Chapitre 1

147 6 4
                                    

Une lumière intense perça l'épaisse couche de nuages et vint gentiment s'étaler sur la plaine. Elle inonda ensuite le visage de Nina, et ses yeux s'ouvrir peu à peu. L'enfant s'étira longuement, avant de se lever, joyeuse, à l'idée de débuter cette belle journée d'août.
Les vacances d'été ne tarderaient pas à s'achever, et pourtant, la douleur, elle, ne prendrait racine qu'aujourd'hui...
La petite s'acquitta de plusieurs tâches ménagères avant de se lancer dans une lecture passionante. Nina était une lectrice et écolière assidue, toujours curieuse des nouvelles conaissances qu'elle pouvait acquérir en cours, sans pour autant en oublier les rires avec ces camarades.
Plongée dans sa lecture, elle entendit à peine le téléphone sonner. Elle ne tendit l'oreille que quand sa mère, qui avait décroché, s'exclama :
- J'arrive tout de suite !
La fillette demanda alors :
- Maman, qu'est ce qu'il y a ?
- C'était Mamy. Elle a trouvé une lettre de suicide de ton Papy, qui est introuvable. Je vais les aider à chercher.
- J'peux venir avec toi ?
- Absolument pas ma puce. On se voit plus tard, répondit-elle, pressée.
Elle refermait déjà la porte derrière elle quand Nina voulut protester.
Toute une journée de doutes, de crainte, de têtes passant dans l'embrasure de la porte pour demander au père s'il avait des nouvelles. Rien. Le temps passe, les heures défilent, et toujours rien. Juste un silence radio. Étouffant, noir et sec. Lorsqu'on a dix ans on ne comprend pas ces choses-là. On ne sait même pas vraiment ce que signifie le mot "suicide". On sait juste que cela fait mal, quand tous en rond au salon, son père annonce à toute la famille qu'ils l'ont retrouvé, mort, au pied d'une falaise. Oui, il avait sauté. Il était allé au bout. La jeune fille courut se réfugier dans son lit, des larmes scintillantes ruisselant sur ses joues pleines. Les questionnements tournaient dans sa tête, confus, indistincts, sans doute à cause de la peine qui emplissait son âme : "mais comment a-t-il pu faire cela, seulement une semaine après notre voyage en Afrique tous les trois avec Mamy ? Comment a-t-il pu m'abandonner, moi, sa petite-fille fragile ? Il ne nous aimait pas assez..." Sa mère ouvrit alors doucement la porte et se faufila aux côtés de sa fille.
- On ne contrôle pas ces choses-là, elles arrivent et c'est comme ça, dit-elle la voix changée par les larmes. Il nous aimait beaucoup tu sais...

Il nous aimait...
Non, quand on a dix ans on ne comprend pas ces choses-là. Ce genre d'évenement nous marque à vie, sans même nous en rendre compte. La petite Nina rêvera pendant des années de son Papy adoré, pleurera bien des fois le soir seule dans sa chambre.
Non, le suicide n'enlève pas la douleur, il la donne juste à quelqu'un d'autre.

Sans-visageOù les histoires vivent. Découvrez maintenant