II - Enkidu

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« Magne toi ! »

La corde qui me reliait à un cavalier et maintenait mes poignets ensemble me tira vers l'avant, si bien que je finis le nez dans le sable. Je n'étais pas certaine de la traduction mais comme il ne cessait de me le répéter à longueur de journée et dès que je ralentissais. Je grognai et l'insultai de tous les noms dans mon jargon. Je tentai de me remettre sur mes jambes mais celles-ci ne pouvaient supporter d'avantage mon corps. Je saluai de nouveau le sol qui me le rendit en me brûlant d'avantage. Parce que oui, j'avais dit adieu à mes vêtements, je les avais échangé contre un grand morceau de toile de coton blanche qui s'était déjà usée aux extrémités. Sans parler de tous les coups de soleil qui étaient apparus rapidement. Un calvaire pour dormir, surtout quand vous avez le sol pour lit et un air extérieur de -15°C. Voyant que je daignais pas à avancer d'avantage, l'homme descendit de son cheval. Son maître remarqua la scène et donna des consignes. Je sentis mon corps peser la masse d'une plume et atterrir sur le garrot du cheval qui se tenait à mes côtés. Je restai sans voix et me contentai de rester bien sage cette fois-ci. Lors de leur conversation, les soldats avaient dit un nom du genre Uruk. Ce nom me disait quelque chose mais impossible de me souvenir. Le paysage défilait, toujours identique. Certaines fois, nous apercevions d'autres marchands qui avaient eux aussi une panoplie d'esclave et se dirigeaient vers notre destination. J'avais failli prendre les armes quand je vis notre troupe abandonner un des esclaves qui portait la cabine du maître. Cet homme n'avait plus que la peau sur les os, je me demandais comment il avait réussi à tenir jusque là... Je devais être privilégiée car j'avais droit à un repas un peu plus conséquent que les autres en plus du traitement de faveur dont je profitais actuellement. A cause des nuits, je m'endormis sur le cavalier. Je pouvais l'entendre râler avant de me laisser emportée par les bras de Morphée.

Le réveil fut brutal. Avant même de franchir les portes de la ville, mon « garde » m'avait viré de la selle. Résultat, réveil avec un vieux mal de crâne. Je me remis sur mes jambes et levai les yeux. Mon regard se perdit sur les façades de la forteresse. Des gardes surplombaient les environs et tous les marchands qui rentraient et sortaient après avoir valider leurs papiers. Je fus surprise par l'organisation. Après tout, les grecques étaient les initiateurs de la démocratie, alors pendant l'Égypte Antique, d'autres choses avaient vues le jour. Alors que l'on s'apprêtait à franchir l'entrée, je fus tiré vers l'arrière et ma vision devint noire. Je tâtai de mes mains nouées à proximité de mes yeux et sentis le tissu faire le tour de mon visage en passant par les yeux. Le reste se fit à l'aveugle. Je manquais de marcher sur les pieds des marchands et acheteurs à chaque seconde, je percutais les épaules de ceux qui ne me laissaient pas passer. Ma vision absente, tous mes autres sens se mirent en éveil. Les différentes épices volaient dans l'air, suivies par les odeurs plus discrètes des fruits exotiques et des plantes tropicales. Le tout se déplaçait sur des airs d'instruments à cordes et percussions diverses. Les médailles des danseuses rentraient en collision à chaque déhanché qui marquait le tempo. Mon plaisir fut de courte durée quand je me sentis monter les marches de ce qui s'apprête à une estrade en bois. Je perçus des bruits de chaînes qui résonnaient entre elles. Je redoutais le pire. Je reconnus la voix du maître s'élever au-dessus des autres et de la musique. Les présences autours de moi s'estompèrent peu à peu, ma laissant seule sous les regards malsains des potentiels. Je devais être bien trop pâle à leur goût, bien que mon bronzage n'ait jamais eut été aussi uniforme. Je sentis le morceau de tissu tomber sur mon nez et arriver autours de mon cou. J'ouvris doucement pour m'habituer à la luminosité. Je constatai les regards surpris et songeurs de ceux qui me dévisageaient. En peu de temps, les mises d'abord silencieuses, se battirent et s'élevèrent au plus haut. Le plus chanceux eut le privilège de se saisir de ma corde après avoir donner une bourse remplie de pièces à mon ancien maître. Je voulais m'échapper, pas de doute là-dessus, mais il fallait la jouer discrète pour le moment. Je le suivis jusqu'à sa demeure. L'extérieur étaient très coloré et un ensemble de courbe et contre coure dessinaient l'entrée, dont la porte se résumait à un rideau de perles. Il m'emmena à travers les différents couloirs. Je fis un pas en arrière quand je compris dans quel lieu j'étais desservie. La dernière pièce comportait des rideaux semi-transparents qui arrondissaient les angles des murs et des portes rectilignes, des plantes en pots dans la majorité de la salle, et une fontaine autours de laquelle. un ensemble de coussins dans les tons passion se répartissaient, avec dessus des jeunes femmes et hommes absolument magnifiques. Leurs membres étaient recouverts de bijoux d'or et de pierres rares, qui contrastaient avec la finesse du voile qui laissait comprendre ce qu'il y avait dessous. L'air environnant portait les parfums des encens et autres herbes brûlés, il me semblait avoir des effets soporifiques et aphrodisiaques. Hors de question de finir comme eux ! Ça non ! Je me retournai et saisit un poignard accroché sur un des hommes qui nous avaient accompagné, après un bout coup de genoux dans l'estomac et de jambe dans la partie sensible. Heureusement que la lame était courbée, sinon je me serais coupée les mains en rompant les liens. Je m'emparai d'une des femmes pour me servir d'elle comme otage. Je parvins ainsi à reculer jusqu'à la fenêtre qui donnait dehors. Le bâtiment étant en pied, pas de soucis d'atterrissage. Je poussai la demoiselle dans les bras des gardes et sautai à travers l'ouverture. Dehors, je courus en direction du marché. Ce dernier était toujours autant bombé donc les chances de m'attraper se réduisait considérablement. Je continuais ma course sans réellement savoir où je me dirigeai. J'entendais les hommes à mes trousses bousculer tout sur leur passage. Une cloche sonna. Toutes les personnes présentes arrêtèrent leurs activités et s'agenouillèrent. Je ne compris pas la raison, si bien que j'en profitai d'avantage pour m'éloigner au plus des gardes. Je me retournai pour voir la distance qui nous séparait. Je percutai quelqu'un. Je m'excusai en baissant la tête. Je voulus repartir. Mon bras se bloqua. Je fis face à la cause du problème.

Daydream/Travel through timeWhere stories live. Discover now