Quatrième feuille

357 47 8
                                    

Cette fois-ci, j'avais fait en sorte que tout soit prêt la veille.

La tasse sous la cafetière et les vêtements propres sur le couvercle de la panière à linge, dans la salle de bain.

Je m'étais même démoralisé pendant de longues heures en réglant mon réveil trois heures avant l'heure où je devais embaucher, au cas où.

Je n'étais pas à l'abri d'une panne de métro donc il fallait que j'aie suffisamment de temps devant moi pour y aller à pied.

En courant bien sûr.

Rien que d'y penser, j'avais passé tout mon après-midi échoué sur le canapé, ma jambe et mon bras droit pendant dans le vide.

Et je n'avais rien trouvé de mieux que d'arracher les poils de mon tapis pendant de longues heures.

Comportement cent pourcent désespérant.


Lorsque l'instrument du diable s'éveilla, je le calmais doucement bien qu'ayant une profonde envie de lui montrer mon point de vue sur la situation et je me trainais hors de mon lit, rampant littéralement dans la douche.

Le lion a tendance à muter en limace quand il juge qu'il est trop tôt, autant le dire maintenant, sait-on jamais.

La case douche se passa sans encombre et malgré mon envie de traîner car mon cerveau encore mou ne cessait de me rappeler que j'avais du temps devant moi, je gardais une avance raisonnable.

Le nez dans mon café, je tentais de faire l'inventaire des différentes choses qui pourraient ponctuer ma journée.

Et le 'Pourquoi moi' qui ne cessait de m'asticoter depuis l'appel, s'imposa de nouveau.

Il fallait que je tire ce point au clair avant que je ne parte le soir car il était évident qu'il y avait sûrement plus demandeur que moi dans cette histoire.


Mon café avalé, je vérifiais une dernière fois que ma tenue n'était pas trop débraillée et j'enfilais ma veste, quittant rapidement l'appartement.

Sur le trajet jusqu'au métro, je saluais comme à mon habitude la vieille épicière, qui attendait le client contre les étals de fruits avant de m'engouffrer dans les escaliers.


Contrairement à la dernière fois, ayant exactement quarante-cinq minutes d'avance sur mon heure d'embouche, je ne prenais pas la peine de consulter le panneau d'affichage pour voir dans combien de temps arrivait la prochaine rame.

Je me posais contre un mur, le regard rivé sur un point au hasard, mes doigts jouant avec le cordon de ma veste.

Cool Nils, profite bien mec, ce n'est pas souvent que ça arrive.


A son arrivée, je me glissais dans la rame, grimaçant comme à chaque fois lorsque l'odeur lourde de transpiration se colla à ma peau, prenant d'assaut mes narines.

Franchement, comment les gens pouvaient se débrouiller pour sentir autant avant huit heures du matin ?

L'une des innombrables pubs pour les déodorants s'imposa à mon esprit alors que les portes se refermaient et un soupir de désespoir m'échappa.

Si tout se passait bien, j'allais devoir prendre sur moi et mes principes pour m'habituer à cette routine, aussi désagréable soit-elle.


Cherry [BoyxBoy] ✔Où les histoires vivent. Découvrez maintenant