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Gaëtan

J'aurai bien prolongé mon petit séjour en Grèce de quelques jours. La mer, la chaleur, les amis... tout est réuni là-bas pour des vacances de rêve. Le bruit des vagues, le rire de ma meilleure amie et les âneries de sa sœur me manquent d'ailleurs. Ici, je me retrouve seul et un coup de blues m'envahit.

Mais les nouveaux mariés ont bien le droit à une lune de miel en amoureux !

Après bien des péripéties, Caroline a épousé son Vince il y a trois jours et je reviens de cette escapade dans la mer Ionienne avec son visage rayonnant en souvenir. Il a fallu que je pousse un peu sa sœur dehors afin qu'ils profitent de leur nouveau statut sans une adolescente envahissante sur le dos ! Mais Sandrine n'est pas à plaindre. Son nouveau beau-frère l'a envoyée en vacances avec sa mère en Nouvelle-Zélande.

En gros, y'a que moi qui suit de retour à Paris en plein mois d'aout.

Pour le boulot en plus. Et je suis à la bourre. Mes neurones ont du mal à se reconnecter en mode « Responsable de la stratégie commerciale » ! Pourtant, la soirée qui se profile n'est pas déplaisante en soit. LFA, la boite de télécommunication pour laquelle je bosse, vient de gagner un appel d'offre assez improbable : développer une technologie plus performante pour la communication avec et dans l'espace. Nous allons travailler pour le Centre National des Études Spatiales. Chose que je n'aurais jamais envisagé avant qu'on ne me parle de ce projet.

Du coup, pour conclure en beauté notre nouvelle association, le CNES a organisé une soirée-animation durant laquelle il compte mettre en avant les dernières prouesses réalisées en termes de recherches spatiales. LFA est bien évidemment invitée et je suis en route pour rejoindre mes collègues là-bas. Cela fait plusieurs années que j'ai quitté les bancs de la fac et je suis surpris de me rappeler si bien du trajet. Ce soir, nous serons officiellement présentés à leur partenaire principal, SpaceSat, qui construit les satellites et les navettes spatiales et avec qui nous devrons collaborer. Ce sont leurs machines que nous équiperons en premier lieu avant de refaire une beauté à tout l'arsenal du centre, situé à Toulouse.

Alors que je m'engage dans la dernière ligne droite qui mène au campus, deux phares viennent m'éblouir dans mon rétroviseur. Deux ronds jaune vif qui se rapprochent à grande vitesse.

Bordel, un peu plus et ils me percutaient !

Je veux bien admettre que je ne roule pas avec beaucoup d'empressement mais quand même ! Là, au moindre freinage, le véhicule derrière moi me rentre dedans. Je déteste cette situation. Je suis bien plus concentré sur la voiture qui me colle au train que sur la route. C'est horripilant d'avoir quelqu'un qui vous met autant la pression en roulant aussi proche de vous. À la moindre erreur, nous finissons tous les deux dans le décor. Mes mains se crispent.

Qui a dit que les hommes étaient les plus dangereux au volant ?

Parce que le conducteur que j'aperçois dans mon rétroviseur me parait bien féminin. Et pressé. Un coup de klaxon me fait d'ailleurs comprendre que je gêne.

Ouais, j'avais pas compris avant faut croire.

Décidé à ne pas me laisser impressionner ni intimider par l'emmerdeuse qui fait des écarts sur la gauche pour bien montrer son empressement, je ralentis un peu, sourire aux lèvres. Je ne suis pas du genre casse-burnes pourtant mais bon, faut pas pousser non plus. Mon geste n'a pas l'air de lui plaire. Je me fais doubler dans un rugissement de moteur et je secoue la tête. Juste avant un virage à l'aveugle ! Et tout ça pour gagner quelques secondes.

J'entre dans le campus en zieutant l'heure affichée par le tableau de bord. J'ai quand même dix minutes de retard. Je ne sais pas si l'excuse « je reviens de vacances, je n'ai repris qu'aujourd'hui » serait très crédible. Je me dis surtout que je ne suis pas le seul à représenter LFA ce soir, heureusement. Je n'ai plus qu'à me faire tout petit en arrivant.

Tiens donc, ne serait-ce pas ma charmante conductrice impatiente ?

Je reconnais le véhicule. Une Fiat panda noire qui commence à dater. Et qui ne doit même pas avoir la direction assistée pour tout dire. En tout cas, elle s'engage dans le parking où je comptais me rendre, toujours à vive allure et avec une trajectoire bien limite. Trop heureux de cette coïncidence, je prends un malin plaisir à la suivre et à me garer juste à côté d'elle. En sortant, je fais le tour de ma voiture, m'appuie contre la carrosserie en croisant les bras et attend qu'elle se redresse.

Oui, je confirme, c'est bien une femme.

Elle est penchée à l'intérieur et semble chercher quelque chose. Je n'aperçois, pour le moment, que son postérieur moulé dans un pantalon de sport et qui se dandine sous mes yeux. Postérieur qui n'est pas désagréable à regarder. Et vu comme le tissu lui colle à la peau, je dirais qu'elle porte un string – aucune trace visible de sous-vêtement en tout cas.

— Je peux vous aider ? m'exclamé-je bien fort. Vous sembliez pressée tout à l'heure.

— Merde ! lâche-t-elle en se relevant brusquement et en se cognant le haut du crâne.

La demoiselle se retourne et me foudroie du regard. Je ne remarque alors que ces deux iris noires qui lancent des éclairs. Elle ne me répond pas, se contente de plisser les yeux et de se frotter la tête. Elle finit par grogner, passer un sac en bandoulière et claquer la portière.

— Bonne soirée, ne puis-je m'empêcher de la taquiner en la voyant me contourner sans un mot.

Petit gabarit mais forte personnalité a priori. Elle ne se retourne même pas et je souris. Sa queue de cheval se balance furieusement au rythme de son pas pressé. Donc, soit elle est vraiment en retard, soit elle est en colère. Ou les deux.

Bon, va falloir que je me bouge, moi aussi.

Parce que je ne suis pas en avance non plus ! Je traverse le parking et me dirige vers le seul bâtiment encore allumé à cette heure-ci. Je me rappelle de cet amphi. Des portes d'accès, de l'autre côté du bâtiment, sont situées derrière les bancs, face à l'estrade. Avec un peu de chance, les lumières seront baissées et je pourrais me glisser au dernier rang sans être remarqué. Je retrouverai mes collègues plus tard, à la fin de la présentation.

Finalement, j'arrive en pleine présentation, lumière éteinte, vidéo projetée et son à un volume aussi fort qu'au cinéma. Personne n'entend les portes grincer. Personne ne se retourne vers moi. Nickel. Et pour être sûr de ne pas attirer l'attention, je me faufile dans la dernière rangée, vide, et m'assois dans un coin, seul. Je n'ai plus qu'à me concentrer sur la présentation et le tour est joué.

Mais je ne dois pas être super captivé car j'entends l'une des portes derrière moi s'ouvrir. Je suis amusé de constater que je ne suis pas le dernier et je me retiens de me retourner. Pas la peine de prendre le retardataire en flagrant délit. Sauf que je suis bien surpris de voir une silhouette s'arrêter à mon niveau et venir dans ma direction. Une jeune femme s'installe sur le siège juste à côté de moi, son visage tourné vers l'écran. Ce n'est pas comme-ci le rang était blindé ! Il n'y a que nous deux.

— Désolée de m'imposer, murmure-t-elle en croisant les jambes. Je déteste paraitre insociable.

J'avoue que son comportement me fait sourire. Elle n'était pas obligée de se justifier. Faut croire qu'elle aime que les choses soient claires. Sa voix, un peu rocailleuse, m'a filé un frisson tout à fait inattendu et je profite de la semi-obscurité pour tenter de l'étudier mais je ne distingue pas grand-chose. Des lunettes, des cheveux ondulés qui tombent sur ses épaules et une jupe fendue sur le côté. La moitié de sa cuisse est ainsi mise à nue. Je relève les yeux pour les fixer sur la projection.

Concentre-toi un peu !


Try with love (terminée) [Sous contrat d'édition]Where stories live. Discover now