Eagleside

Chapitre 3: Premières impressions

Après un moment, Leana se détourna de la fenêtre, laissant Kaya voir son visage sur lequel aucune larme ne coulait ou n'avait laissé de trace de son passage. Elle lui adressa un faible sourire auquel la jeune fille rousse répondit. Lui revint alors en mémoire l'origine de Leana et elle ne put retenir la question qui lui brûlait les lèvres:

- Serais-tu Canadienne? Pas Américaine?

Ce fut le tour de Leana de la regarder sans comprendre.

- Pourquoi me demandes-tu cela? On... est aux Etats-Unis, là?

Le ton de Leana était soudain très angoissé et son amie s'en voulut de lui avoir posé cette question. Elle était bien placée pour savoir ce que l'on ressentait quand on pensait avoir peut-être quitté son pays, elle aurait dû épargner à la jeune fille ce tracas supplémentaire.

- Je n'en ai aucune idée - avoua Kaya - Ma mère m'a droguée pour m'emmener. Je ne me suis réveillée qu'à un bref moment et la seule chose que je sais, c'est que nous nous trouvions dans un aéroport. Donc, nous pouvons être dans n'importe quel pays anglophone. Je suis désolée..

-Non, ne t' en fais pas, tu n'y peux rien. De toute façon, c'est peut-être toi qui as changé de pays- Kaya déglutit difficilement- Désolée, je ne voulais pas..., s'empressa Leana, réalisant soudain ce que son besoin d'être rassurée lui avait fait dire.

Mais elle ne put jamais finir sa phrase car le garçon assis juste devant Kaya se retourna et demanda:

- Savez- vous où nous sommes?

-Non mais tu te fous de nous, là? Tu crois vraiment qu'on sait où on va ?, explosa Leana.

A l'expression de son visage, son angoisse s'était changée en un colère noire et agressive. Elle eut droit à un regard surpris de la part de Kaya. En effet, celle-ci ne comprenait pas la soudaine violence de sa voisine et n'aurait pas soupçonné une telle réaction de sa part. Le garçon, qui avait eu un petit sourire montrant son envie de s'intégrer tandis qu'il leur parlait, sursauta, se mordit la lèvre et baissa les yeux d'un air à la fois attristé et mal à l'aise. Il semblait vouloir reprendre les mots qui étaient sortis de sa bouche. Se sachant dans l'incapacité de le faire, il murmura:

-Désolé.

 Kaya remarqua alors que personne n'était assis à côté de lui. La seule place vacante à cet étage du car se trouvait à sa gauche. De plus, songea-t-elle, si elles étaient perdues et malheureuses, il devait logiquement l'être aussi.  La jeune fille qui, n'avait jusqu'alors pas osé, donna un petit coup de pied à Leana, espérant que celle-ci comprendrait le message. Cependant, cela se révéla inutile car l'adolescente semblait déjà s'en vouloir d'avoir régi de la sorte.

-Désolée, comme tu l'as remarqué, je suis un peu sur les nerfs. Non, je ne sais pas où on va. Au cas où tu ne l'aies pas remarqué, personne ne le sait.

Même si la phrase aurait pu être prononcée plus gentiment, il y avait déjà du progrès, nota Kaya qui enchaîna, tâchant d'atténuer la fougue de sa voisine:

-Contente de te connaître. Je m'appelle Kaya et voici Leana.

Le regard du jeune homme passa de l'une à l'autre mais elle crut malgré tout remarquer qu'il s'attardait un peu plus longtemps sur Leana qui lui adressait un grand sourire chaleureux, comme pour rattraper son écart. Son amie était vraiment belle et unique. Durant le silence gêné qui s'ensuivit, l'adolescente l'observa discrètement. Il était grand, au moins deux têtes de plus que Kaya et une de plus que Leana. Ses yeux couleur bleu lac, presque froids, profonds, donnaient l'impression que l'on pouvait plonger dedans voire s'y noyer et ses cheveux étaient bronde. Il se les était coiffés de manière faussement bataillée pour se donner une allure décontractée qui lui allait très bien. Son visage était splendide, allongé, sculpté et il était très musclé. Cependant, cette musculature n'en devenait pas trop importante. Alec avait trouvé l'équilibre parfait, rarement atteint. Il ne le mettait de plus pas du tout en avant, contrairement à la plupart des garçons, comme s'il n'en était pas fier ou même content. Ce manque d'exhibition l'embellissait encore grâce au côté naturel ainsi accordé.