XV. Tête à tête

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Un sentiment dont elle profita sur la route de l'Institute of Plural Arts puisque de toute évidence, ça n'allait pas durer. Elle arriva sur les lieux une demi-heure plus tard, prête à trouver Murphy. Il n'y avait plus grand monde dans l'enceinte de l'établissement et un frisson la traversa à l'idée de croiser Philip au détour d'un couloir.

Rien ne lui certifiait que le directeur l'avait bien exclu, il n'était pas insensé de penser qu'il avait bluffé pour se donner de grands airs ou sous les simagrés de son neveu, s'était rétracté. Elinor se retrouva à agir comme Celian quand il l'avait accompagnée à la fac, elle était sur ses gardes et le peu d'étudiants ou de personnel qu'elle croisait avait le droit à une œillade qui trahissait sa suspicion.

Il faut dire qu'à la nuit tombée, l'Institut avait une toute autre atmosphère, plus manoir hantée que demeure royale.

Arrivée au dernier étage, elle se dirigea vers le fond du couloir, dans l'aile où se trouvait son bureau. Elle reprit son souffle avant de frapper, elle ne savait même pas comment elle allait aborder la chose mais cette fois elle n'avait pas envie de trop réfléchir. Trois petits coups secs sur la porte, quelques secondes passèrent sans recevoir de réponse. Elle réitéra mais toujours aucun signe de vie alors le culot l'emporta et elle tourna la poignée. La pièce était plongée dans l'obscurité, il n'y avait pas âme qui vive dans ce bureau. Naturellement, ça ne pouvait pas être si simple.

— C'est quoi ce bazar ?

Elinor sursauta en trouvant Jacob, l'air renfrogné, ses lunettes rondes et rouges sur son long nez derrière elle.

— Oh encore, vous, reprit-il en remettant Elinor.

— Bonsoir Jacob, on ne se quitte plus dis donc, dit-elle avec un sourire forcé.

— Vous n'auriez pas une sorte d'obsession pour Monsieur Murphy par hasard ? demanda-t-il en plissant les yeux.

— Sûrement pas ! En revanche, j'ai besoin de le voir maintenant. Est-ce qu'il est déjà parti ?

—...

— J'admets que ça parait étrange mais croyez-moi, j'ai un gros problème qu'il est seul à pouvoir régler.

Jacob leva les yeux au ciel.

— Il est en réunion. Il ne devrait pas tarder mais vous devriez l'attendre à l'extérieur, il ne repassera pas ici, il ira directement jusqu'au parking.

— Vous êtes génial, merci Jacob, dit Elinor en se hâtant vers les escaliers.

L'homme marmonna un quelque chose s'apparentant à un de rien et retourna dans ses pénates terminer les tâches mystérieuses qu'il avait à faire pour le compte de Murphy. En descendant les marches, Elinor se demandait s'il finissait tous les jours à vingt-heures et que si c'était le cas, elle espérait pour lui qu'il avait stratégiquement négocié son salaire.

A l'extérieur, l'air frais de début de soirée la frappa de plein fouet, elle ne portait qu'un blazer comme couche supplémentaire à sa tenue et sentit immédiatement le bout de son nez refroidir. Pour gagner du temps, elle se mit à la recherche du parking, elle ne savait même pas que l'Institut en avait un à sa disposition même si après réflexion, ça faisait tout à fait sens. C'est sur le côté droit du bâtiment qu'elle découvrit ce périmètre bétonné privé qui pouvait accueillir une vingtaine de véhicules.

Maintenant qu'elle se retrouvait là, seule et éclairée par un lampadaire, Elinor se demandait si c'était vraiment une bonne idée de l'attendre dans le clair-obscur comme aurait pu le faire Philip. Elle doutait une nouvelle fois de ses choix qui finissaient toujours par êtres relégués trop vite au tiroir mental des regrets. Elle se frictionna les mains et souffla au creux de celles-ci pour gagner quelques secondes de chaleur tout en reconsidérant l'idée de déguerpir avant qu'il n'arrive.

La liste d'infortunes d'Elinor GardnerWhere stories live. Discover now