Encaisse-le.

Depuis le début
                                    

        Fini l'imposture, mon règne en matière exécrabilité n'en était pas encore à son apogée. ​Jacob Nox garda le silence, et pourtant, il mourrait d'envie de lâcher son rire idiot, lui parmi tant d'autres. Ça aussi, c'était prévisible. Mon enseignant grimaça mais n'ajouta rien, lui non plus. Sûrement parce qu'il avait également remarqué la disparition de Nathan 3.0, la pâle copie de moi-même, le bon petit samaritain qui avait pris ma place ces dernières semaines. Je l'avais assassiné au moment où Jenny avait posé ses lèvres sur celles de Dean et je m'étais résolu à l'enterrer quand j'avais franchies les portes du lycée, en arrivant, ce matin. La sonnerie me délivra enfin de ma séquence d'observatoire, tout le monde se désintéressa enfin du singe et ce fût sans aucune surprise que la foule se rua à l'extérieur en un quart de secondes. Ce ne fût évidemment pas mon cas. Dehors, dans les couloirs, il y avait Jenny. Et plus précisément Dean et Jenny. J'étais peut-être légèrement refroidi quant à l'idée de les voir côte à côte... Ou bien de les voir tout court. J'allais devoir endurer ça pendant trois petites semaines. Après quoi, ma dernière année de lycée à Robert E. Lee prendrait fin prématurément, sachant que je préférais sécher les deux dernières pour les passer à traîner sur mon futur campus universitaire, histoire de me trouver de nouveaux amis -plus fidèles que les anciens, si possible- pour la rentrée prochaine. En attendant, je flânais dans ces foutus couloirs comme une coquille vide. 

—Tu viens à ma fête ? 

—Hein? 

—J’organise une fête ce soi​r, répéta mon interlocutrice. 

        J'étais tellement absorbé par ma séance de réflexion philosophique que j'en avais totalement oublié l'existence des autres. 

—On se connaît ? Demandais-je alors que cette jolie fille était clairement en train de me faire du gringue. 

        Elle esquissa un sourire. 

—Eva Chamberlain, je suis avec toi en cours d’italien. 

        Oh, elle voulait sûrement parler de l'heure que je réservais habituellement à la fumette ou aux moqueries à propos des footballeurs, perché sur mes gradins. Pour la professeur d'italien, mon existence n'était qu'une légende, car elle ne m'avait jamais, à proprement dit, vu en vrai. 

—Ah oui, Eva, je vois parfaitement, mentis-je en me pinçant la lèvre inférieure. 

        Elle était irrévocablement en train de sombrer dans les méandres de son esprit qui devait lui venter mes mérites. Mes prunelles blues et mon​ visage angélique l’avaient déjà faite prisonnière… 

—Il ment, assura Dean en arrivant comme une flèche. 

        Je soupirais. Encore lui. 

—​On peut discuter? 

        La sympathique Eva ne perdit pas son sang-froid pour autant, armée d’une remarquable motivation, elle réitéra son offre en l’ignorant. 

—Crois-moi, il ne se souvient même pas du nom de son chat alors comment voudrais-tu qu’il se rappelle de toi ? Persista-t-il alors qu'elle levait les yeux au ciel, ennuyée. 

        C'était bien là, une preuve que Dean avait perdu tout sex-appeal depuis que le lycée avait appris a quel point la loyauté comptait pour lui, même si je doutais du fait que ça l'affecte pendant très longtemps. 

—Je vais y réfléchir, en attendant, tu pourrais peut-être me donner ton numéro de téléphone…Juste au cas où, lui répondis-je avec un clin d’œil en prenant sur moi pour ne pas écraser la tête du troisième élément sur l'un des casiers qui nous entouraient. 

Love comes from HateOù les histoires vivent. Découvrez maintenant