Chapitre 2 : Arrivée à Caen (2ème partie)

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L'heure de mon rendez-vous approche et je sens la nervosité prendre possession de mon corps. J'essaie de me convaincre que de rencontrer les grands responsables de mon possible futur employeur n'a rien d'extraordinaire. Je dois juste me souvenir des noms de chacun pour ne pas passer pour la dernière des idiotes. C'est alors que je me mets en quête de leur documentation. Je sais que je l'ai mise dans ma valise avant de partir. D'ordinaire, je n'ai une bonne mémoire mais je crois que le challenge me fait quelque peu perdre mes moyens. J'ouvre ma valise, j'y trouve mes vêtements mais impossible de mettre la main sur la documentation. Comment puis-je ne pas la retrouver ? Je l'ai tellement lue que je devrais être capable de la réciter par cœur. Seulement voilà, je suis dans l'incapacité de me souvenir de quoi que ce soit. Tout s'est effacé de ma mémoire, y compris la tête de ceux que je dois voir dans moins de deux heures. Je me pose mille questions et je commence à croire que je vais bafouiller et ne pas parvenir à dire ce qu'il faut au bon moment. Je dois absolument réussir ce rendez-vous. Au bout d'un temps qui me semble infiniment long, je finis par voir ma fameuse documentation. Elle semble me narguer sur la table basse du salon. Je ne sais pas comment elle a atterrie là et pourtant, elle est bel et bien sur cette table.

« Ne panique pas ! Tout va bien se passer ! Tu es celle qu'il leur faut, tu le sais. C'est pour cela qu'ils t'ont demandé de venir. Nous ne sommes qu'une dizaine en compétition pour ce poste. », j'ai tenté de me rassurer. J'ai connu des situations plus compliquées que celles-ci et ce n'est pas celle-là qui va me faire perdre tout mes moyens ! Hors de questions ! Alors pourquoi ne puis-je pas me détendre et envisager sereinement ce rendez-vous. Je n'ai qu'une idée en tête, parvenir à avoir le poste de mes rêves. Je ne me suis pas battue durant de longues années pour abandonner si près du but. Depuis le début de ma carrière en tant qu'assistante d'éditions, on m'a mis des bâtons dans les roues. Mes supérieurs ont toujours pensé que j'étais la reine des cruches. Tous ou presque m'ont dit que si je voulais réussir, il fallait que j'accepte la promotion canapé. Mais depuis quelques temps, je suis enfin parvenue à me faire respecter par mes paires. Ce n'est que lorsque j'ai imposé le roman plus que prometteur d'un best-seller comme ils disent les directeurs de collection m'ont vue comme une professionnelle et non comme une jeune et jolie jeune fille qu'ils voyaient telle une plante verte qu'autre chose. Je ne suis pas en porcelaine et je dois avouer que désormais j'ai une réputation de quelqu'un qui ne se laisse pas marcher sur les pieds.

Aujourd'hui, on me propose l'opportunité rêvée pour moi, un poste de directrice de collection !Pas n'importe laquelle non plus. La prestigieuse maison « Pomme Verte » a décidé de s'ouvrir à un plus grand nombre de lecteurs ou plutôt de lectrices car il s'agit bien de séduire la gente féminine. Ils m'ont dit vouloir acquérir un lectorat plus jeune. Je souhaite renouveler les styles et les codes littéraires. Certes, ce ne sera pas une révolution, mais j'ai envie de bousculer les habitudes et les codes. Avec une bonne équipe autour de moi, je sais que nous pourrons déplacer des montagnes et faire en sorte que notre travail soit reconnu voir craint par les autres.

Je me regarde dans le miroir de l'entrée et vérifie ma tenue avant de me rendre à l'entretien d'embauche. Je vais enfin faire la connaissance du grand patron. D'après ce que l'on m'a dit, il n'a pas un caractère facile. Il sera sûrement le plus dur à convaincre mais le pari n'est pas si compliqué qu'il n'en a l'air. Je sais qu'il est jeune, célibataire et sans enfant. « Il n'y a plus qu'à... », je me dis.

Ce que je vois me plaît. Je suis irrésistible (de mon point de vue) et mes doutes n'ont pas pris le pas sur mon enthousiasme. Le trajet vers le lieu de l'entretien n'est pas très long. Il est atypique car c'est un bar librairie. En le lisant, j'ai cru à un rêve. Pourtant en vérifiant sur le GPS de mon smartphone, j'ai vérifié l'adresse. Le rendez-vous avait bel et bien lieu dans un bar au nom prédestiné :« Le bar à Livres ». D'après ce que j'ai pu voir, le lieu est ancien et regorge de livres en tout genre. Des anciens au plus récents. Il est possible de les lire ou des les acheter selon les envies de chacun. Je sers fort ma documentation contre moi. Je me sens presque pousser des ailes. Rien ne me fait peur pour le moment. Mon téléphone vibre au rythme des nombreux messages que je reçois. Cependant, je ne les lis pas. Simple question de superstition ! Je pense que lire les encouragements de mes amis va me porter préjudice. Oui, je sais, c'est stupide mais j'ai réellement envie de décrocher ce poste de rêve.

Je vois le café dans ma ligne de mire. Je suis un peu en avance alors je me promène dans les environs pour faire connaissance avec cette ville qui malgré les destructions lors de la seconde guerre mondiale possède un charme particulier. Personne ne m'a dit dans quelle ville était le poste. La « Pomme Verte » possède une des antennes un peu partout en France. Parmi les villes, il y a Paris, Caen, Nice et Lyon. Une des spécificités de cette maison est qu'ils ont des collections dites régionales d'où la présence de succursales en Province. Je continue de rêver à mon futur lorsque l'alarme de mon téléphone me ramène à la réalité de ma vie. L'entretien commence dans moins de dix minutes et je ne dois pas être en retard. Mon avenir est en vois de changement et j'ai hâte d'y être ! Je presse donc le pas et suis de retour dans le bar.

Lorsque je franchis le seuil de la porte, l'endroit est plongé dans un silence quasi religieux et je n'ose pas demandé si les personnes en charge du recrutement sont arrivées. Je m'installe à une table et croise le regard d'un serveur. Il a l'air très absorbé par son plateau rempli de verres vides. J'ose à peine lui parler. Je le suis du regard lorsque je retiens mon souffle ! L'odieux personnage qui a gâché mon voyage en train pénètre à son tour dans le bar. Je n'ose plus bouger et me transforme en quasi statue de pierre ! L'homme ne me voit pas mais je l'entends crier au téléphone qu'il n'aime pas ce lieu de perdition (ce sont ses mots) !

Mon angoisse est gonflée à bloc. Je suis tétanisée par la peur de ne pas arriver à aligner trois mots d'affiler. Cet homme n'est pas humain et j'espère de tout cœur qu'il n'est pas chargé du recrutement. Mes rêves de travail en or semblent s'éloigner de moi... Je me retourne et je respire profondément en tenant de garder mon calme ou du moins de le retrouver !

Peine perdue, tout le bénéfice de mon exercice est parti en fumée lorsqu'une main froide et ferme s'est posée sur mon épaule. « Mademoiselle Lestrange Angélique ? » dit une voix que j'ai reconnu entre mille ! Voilà que mon cauchemar prenait vie. Mon rendez-vous, n'est autre que l'insupportable voisin de train ! J'ai répondu timidement « Oui » mais j'avais envie de m'enfuir. Très loin !!

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⏰ Last updated: Mar 08, 2018 ⏰

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