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-Mardi, fin de journée.

Les bras enroulés autour de mes jambes, assis sur l'herbe, le front posé sur mes genoux, je pleurais. Sans interruption. Je laissais évacuer toutes ces émotions qui me rongeaient. La douleur, la peine, la souffrance, la rancœur, la colère. J'avais l'impression de ne faire que ça : évacuer. J'étais un panaché de sentiments dévastateurs et je n'arrivais pas à reprendre le dessus. Tout s'emmêlait : les aveux d'Erik, les mots de Jey, le caractère à la con de Fay. Je n'affrontais clairement pas la situation, je la fuyais : mais c'était la meilleure chose à faire.

Une main se posa alors sur mon épaule mais je ne sursautais pas, je ne bougeais pas. Je savais qui était là. Les frissons qui me parcouraient aidaient. Mon ventre se serra et je me recroquevillais un peu plus. Faites qu'il parte. Je ne voulais pas le voir. Pas maintenant. Ni demain. Ni dans dix ans. Plus jamais. Je l'entendis s'asseoir à côté de moi et mes mâchoires se contractèrent. Bordel. Sauf que je ne bougeais pas. Je resterai là, c'était mon endroit, mon enfance. Mais aussi là où nous étions rencontré. Je serrais les dents. Évidemment qu'il allait comprendre. Il comprenait toujours tout, même après un an.

- Pourquoi ici ?, murmura-t-il et je pariais qu'il regardait la forêt.

- C'est mon enfance, répondis-je d'une voix brisée. Ma maison, mon territoire. Alors va-t-en.

- Tu n'es pas revenu depuis un an, répliqua-t-il en s'appuyant aussi contre le chêne dans notre dos.

On tournait le dos à la maison, le corps tourné vers la forêt et le lac qui s'y trouvait derrière. Je n'avais pas lancé un seul regard à la maison mais je savais que mes parents n'y étaient pas. Ils y passaient le moins de temps possible. Je soupirais et relevais doucement le visage, sentant son regard se tourner vers moi. Mais je gardais les yeux rivés droit devant moi. Je ne pouvais pas l'affronter, pas de suite.

- Je me suis embrouillé avec mes parents. Ils n'en avaient que pour Charly et je ne le supportais plus. Je leur ai balancé que je me tirais dans un camp avec Gô comme entraîneur. Ma mère m'a cru mais mon père savait la vérité. Ils m'ont supplié de rester, de réparer mes erreurs et d'aider Charly. Je crois que c'est là que j'ai lâché prise. J'ai abandonné et je leur ai simplement dit que je ne voulais plus les voir pendant un moment, plus leur parler. Qu'ils ne comprenaient strictement rien et qu'au final, seule leur fille leur importait. Ils ont été blessés, mais bien moins que moi. Depuis, je ne suis pas revenu. J'ai dû leur envoyé trois messages en un an. Seule Charly me parlait et encore, c'était ultra tendu. Jusqu'à deux bonnes semaines, on s'est accroché violemment et depuis, silence radio. Il faudrait que je lui envoie un message quand-même.

- À tes parents aussi, ils t'aiment toujours, rajouta Jey sans s'attarder sur mon monologue, chose que j'appréciais.

- Ils n'ont que Charly à la bouche.

- Peut-être, mais tu es aussi leur enfant. Pardonne leur, ils ont dû changé depuis.

- Ça m'étonnerait, répliquais-je en soupirant. C'est comme ça depuis toujours.

- Sauf que maintenant, ils n'ont plus leurs enfants à la maison, tout a pu changé.

- Pourquoi tu les défends ?, soufflais-je alors en fermant les yeux, inspirant doucement.

- Je ne sais pas. J'essaye simplement de t'aider à retrouver un semblant de bien-être.

- Wow, charmant, ricanais-je en secouant la tête. Tu devrais partir en fait.

- Je suis le seul à savoir que tu es là, lâcha-t-il après un léger silence.

- Super pour toi.

Je ne devrais pas - Chasseurs D'ombres T2Where stories live. Discover now