*Cale sèche*

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  -Où allons-nous capitaine ? Demanda la timonière qui pilotait le navire.

Deker était accoudé au bastingage et jouait avec un long couteau bien affûté. En même temps, qui tailladait légèrement la rambarde, il repensait à la sirène de la nuit dernière. Qu'est-ce qu'elle cherchait à faire ? Avait-elle quelque chose avoir avec cette esclave ? Pensa t- il.

-Capitaine ? Répétait-elle hésitante ?

-Mmh ? Mets le cape sur la première île que tu verras. Ce bon vieux rafiot a b'soin d'un ptit nettoyage.

-Bien capitaine.

Deker se promena sur le pont supérieur. Soudain, il s'arrêtait, furibond et exaspéré.

-Gibs ! C'est quoi ces tirs au flan ?! Qu'il se presse un peu, sinon ils vont recevoir des coups ! Siffla le capitaine. Sa langue claquait tel un fouet.

Iloé, qui n'écoutait pas ce que le capitaine hurlait, frottait le plancher comme on le lui avait ordonné. Ses mains tremblaient et sa vue se troublait due à la chaleur étouffante. Des gouttes de sueur tombaient sur le bois et s'évaporaient la seconde d'après. Elle essayait de se concentrer sur sa tache, mais sans succès.

-Il fait vraiment chaud aujourd'hui....

Elle se relevait et regardait autour d'elle. Pas de Mitrak en vue. Elle décidait alors de s'asseoir par terre et de souffler un peu. La jeune femme fatiguée ferma les yeux quelques minutes. Ça faisait deux jours qu'elle n'avait pas dormit. Entre temps, elle avait été malade lors d'une tempête qui s'était déroulée en pleine soirée. Iloé se rappelle encore des matelots qui se précipitaient pour sangler les canons et fermer les écoutilles. À certains moments, on aurait pu croire que le bateau sombrait ou même que la quille se brisait sous la violence des vagues.

-Debout esclave ! Maugréa une voix.

Iloé ouvrit lentement les yeux. Surprise, elle se relevait rapidement.

-Le capitaine vient s'envoyer deux hommes par le fond. Si j'étais toi, je travaillerais pour ne pas finir comme eux.

La gorge d'Iloé se resserra. Le capitaine n'a aucune pitié !

-Nous ferrons bientôt cale sèche, tu pourras astiquer la coque du navire avec les autres esclaves.

Iloé ne comprenait pas ce terme. Le mousse qui remarqua son incompréhension souffla puis dit d'un ton bourru.

-Bon continue à frotter. Et que ça brille !!

L'homme s'éloigna un peu, mais il garda toujours un œil bien veillant sur la petite esclave. Au bout de ces six bon mois, il avait appris à l'apprécier, il n'avait jamais eu d'enfant, mais cette petite était en quelque sorte la fille qui n'avait jamais eu. Il était certes mauvais avec elle, mais s'était pour son bien, afin que le capitaine ou autre personne aillant un quelconque pouvoir sur ce bateau n'ai à lever la main sur elle.

Deux heures plus tard, le bateau heurta violemment les récifs et s'échoua sur une île verdoyante. Iloé, dû au choc, tomba et valut un fous rire général. L'équipage mit pied à terre et amarra le navire. Ugly John, le maître voilier, ordonna à ses mousses de monter dans la mâture afin de remplacer les voiles déchirées et de réparer les cordages abîmés par la dernière tempête. Le maître canonnier, Aron , ordonna aux siens d'ouvrir les sabords et de nettoyer la couche de sel présente sur toutes les armes du navire, canon compris. Le quartier-maître en revanche organisait une battue pour tuer les rats du navire, de vraie saleté qui dévoraient les vivres et crottaient le planché. Pour certain, cette chasse aux rats était un jeu, pour d'autres en revanche s'était un vrai calvaire.

« Yo-ho hissé haut

-Le beau pavillon noir !

-Yo-ho crié haut

-V'là le capitaine au chapeau noir ! »

Des chants pirates, parfois barbares, fusèrent sur le navire. Les mousses chantaient durent leur dur labeur ou jouaient avec leur perroquet quand le temps leur permettait.

Le bateau avait fait cale sèche, terme qui était utilisé quand le bateau s'échoue volontairement. Maintenant que la coque était bien sèche, le calfat, Eliann, et le charpentier, Smitty, prirent une vingtaine d'hommes, dont Iloé, afin de gratter et d'enlever les algues, les coquillages et les autres animaux marins de la coque. Après deux heures de travail, Eliann ordonna aux hommes de passer un mélange sur le bois, «de l'étoupe ». C'est un mélange qui se met entre les lattes de bordé à l'aide d'un maillet et d'un couteau, ce mélange était utilisé pour mieux faire glisser le navire sur les eaux et de repousser les animaux de la coque. Les cales sèches devait être faites le plus souvent possible et lors des jours de beau temps. Le calfat et le charpentier étaient des artisans qui s'occupait majoritairement de l'état et de l'étanchéité de la coque. Leur présence sur un bateau était primordiale à cette époque. Quand Deker en éliminait un, il était immédiatement remplacé.  

****

  -Tu as terminé ?


Iloé assise dans le sable fut surprise d'entendre la voix du vieux Mitrak.


-La coque est grattée et huilée et les ponts ont été briqués.


-Tu vas v'nir avec moi chercher des provisions dans la forêt de cocotier.


Iloé regarda inquiète cette sombre forêt. Il y avait sûrement des bêtes plus grosses qu'elle comme des serpents des mygales et autres choses répugnantes.


-Sur cette île, il y a des cannibales. Ils ont mis des pièges un peu partout alors regarde ou tu mets les pieds. Je n'ai pas envie de v'nir te chercher. Et si tu profites de cette sortie pour t'enfuir, j'ai pour ordre de te tirer dessus, ordre du cap'taine.

*********
-Capitaine, tout le monde est à bord sauf quelques Mathurins (matelots) encore sur terre. Il ne devrait pas tarder à rapporter des vivres et de l'eau. Informe McLéod. Les voiles ont été changées, le sol briqué les canons nettoyés et la coque réparée.

-Capitaine si je peux me permettre, la marrée monte. Si nous ne profitons pas de cette occasion, nous resterons échoués sur cette île jusqu'à la prochaine marré haute. Intervient Nell.

-S'ils ne reviennent pas, ils serviront de repas à ces cannibales.

-L'esclave féminine est avec eux. Dit le seond.

Deker se retourna. Un air sévère passa sur son visage.

-Priez pour qu'elle revienne vite sinon vous irez la chercher. Dit sévèrement Valerens.

Deker s'éloigna des regards de ses hommes.

-Harlock !

Le perroquet noir venait se posé sur son épaule. Deker chuchota quelque chose puis l'oiseau noir s'envola en toute hâte.

Les mers d'un autre mondeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant