Bonus #2

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Dans cette seconde épreuve, le personnage devait se comporter à l'opposé de sa personnalité habituelle. C'est un sacré changement ! Il devait y avoir deux descriptions (personnages ou bien lieux). Bonne lecture, et n'hésitez pas à me donner votre avis !

Un grand sourire éclaire mon visage. Je cours comme je peux jusqu'au bord de la haute falaise, tout en fredonnant un air entraînant. Quelques gloussements s'échappent occasionnellement de ma gorge et mes cheveux virevoltent joyeusement autour de mon visage. Arrivée au bord, je me laisse tomber sur le sol et m'assieds dans l'herbe humide, tâchant un peu mon pantalon. La fraîcheur matinale me fait frissonner et je ferme les yeux, écoutant le bruit régulier que produisent les vagues. Qu'il fait bon de vivre en cet endroit ! J'inspire un grand coup et l'air frais et salé pénètre dans mes poumons. Je soulève mes paupières, admirant le paysage qui me fait face.

Le ciel, teinté d'un bleu clair et pur, est parsemé çà et là de quelques nuages blancs. Leurs formes sont toutes différentes et me font rêver. Alors que l'un ressemble à un long cigare, un autre représente à mes yeux une feuille d'arbre gigantesque. Retombant en enfance, je continue d'observer ce ciel qui se colle à l'océan transparent, éclairé par un soleil chatoyant. De couleur plus foncée, cette mer lumineuse reflète la luminosité ambiante. Un vent fort souffle toutefois sur ce paysage idyllique, soulevant quelques vagues qui viennent s'écraser sur la plage en contrebas, créant dans leur brisure une écume blanchâtre aussi claire qu'un nuage. Le ciel et la mer se confondent en une multitude de couleurs claires et vivantes.

C'est beau... Habituellement cette vue me rassure, mais ne m'emplit pas d'une joie aussi intense que celle que je ressens en ce moment. Une douce chaleur se répand dans mon ventre alors que mon cœur malade semble heureux et bat plus fort. Ces battements appuyés ne sont pas dus à ma course. Le son produit par mon organe vital défaillant se mêle aujourd'hui à mes rires, éclats de joie depuis longtemps perdus. Une expression de bonheur pur toujours plaquée sur le visage, je nourris mes yeux de cet endroit magnifique, ne perdant pas une miette du spectacle qui s'offre à moi. Quand je me rends ici, je n'observe pas toujours ce paysage que j'ai tant vu et revu. Mais aujourd'hui, alors qu'une gaieté inhabituelle grandit dans ma poitrine, je décide que j'ai le droit de me détendre et d'oublier Cerbère.

— Tu es heureuse, Rose, murmure une voix rassurante.

Perdue dans la contemplation béate de ce paysage magnifique, je n'ai pas entendu ma mère approcher doucement, à petits pas feutrés. Elle ne me surprend pas, mais je ne pensais pas qu'elle me suivrait hors de la maison. Elle semble également joyeuse. Un sourire s'étire sur son visage, s'arrêtant aux commissures de ses lèvres et créant deux fossettes au creux de ses joues. Ce sourire donne un air enfantin à son visage fatigué mais heureux et se reflète dans ses yeux vert bouteille. Debout à côté de moi, ses longs cheveux noirs parsemés de mèches grises volant au vent, elle semble avoir rajeuni. Je sais qu'elle s'efforce toutefois d'enfouir sa maladie au plus profond d'elle-même, de se protéger et de me protéger. Les épaisses couches de vêtements sombres qui recouvrent aujourd'hui son corps faible et amaigri sont une énième protection contre les regards extérieurs. Elle cache ses faiblesses, tout comme moi. Pourtant, elle semble aussi heureuse que moi à cet instant, comme si la joie qui avait fait battre mon cœur plus fort qu'à l'accoutumée l'avait touchée, elle aussi. Le désespoir l'a quittée et la tristesse m'a abandonnée. Pour la première fois depuis des années, les chaînes qui m'emprisonnent dans un univers étriqué se sont relâchées. Elles ne sont pas encore tombées et mon cœur est toujours prisonnier, mais je vais mieux, et ma mère aussi. Je suis enfin libre de rire, de rêver, de vivre et de m'ouvrir au monde.

Celle qui m'a donné la vie me regarde et un véritable brasier teinté de force, d'amour et de désir de vivre brûle dans ses prunelles vertes. À son regard je devine qu'elle ressent la même chose que moi aujourd'hui. La même joie intense et inavouable, qui lui donne cette force insoupçonnée que peu de personnes connaissent et ressentent. Pourtant, je ne lui réponds pas.

« Es-tu heureuse ? »

Pour tout dire, je n'en suis pas sûre. Il est vrai que je me sens joyeuse, plus que d'habitude, mais je crains que cela ne soit qu'une passade. Que demain, ma joie s'estompe, que je retombe dans mon désespoir intense et me replonge sous la couche de sarcasmes qui me protège. Pour être honnête, j'ai peur. La plupart du temps, ce n'est pas ainsi que je me comporte. Je ne suis que rarement aussi anxieuse, car j'ai réussi à accepter la perspective que Cerbère sera toujours présent et finira sûrement par avoir raison de moi. Généralement, il ne reste que la tristesse que la musique vient balayer pour un temps. Aujourd'hui, une angoisse est née en moi : celle de perdre ce bonheur, qu'il ne soit qu'éphémère et que je ne sois plus jamais aussi gaie qu'en cet instant. C'est cette pensée qui vient ternir ma joie et qui me hante, alors que je détourne le regard du visage interrogatif de ma mère. Quand je me décide à la regarder une nouvelle fois, son sourire a diminué. Il n'a pas disparu : il s'est fait tendre et compréhensif. Elle a compris. Peut-être ressent-elle la même chose que moi...

Je n'ai pas besoin d'ouvrir la bouche pour parler et exprimer mes ressentis avec des mots. Je ne le ferais pas, car la moindre parole pourrait briser ce silence, ce bien-être et surtout ce bonheur partagé et sorti de nulle part, éprouvé en cet instant. Je me contente alors de hocher la tête, mes cheveux me fouettant le visage au gré du vent qui souffle de plus en plus fort. Peu après, une certitude naît en moi. Autant profiter de cette joie même si elle risque de disparaître, bien que je ne sache pas l'exprimer, j'ai réussi à chasser mes tourments. Ma soudaine panique est partie, ou presque. Il faut profiter de l'instant, sans penser au futur, vivre la vie comme on l'entend et la prendre de la façon dont elle vient, ou du moins essayer. Je l'ai compris maintenant. Je crois que je vais tout faire pour garder ce bonheur.

Alors, oui. Je suis heureuse.

~

C'est inhabituel, ce bonheur chez Rose ! Vous ne trouvez pas ça... bizarre ?^^

Je ne publierai pas le troisième texte, car ce n'est pas le plus réussi selon moi. J'espère seulement que vous aimerez ces deux textes. Je continuerai l'histoire bientôt, mais avec ce concours et les examens, je n'avais plus le temps d'écrire... Heureusement, c'est plus simple en ce moment !
Allez, à bientôt !

CerbèreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant