La démaquillant, Marcus et Louis XV

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Marcus continue de courir dans la maison. Ils rient à gorges déployées. Camille a mal aux joues à force de rire. Marcus lui avait manqué.
Le grand blond s'arrête et guette leurs arrières pour pouvoir contrer Ana à tout moment, mais personne ne vient. La jeune fille semble s'être résignée. Marcus entre dans la petite salle de bain de leurs parents et dépose Camille sur le côté du lavabo incrusté dans un meuble en marbre moche.
Il ferme la porte à clé et s'assoit sur le rebord de la baignoire, un pied dedans, un pied dehors. Il allume une cigarette.

Camille bouge les jambes d'avant en arrière comme un enfant sur une balançoire. Ses cheveux aux reflets d'or scintillent sous la lampe du lavabo. Ses mains agiles détachent un à un les boutons de velours de la robe et il descend du lavabo pour la laisser choir à ses pieds. Il n'avait gardé qu'un pantalon noir dessous.
Marcus observe ses épaules dénudées et ses côtes visibles par endroit. Camille s'approche de lui en souriant et lui prend sa cigarette. Il la porte à sa bouche et laisse du rouge à lèvre dessus.

— Cette robe était magnifique. Tu étais magnifique. Tu devrais la mettre plus souvent.

Camille ne sourit plus, il se rassoit sur le lavabo.

— Merci.

Marcus se lève et attrape les cotons et le démaquillant de Rose ; la femme qu'ils considèrent comme leur vraie mère depuis que Luna à mis les voiles. Rose est la femme de leur père depuis bientôt cinq ans ; et elle les a chéri comme s'ils eurent été ses propres enfants. Et ça s'est arrangé comme ça. Luna a perdu la garde de Camille après sa séparation tragique avec leur père, et même si cela est bien ainsi, les séquelles demeurent dans les esprits. Camille sait que Luna ne sera jamais sa mère. Plutôt mourir.

Marcus enduit un coton de liquide et Camille se laisse faire, parce que le mascara le gêne. Mais il refuse de retirer le rouge à lèvres.
Parce que ça a toujours été comme ça. Camille a toujours porté du rouge à lèvres.
Marcus passe ses doigts sur son visage encore parsemé de paillettes par endroits, puis passe dans ses cheveux.

— Comment est ce que tu vas ?

Camille ne répond pas et laisse sa tête tomber devant lui sur le torse de son frère.

— Ça va.

Marcus sait qu'il dit la vérité, puisqu'il n'a pas conscience d'aller mal. Camille dit toujours la vérité. Marcus attrape l'un de ses bras et regarde les dizaines de petites entailles qui le recouvre. Il les caresse du pouce.

— C'est récent.

Camille se redresse doucement. Il regarde à son tour son bras. En effet, des entailles sont encore rouges.

— C'est pas moi. Murmure le garçon.

Marcus relève les yeux vers lui.

— Romeo ?

Camille hausse les épaules doucement.
Romeo c'est le copain de Camille. Un garçon magnifique, protégé de toutes parts par sa famille aristocrate conservatrice qui ne connaît rien de leurs aventures. Romeo habite le manoir d'à côté. Romeo est aussi un peu dérangé.

— Quitte-le Camille.

Il ne répond pas, et Marcus sait qu'il ne répondra pas. Parce que Romeo lui fait du bien.

— Avec quoi est ce qu'il t'a fait ça ?

Camille avale sa salive.

— Un cutter je crois.

Marcus soupire pour contenir tout ce qu'il aimerait dire. Il tire sur sa cigarette enduite de rouge à lèvres et relève le menton de Camille.

— Promet-moi que vous vous protégez ?

Camille ferme doucement les paupières et sourit légèrement en guise de réponse affirmative.
Marcus sourit à son tour. Il ne veut pas se mêler de trop près à leurs histoires, parce qu'il sait que Camille aime garder ses secrets. Sauf que Romeo n'est pas le genre de secrets facile à garder, et qu'il ne vaut mieux pas le laisser trop longtemps en liberté.

— Bon, on va rejoindre Ana ?

Camille acquiesce et descend du lavabo. Il prend la robe de sa mère et Marcus ouvre la porte.
Un cri retentit.

— AH AH !

Un cri de victoire, un cri de vengeance, un cri d'Ana. Marcus recule en se prenant une grosse bombe à eau sur le torse, la bouche ouverte devant le culot de la jeune fille qui éclate de rire devant sa tête de merlan frit.

— Ana je vais t'éclater...

La jeune fille rigole de plus belle et se met à courir dans le couloir. Le garçon détale après elle en criant des injures.
Camille sort de la pièce et se dirige vers le salon pour les observer se pourchasser, c'est toujours distrayant.
Les deux se regardent comme chien et loup, l'un de chaque côté de la grande table familiale en acajou, attendant que l'autre bouge pour déguerpir. Le vieux parquet grince sous leurs poids.

— Ben alors ils te servent à quoi tes muscles ? Raille la jeune fille.

— J'entend pas les gens aux cheveux roses, fille de Satan !

— Ferme-la sale roux ! Avec ton Q.I. de bulot !

Ana grimpe sur une chaise avant de sauter sur le canapé tel un pélican démembré. Marcus la poursuit tant bien que mal sans manquer de d'exploser le genou dans la table basse.

— Putain de meubles de merdeeee ! Ana ! Ana je te jure que t'es une femme morte !

Le rire de la jeune fille résonne dans toute la pièce tandis qu'elle se dirige vers un autre couloir.

— Toi aussi t'es une femme morte mon pauvre Marcu...

Un gros bruit sourd interrompt la bataille, suivit d'un cri semblable à une alarme de voiture. Camille s'avance un peu pour mieux voir.
Il entend Marcus qui se tord de rire à ne plus en pouvoir. Camille aperçoit enfin la jeune fille qui se redresse, la tête pleine de sang.
Ana venait de s'ouvrir la tête contre un buffet Louis XV.
Marcus s'avance vers elle, les yeux pleins de larmes tant il vient de rire. Il regarde sa tête et la blessure. Ana se laisse faire en grimaçant, elle n'aime pas qu'il la touche avec ses sales pâtes d'arrogant.

— T'avais qu'à pas courir en chaussettes. C'est Dieu qui t'a puni ma vieille.

— Ferme-la Marcus et occupe toi de ton cul.

LAMOUREUX CamilleWhere stories live. Discover now