Partie 3. Chap 2. Le jour s'est levé.

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Pour le chapitre suivant, je tiens à vous prévenir que je ne suis ni anthropologue, ni connaisseur dans les tribus aborigènes d'Australie. J'ai fait de nombreuses recherches, regardés quelques documentaires, mais forcément mon récit n'est ni entièrement vraie, ni totalement approfondi. Cependant, j'ai essayé de faire au maximum pour pouvoir retranscrire ce que j'ai appris afin de donner à l'histoire un sens beaucoup plus concret sans trop tomber dans le détail.

On a marché. C'était long. C'était chiant. Il faisait chaud. Je souffrais le martyr. Mais on a continué, parce qu'on tenait à la vie.

Les minutes sont devenu des heures. Et les heures des jours. Je n'en voyais pas le bout. Mike non plus. Le pauvre. Il a du me gérer aussi, tu sais? Entre mes vomissements et mes migraines, ça n'a pas été facile. J'ai voulu qu'il arrête de se soucier de moi, mais il a refusé. Quel con.

Mais finalement après de nombreuses souffrances, quand on commençait à manquer d'eau et après avoir usé la moitié de mes médocs', enfin, on trouva la tribu.

C'est une autre vie. Pas du tout le même environnement. Pas du tout la même façon de vivre, de penser. Déjà ils ne parlaient pas anglais. Mike parle un peu le Wati, ce qui nous a permis d'avoir un semblant de communication, mais sinon on s'exprimait par geste. J'ai quand même réussi à apprendre quelque mots là bas, tu sais?

Quand ils nous ont vu arriver, ils se sont d'abord méfiés. Ils ne voulaient pas nous laissé rentrer. Mike a tenté de leur expliquer que j'étais malade, que j'avais besoin de repos, mais ils refusaient de faire quoique ce soit avant le retour des hommes qui étaient parti à la chasse.

Sauf que ce putain de cancer n'avait pas finit de me pourrir la vie. Je me suis mit à vomir du sang devant toute la tribu. Le cancer est un salaud. Le soleil est un connard. La vie ? Une salope. J'en avais marre de ça.

N'empêche que mes vomissements les ont fait réagir. Ils m'ont emmené dans la tente de ce que je crois être un homme qui fait figure de chaman, sans en être un. Plutêt le précepteur de la tribu, celui qui enseigne et conseil. Une sorte de sage.

Je dois avouer que les femmes la poitrine à l'air avec des peintures blanche sur tout le corps, même le visage, avec pour seul vêtement une sorte de drap, ça m'a plutôt mis mal à l'aise. Mais elles ont eu vite fait à m'allonger sur un tapis dans une sorte de grande hutte comme on en trouvait au temps des gaulois. C'était des murs de terres et de bois mélangés, avec au-dessus des sortes de branches, ils vivaient à plusieurs dessous. Sans être Le Ritz, c'était assez confortable. Quand on a que ça, on s'en contente. Même si, je dois avouer, je m'attendais à pire.

J'imagine encore la tête que tu aurais fait si tu étais venu avec nous. Toi mon homme qui aime tant son lit douillet, sa vie bien tranquille et son café le matin. T'aurais été déçu.

Mais tu vois, même si rapidement les médicaments sont venu à manquer et que la douleur était de plus en plus forte, ce fut une des expériences les plus formidables de toute ma vie.

Imagine toi, danser le jour et la nuit, avec pour seul vêtement un pagne rouge, avec autour de toi des hommes avec des peintures blanches sur tout le corps. Imagine toi, assister au mariage de deux êtres venant d'une tribu différente, avec autour de toi des gens habillés de toute les couleurs, des peintures à ne pas en savoir le nom et chantant toute la journée. C'était ça, le but de ma vie. Découvrir le Monde. Découvrir Autrui. Découvrir comment d'autres voient la vie.

C'était merveilleux. J'ai passé le mois le plus magnifique de toute mon existence. Je sais bien que tu aurais détesté, mais moi, en tant que musicien, mais avant tout en tant qu'être humain, c'était l'expérience la plus belle qu'il m'ait jamais été donné de voir.

Laisse moi te raconter un soir où ils célébraient un jour religieux. Il y avait un feu, puis les hommes ont commencé à se mettre devant le foyer. On était tous en rond, on les regardait. Soudain, des tambours ont commencé à taper en rythme, avec des sortes de maracas pour les suivre, le rythme s'est accéléré, avec plus de maracas. Des tambours jouant un autre rythme plus cadencé et plus rapide s'y sont mis, suivi de l'instrument typique des tribus, je crois que Mike appelait ça le Didge... un nom compliqué. Toujours avec les mêmes rythmes joués derrières, l'instrument reprenait de plus belle, plus longtemps avec des notes plus recherchées, puis s'arrêtait. Il reprenait avec une autre mélodie et les tambours et les maracas continuaient derrière. Il s'arrêta encore une fois, pour reprendre la même mélodie, mais cette fois sur le même rythme que les tambours et les maracas. Bientôt, il reprit son rythme initial, mais les hommes commencèrent à danser en chantant, enfin c'était plus des sons qu'ils émettaient. Des sons très grave qui donnait à la scène une dimension à la fois angoissante et époustouflante. C'était magique, j'aurai pu les regarder toute la nuit, ils te donnaient envie de danser comme si ta vie en dépendait. Toute la célébration te plongeait dans une certaine transe qui était à la fois splendide et angoissante.

J'aimais ça, c'était de l'Art, à l'état pur, l'expression sincère d'un peuple qui a évolué différemment. C'était beau.

Le cancer a commencé à me défoncer la santé de plus en plus. Chaque jour était plus douloureux que le précédent. Les villageois ont commencé à s'inquiéter pour moi. Le chaman pratiquait des sortes de rituels pour soulager la douleur et me fabriquait des boissons qui était sensées m'apaiser. Au début, ça avait de l'effet, mais ça ne suffisait plus. Le cancer me tuait, petit à petit il était en train de venir à bout de moi.

Je perdais, David. Ce pourquoi je m'étais tant battu, tout ça partait en fumée. Je pouvais rien y faire, j'était impuissant. J'étais à la fois spectateur et acteur de ma propre mort. J'en avais marre.

Tu sais, David. J'ai souhaité mourir. Oh oui ! Plus d'une fois je l'ai souhaité. Souhaité avoir une mort directe sans douleur, plutôt que de subir ce cancer. Mais après, je me ressaisissais, et me disais que si j'avais une date, c'était parce que j'avais quelque chose à découvrir.

Maintenant que je t'écris à l'approche de ma mort, je crois que j'ai trouvé ce que je devais découvrir, David. La vie. Je devais découvrir la vie.

Je l'ai fait, malgré la douleur, quand j'ai compris que je ne quitterai pas la tribu, j'ai fait un maximum pour apprendre leur art, leur religion, leurs coutumes.

Un soir je me souviens, ils m'ont même laissé chanter une chanson. Je me rappelles encore, c'était "On My Own" de la comédie musicale des Misérables. Tu te souviens combien j'adore cette chanson ? Tellement d'émotions et de puissance sont exprimées à la fois en quelques minutes. Je crois qu'ils avaient appréciés. J'espère, du moins.

Mais tu vois, sans suivi médical et surtout sans médicaments pour ralentir cet emmerdeur de cancer, j'étais de moins en moins en état de tenir debout. Alors après quelques semaines, comme j'étais de plus en plus malade, je fut obligé de rester dans mon lit les 3/4 du temps. Je me sentais affaibli, presque mort.

Peu à peu je n'arrivais plus à me lever, la douleur dans mon corps était devenue insoutenable, quand je faisais de trop grands efforts j'avais d'énormes migraines, et quand je restais trop longtemps exposé au soleil, je vomissais, souvent du sang.

D'après le docteur, il me restait six mois. Six putain de mois à vivre. Que des conneries. Quand j'ai franchit le cinquième mois, ma mort était proche. Je ne pouvais plus me lever, je restais allongé toute la journée, et les douleurs étaient horrible, si bien que je ne dormais plus.

C'est pourquoi, quand j'ai senti que je ne pouvais plus tenir, j'ai décidé qu'il était temps de t'écrire, David, pour t'expliquer. Pour t'expliquer les raisons qui m'ont poussé à devenir la personne que je suis au moment où j'écris ces lignes.

Alors, ce matin, quand le jour s'est levé et que j'ai pensé à toi, quand j'ai imaginé ton visage me souriant, me disant combien tu m'aimes, j'ai comprit que c'était la fin. J'ai comprit  qu'il fallait que je te dise aurevoir, une dernière fois.

Et voilàààà! Plus qu'un chapitre et c'est la toute fin! Désolé tout le Monde. Je sais, cette histoire aura été courte, mais j'ai essayé d'etre assez réaliste, parce que Greg est en train de mourir donc il n'est pas dans un état où il peut écrire un roman et en plus il a très peu de temps pour s'expliquer à David. Voilà voilà.
Bon, pour la description du rituel musical, c'est la description de cette musique, qui est une réelle chanson d'indigènes australiens: http://www.youtube.com/watch?v=GLD3UecYvy0




Je t'attendrai.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant