Chapitre 9.2 - Les Pizers

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Dans le chapitre précédent :

« Que me vaut cette nouvelle visite Commandant ? demanda-t-il en se plantant en face d'Adonis.

– Nous avons d'autres questions à vous poser, » m'exclamai-je à sa place.

Sebastian se retourna vers moi avec les sourcils froncés. Il me regarda de haut en bas et je pus voir ses yeux sombres s'agrandirent sous le désir.

« Soit, dit-il en s'installant sur un fauteuil. Posez vos questions rapidement ma Dame. »

Je me rassis, mais avant de parler, les portes s'ouvrirent de nouveau.

***

Une femme plus âgée entra dans la pièce. Sa robe aux couleurs chatoyantes englobait bien ses formes. Ses yeux me transpercèrent. Elle n'était pas du tout docile comme femme. Au contraire, son regard était colérique. Figée, j'avalai ma salive. Éloïse Pizers me donnait la chair de poule rien qu'avec sa présence.

« Commandant en chef, c'est un plaisir de vous revoir... Mais il me semblait déjà avoir répondu à toutes vos questions ? dit la mère, le menton toujours levé.

– C'est exact. Nous sommes désolés de cette venue soudaine, mais une enquêtrice venue de l'étranger est venue nous aider dans cette affaire, » se justifia Adonis.

Une pointe de joie m'envahit quand j'avais entendu ses paroles. Je prenais un peu plus de place dans ce monde et surtout auprès de lui. Mais encore, peut-être que les mots de mon amant n'étaient que mensonges. Je ne savais pas...

« Une femme ?

– Oui, je serais d'une bonne aide, répondis-je avec un sourire crispé. Étant donné que je n'étais pas présente lors des premières interrogations, j'aimerais poser quelques questions à votre fils si cela ne vous dérange pas ? »

Je pouvais presque entendre les mouches voler après ma déclaration. Agathe avait même retenu sa respiration sous le choc. Je me retenais de rouler les yeux. Cette scène aurait été vraiment comique dans un film, mais ça n'en était pas un. Je fis un sourire poli en attendant que chacun est passé le cap du choc.

Après quelques secondes, le regard de Madame Pizers était encore plus meurtrier qu'avant. Elle pouvait définitivement être une femme-bête. Ça ne m'étonnerait pas si c'était le cas, mais encore fallait-il le prouver. J'arrêtai de divaguer et me tournai vers le fils de la famille.

« Vous êtes médecin, n'est-ce pas ? Je voudrais savoir si vous emmenez vos outils de travail dans les bars que vous fréquentez ou chez les jeunes femmes avec qui vous couchez ? »

Peter recracha le café dans la tasse. Adonis grinça des dents. Un son fin, mais dérangeant. Agathe mit sa main devant sa bouche alors que la mère Pizers avait lancé un cri outré. Sebastian, lui, resta hébété face à mes questions.

Peut-être que j'y étais un peu trop fort... Mais nous avions assez perdu de temps. Si ces personnes n'avaient rien à voir avec les meurtres, il restait au moins deux autres familles aristocrates à visiter. Ce qui ne m'enchantait pas.

« Comment osez-vous ? s'écria la mère.

– Ces déboires sont connus de tout le quartier. Je ne fais qu'énoncer l'état des faits, mais je voudrais bien une réponse.

– Il est hors de question qu'il réponde à ces accusations grotesques !

– Oui, murmura le jeune homme.

– Quoi ? demanda, outrée, la mère. Que racontes-tu ?

– Je vais bien les voir en tant que médecin, annonça Sebastian en dépit du regard meurtrier de sa mère.

– C'est-à-dire ? questionnai-je, curieuse.

– Je les soigne.

– En leur injectant quoi dans les veines ?

– Un tranquillisant.

– Où ?

– Cela suffit ! »

L'exclamation d'Eloïse me fit mal aux oreilles. Avec un regard noir, je la dévisageai. Énervée, les poings serrés et le visage rouge, elle semblait sur le point de me tuer avec ses mains. Je restai néanmoins calme. Elle ne m'impressionnait pas tant que cela, mais avait une aura de rage autour d'elle qui n'incitait pas à s'approcher de sa personne ni même à devenir son amie.

« Comment osez-vous lui poser toutes ces questions ?! Vous n'avez aucun droit dans cette demeure. Et vous ! cria-t-elle en se tournant vers Adonis. Comment pouvez-vous la laisser nous humilier ainsi ?! »

Adonis commença à parler, mais je ne l'écoutais plus. Il devait sûrement s'excuser pour mon comportement. Et le pire était qu'il allait devoir s'excuser à nouveau après ce que j'allais faire.

Je pris discrètement dans ma main la dague cachée contre ma cheville droite, et retirai mes ballerines. Avec ma longue robe bouffante, personne ne voyait ce que je faisais. Je devais retrouver ces fameux tranquillisants et le seul plan que mon cerveau avait concocté était risqué, mais assez amusant.

« Agathe, chuchotai-je en lui tendant ma dague. Coupe la robe en commençant par-derrière. »

Ses yeux ne montraient que choc et aversion.

« Mais c'est une magnifique robe de l'époque ! Comment veux-tu que je coupe une telle merveille ? murmura-t-elle, désespérée.

– Ne fais pas ta sentimentale maintenant s'il-te-plaît, et coupe-moi ce satané tissu !

– Pardonne-moi, jolie robe. »

Je roulai des yeux à ces paroles, mais souris une fois le son du vêtement déchiré à mes oreilles. Eloïse continuait de vociférer tandis qu'Adonis et Peter tentaient de la calmer. Sebastian avait même réussi à s'endormir. Heureusement qu'il avait beaucoup bu la veille, car sa langue s'était déliée pendant mon interrogatoire. Ce fut un court entretien, mais cela m'avait suffi à comprendre certaines choses.

Si je retrouvais les fioles de ce tranquillisant, je pourrais prouver que c'était lui le coupable. Lui qui changeait ces femmes en monstres. Lui la cause de tous ces meurtres.

Dès que mon corps fut relâché de l'emprise de la robe moulante. Je me levai et retirai par le bas le reste. Il ne me restait plus qu'une robe fine sur le corps. Tout le monde me regarda avec de grands yeux et c'était ce moment que je choisis pour courir vers les grandes marches de la demeure qui conduisaient au premier étage. Avec toutes ces portes et chambres, il me serait si facile de me cacher.

"Mais que faites-vous ?! Qu'on la rattrape !" vociféra Eloïse à ses domestiques.

J'entendis de nombreux pas derrière moi, mais continuai à avancer en ouvrant quelques portes au hasard. Nombreuses d'entre elles donnaient sur des chambres alors que d'autres étaient des placards à balai. Je laissai quelques portes ouvertes pour faire croire à mes poursuivants que j'étais à l'intérieur. Mais en réalité, je continuai ma course pieds nus sur le parquet ancien et certainement coûteux.

Une fois assez éloignée, c'était avec tristesse et solitude que je me laissais aller contre la porte d'une chambre. Je n'avais plus qu'à attendre que les majordomes et domestiques s'éloignent. Ainsi je pourrais explorer ce manoir.

Les Changeurs de Destins - GrimviceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant