Deuxieme Impression

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Les secondes , me semblaient passer avec la même lenteur qu'ont les cours de sciences.

Peter et ma mère avaient pris place autour de la table à nappe rouge et rectangulaire au centre du salon

Alex , lui, n'avait pas bougé, il avait l'air tranquille, paisible presque, pianotant sur son portable.
Pourtant, je redoutais qu'il me fasse la moindre remarque, qu'il ne m'adresse ne serai ce  qu'une parole de biensaience. Un simple "bonjour" m'aurait pétrifié, un "comment vas tu ?" m'aurait achevé...

M'intéressant à la décoration de la salle à manger, plutôt qu'à l'attitude de leur propriétaire, je réalisais qu'elle était bien plus personnelle que celle dans laquelle nous séjournions.
Portraits de familles mettant en scène Peter, son fils et son épouse, nombreux souvenirs de vacances, coquillages peints et dessins  d'enfants accrochés aux murs . Cela ne faisait aucun doute, la famille Gaskarth habitait ici.

Fatigué d'émettre d inutiles hypothèses sur des gens que je ne connaissais même pas et m'ennuyant maintenant à l'extrême, je suppliais  ma mère des yeux, lui offrant  le plus triste de mes regards de chien battu . Elle était cependant bien sur, trop occupée à boire les paroles de son hôte ainsi que la flûte de champagne qu'il lui avait servit pour venir à ma rescousse.
C'est son présumé amant  qui s'aperçut de ma détresse  :

"Hey Alex! , l'appela son père, Pourquoi ne montrerais tu pas ta chambre à Jack ?"

L'intéressé détacha lentement son regard de l'écran avant de m'adresser un sourire en coin et de se lever :

"Bonne idée ! Tu me suis ?" me proposa t il, d un ton enjoué qui me semblait exagéré et  m'inspirait tout sauf de la confiance.,

C'était une mauvaise idée, et je ne  le savais que trop bien .
En dix minutes, ce garçon avait réussi à faire de mon après midi un calvaire , et à me débarrasser du peu d'amour propre qu'il me restait. J'avais pourtant accepté, le regard pesant de nos parents et l'absence d'excuse pour décliner l'offre m' y contraignant.

Alors  suivant les pas de mon bourreau, je montais les marches de l'escalier en bois sombre  recouvertes d'un tapis rouge.
J'avais comme l'impression que je payais pour tous mes pêchés, que le diable en personne m'emmenait dans son entre dont la porte était tapissée d'inscriptions "keep out"  et de têtes de morts... Cliché, quand tu nous tiens...
Le dit démon me laissa pénétrer avant de me suivre et de nous enfermer, il brisa le silence que nous avions respecté jusqu'ici :

"Alors, elle était bonne ?"  me demanda t il, son sourire arrogant toujours planté sur ses lèvres.

Il eut pour seule réponse de ma part un regard dédaigneux. Les gens de son espèce cherchaient ils ma colère ? Mes pleurs ? Mon attention ? Ma peur ?
Quoiqu'ils souhaitaient, ils n'obtiendraient rien, je resterai stoïque.

"Aller ! Ne le prend pas comme cela Jack ! C'était pour rire..."

C'était toujours "pour rire" avec les adolescents, c'était "pas méchant". Se rendaient ils seulement compte du mal qu'ils faisaient autour d eux ? Des egos qu'ils brisaient ? Certains en arrivaient à se donner la mort tant ces "simples boutades" avaient affecté leurs quotidiens.

"Jack ?" insista Alex

M'empêchant de lui répondre par une gifle, je sentis la poche de mon jean vibrer :

Un nouveau message de Oliver soleil de ma vie :

Hey ! C'est comment ta soirée ?

"Qui c'est ?" s'enquit le décoiffé

"Ta mère, elle veut savoir si j'suis libre ce soir... "
répondis je, machinalement. J'aimais quand c'était ainsi, que les bonnes réponses me venaient au bon moment, c'était tellement satisfaisant que j'en tremblais presque.

"en attendant, la tienne est à fond sur mon daron..."  rétorqua t il.

je l'avais peut être cherché, mais me rappeler que ma présence en ce lieu était due à l'infidélité de ma mère fut la goutte d eau qui fit déborder le bassin dans lequel j'avais été poussé.  Mettre un coup au visage d un  garçon qui me dominait physiquement n'était peut être pas l'option la plus judicieuse que j'avais . Pourtant, aucune autre  ne me vint sur le moment. De plus, mon ego bafoué réclamait réparation.
J obéis donc à mon instinct, et, oubliant ma règle d'ignorer les connards je sentais sa joue sur mon poing.
Un instant après, à nouveau maître de ses esprits, il fit disparaître son air joueur pour me montrer quelque chose d'effrayant, un visage de pure colère comme je n'en avais jamais vu.
Les yeux déformés par la rage, il m'attrapa le poignet dans le but de me rendre le coup, sûrement bien plus fort .
Je priais. Je n'étais  pas croyant, pourtant je peux vous dire que j'implorais toutes les divinités que je connaissais, de Ryan Ross à Gerard Way.
Dans la taverne du diable, les prières peuvent elles encore être exaucés ?
Y a t il toujours moyen d'être sauvé ? L'espoir est il toujours présent ?
En ce jour, j'eu la preuve que le large front de Brendon Urie devait veiller sur mon humble personne.  Quelqu'un frappa à la porte, interrompant mon opposant dans son acte de violence.
Il me lâcha et son  visage se radoucit, puis il invita l'importun d'un

"entrez"

Son père ne se le fit pas dire deux fois, et échangea quelques mots avec son fils.
Ne possédant ni la capacité de lire sur les lèvres ni une ouïe sur développée, je ne parvins à comprendre.
L'échange ne fut que de courte durée, et la porte se fit vite claquer.
Alex me sourit. Ce n'était pas un sourire moqueur, ni même sincère. Il y avait quelque chose de triste sur son visage, de la mélancolie dans ses yeux.

"Désolée Jack, mais je crois bien qu'il y a vraiment quelque chose entre eux deux..."
me dit il, sans quitter le sol des yeux, la violence qui les animait avait disparu su rapidement, j'en étais confus...

Devant mon absence de réponse, il releva la tête et ajouta :

"crois moi, ça me fait autant chier que toi.."

"je m'en fiche..."
me décidais je à répondre. Et devant son regard incrédule, j'ajoutais "si ils sont heureux... Qui suis pour dire quoique ce soit ?"

"Et si jamais  ils s'installaient ensemble ?" insista t il

"Grand bien leur fasse..." déclarais je, sans vraiment me soucier de ses mots, "Ils vivraient heureux ensemble. Quel serait notre mot à dire là dedans ? "

"On vivrait ensemble..." statua le décoiffé.

Réalisant ce que tout cela signifiait, je réfléchissais. Je pouvais toujours vivre chez mon père... Mais ma mère n'abandonnerai pas ma garde, et puis, bien que je la haïssais après qu'elle m'ait force à me rendre à ce fichu club, je ne pouvais m'empêcher de l'aimer.

"On devrait faire quelque chose" proposa t il

"Oui, les laisser tranquille !"
Répondis je, résolu à agir en adulte. Que comptait il faire ? Ruiner leur relation ?  C'était, en plus d'être d'une puérilité sans pareil, bête et méchant.

"Que t'as dit ton père ?" changeais je de sujet.

"Ils vont au resto, nous aussi, on a le droit à notre petit tête à tête"

WeightlessWhere stories live. Discover now