisait ma curiosité sur sa personne. Connaître l'histoire de Dyn et en savoir plus sur lui furent mes pensées sur le moment. Puis me rappelant les Traqueurs je me trouvais stupide. La situation devenait gênante car je sentais le regard des autres sur nous deux.

Pour détourner cette attention plus qu'embarassante, je cherchai du regard mon ami. Il était en train de regarder les motifs peints sur un vase géant.

-Edward tu viens ? On va choisir nos chambres.

Ce dernier marmonna quelque chose.

Puis il dit à voix haute :

- Prends la chambre la plus proche de la cuisine, au cas où, tu me connais; suivit d'un regard complice.

Ainsi je pris son fauteuil roulant et le poussa vers une grande ouverture qui donnait sur l'immense salon. Encore plus blanc et gris que le couloir mais toujours ponctué par des tableaux. Le père de Dyn avait donc un amour pour l'art.

Ma mère venait dans ma direction et me souffla à l'oreille :

-J'aimerais te parler plus tard dans la soirée. Viens me voir quand tu auras le temps. Et ma chérie, sois plus discrète quand tu « mates » Dyn.

Je rougis instantanément à l'écoute du « tu mates » bien accentué. Elle m'embrassa sur le crane et disparut vers les escaliers comme si de rien n'était. Je regardai autour de moi pour voir si les autres avaient suivi notre échange et seul Mel était là. Son sourire de Mr Colgate étiré sur son visage parfait, l'air de rien il me dit :

- C'est vrai que notre jeune Mage n'est pas désagréable à regarder.

Ma rougeur a du s'accentuer car il rit aux éclats. Morte de honte, la tête baissée, je poussai Edward vers la chambre la plus proche, dépassant un Dyn suspicieux.

-Princesse ? Ça t'arrive d'être normale des fois ? Piqua Dyn derrière moi.

Le ton légèrement sarcastique de celui ci parvenait à mes oreilles mais cette fois ci une pointe d'inquiétude était aussi présent. Ou alors encore une œuvre de mon imagination.

Loin de tout ce malaise, je soufflai et me concentrai sur un Edward pas très à l'aise dans son fauteuil. Je le poussai finalement dans la chambre de son choix, l'aidait à se lever de sa monture et l'allongeait sur le lit.

Il ferma ses yeux au contact de l'oreiller et balbutia :

- Réveille moi d'ici quelques heures. Mes blessures me font encore très mal.

-Repose toi mon grand, t'en as bien besoin, disais -je tout en le couvrant du drap posé sur le lit.

Ensuite je sortis sur la pointe des pieds de la chambre de mon ami et me retrouva nez à nez avec Dyn.

- Tu as choisi ta chambre ?

-Non pas encore. J'y vais .

-Laisse moi te proposer la chambre de tes rêves, proposa t-il tout en me bloquant un peu le passage.

Sur le ton de la moquerie, je lui dit :

- Dyn T'EnRo, agent immobilier dans l'âme.

Il rit à gorge déployée et me tendit sa main.

-Voulez-vous me suivre princesse ?

Posant un sourire amusée sur mes lèvres, je tendis ma main, un peu hésitante et surtout un peu honteuse.

-Je vous suis mon cher hôte.

En le suivant dans les couloirs interminables de cette maison, je m'étais demandée si tout ce que je vivais n'était pas le fruit de mon imagination. Comment pouvais-je me sentir aussi légère, en sachant que des créatures étaient sûrement en train d'humer mon odeur ou me traquer pour me ramener vers leur maître, un psychopathe fini. Est-ce là une faculté d'adaptation de notre cerveau ? Ou alors étais-je seulement le joueur quelque peu stupide préférant se focaliser sur une quête annexe que sur la quête principale ?

Sur ces pensée à la fois déprimante Dyn me montra ma chambre, un air fier sur le visage.

C'était mon ancienne chambre. Je voulais dire, ma chambre d'avant l'arrivée de toutes ces histoires. La revoir me fit l'effet d'un baume au cœur car cela me donnait l'impression que rien avait changé dans ma vie, que le stress d'une mort imminente et sanglante n'existait pas.

Quelque peu émue et reconnaissante je pris machinalement Dyn dans mes bras et chuchota un merci bien nul.

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⏰ Last updated: Apr 12, 2019 ⏰

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Aelys : La fille égaréeWhere stories live. Discover now