Chapitre trois : La grande cité noire.

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Quand Hydron ouvrit les yeux, son regard tomba sur un plafond blanc étincelant, et des tuyaux pendant de son côté gauche. Il sentit un masque respiratoire sur son visage, et quand il essaya d’inspirer, il sentit une violente douleur dans ses poumons et toussa, les toussotements lui brûlant la gorge. Ses yeux le piquaient de façon continue tant qu’ils étaient ouverts et sa vision était floue comme s’il était sous l’eau. Il essaya de bouger son bras, mais la douleur le paralysait tant elle était ardente. Il essaya son autre bras, sa jambe, son autre jambe. Mêmes  résultats s’imposaient à lui. Il referma les yeux, se concentrant sur la sensation d’objets touchant son corps. Il avait appris à faire ça en se remettant des blessures infligées pas la torture de son père. Se concentrant, laissant son impulsivité de côté, il ressentit son environnement. Il était allongé sur une surface molle en contact avec son dos, probablement un lit. Sa peau frottait sur une espèce de tissu poisseux, il en déduit qu’il avait saigné abondamment et qu’on avait stoppé les hémorragies. Mais à part les supposés bandages, il ne sentait qu’un drap léger sur son corps. Passablement perturbé, mais pas au point de l’empêcher de se rendormir, la fatigue l’assommant.
   Plusieurs jours défilaient, se ressemblants tous, ses blessures guérissant très lentement, bien plus lentement qu’il ne l’aurai cru. Il avait pu, après quelques jours, tourner la tête à gauche, ce qui lui avait permis d’apercevoir Néo allongé sur le lit juste à côté, lui aussi couvert de bandage, et inconscient. Ses cheveux roux étaient gras et brillants, dispersés sur un oreiller. Il avait lui aussi un masque respiratoire, relié à une machine grise comportant deux grandes bonbonnes. Hydron  en déduit donc qu’il était dans ce même cas et que Lync, lui aussi probablement dans la pièce, aussi. Il ne savait pas où il était exactement, ni pourquoi. Cette chambre d’hôpital suintait d’une énergie étrange, mystique. Il hésitait entre rassurant et inquiétant, cette énergie perturbante ondulant sur son corps et les meubles.
Il retrouvait peu à peu l’usage de ses membres, douloureusement. La douleur persistait dans tout son être et il en grimaçait tellement chaque mouvement, même le plus infime, lui faisait subir une lente agonie. Il voyait des tâches lumineuses danser sous ses paupières, à chaque inspiration, à chaque minuscule déplacement d’un de ses membres. Il restait donc les yeux clos, le plus immobile possible, le frottement du drap contre sa peau nue comme seul repère pour se convaincre qu’il était encore vivant.
Perdu dans sa lente agonie, il entendit à peine les pas de la personne qui venait d’entrer dans la pièce. Un claquement léger et régulier de talon aiguille martelait le carrelage. L’atmosphère se fit pesante, l’air était comme happé par une quelconque force. Difficilement, il entrouvrit un œil et vit une femme, floue due à l’état de sa pupille, aux cheveux violets, à la peau diaphane et à la présence pesante, près du lit de Néo. Son ouïe développée à force d’écoute saisi des bribes d’un monologue. << Pourquoi ne...réveille..., fils ?
… père … toi seul… hériter… Alice… gardienne… >>
Il fut bien heureusement assez discret pour ne pas se faire repérer et attendit que la femme sorte. Au lieu de cela, une jeune demoiselle vêtue d’une tunique brune claire entra en trombe dans la pièce, ses cheveux tressés volant à sa suite. Elle parlait vite, parlant d’une découverte, d’un cobaye, et de subterra. Il sentit un peu de glace se planter dans son cœur quand le regard émeraude de la grande dame se posa sur lui. Il frissonna mais les deux femmes ne semblaient en avoir cure. Il referma les yeux et enregistra minutieusement les informations dans sa tête.
Kimiko attendait au lieu de rendez-vous, caressant un écureuil roux comme les cheveux d’Alice qui était venu se loger sur ses cuisses. Pensive, elle vit à peine la luciole bleutée voleter autour d’elle tel un feu follet. Quand elle se posa sur son épaule gauche, elle tressailli  légèrement. Elle n’aimait pas le contact de ces êtres magiques. Ils étaient pour la plupart à la solde des gardiennes pour surveiller les novices. Et les novices ne sortaient pas avant d’avoir passé leurs examens de gardienne normalement. Règle qu’elle ignorait tout bonnement en se baladant entre les mondes comme elle l’entendait.
Interrompue dans ses pensées par un craquement de brindille, elle releva la tête et aperçu son frère accompagné des combattants arriver au loin. Elle continua de grattouiller l’écureuil en regardant le groupe d’adolescents arriver. Une fois à portée de voix, elle se leva en faisant monter  le petit rongeur sur son épaule gauche. Alice avança et serra Kimiko dans ses bras, chassant la luciole bleue de son épaule. Après une rapide explication du pourquoi du comment du tournoi inter planètes, elle ouvrit le portail vers le lieu du tournoi. Il débuterait dans quelques jours, le temps que tous les candidats se soient libérés de leurs obligations et arrivent sur place.
Quand ils posèrent les pieds de l’autre côté du portail, les combattants furent surpris par les bâtiments, noirs comme le ciel. Les structures faisaient penser à Darkus, suintant l’obscurité et les ténèbres. Le soleil mauve apportait cependant la chaleur d’un vrai soleil, ainsi que la lumière, sans brûler les yeux des imprudents qui osaient le regarder en face. Les pavés semblaient être faits d’obsidienne sertie de minuscules pierres violettes scintillantes. La vie se ressentait dans cet amas sombre de pierre, l’air était léger et ne pesait pas sur les épaules. La grande place sur laquelle ils étaient apparus possédait en son centre une grande fontaine où trônait des orbes aux couleurs et symboles des éléments des bakugan. L’eau bleue et violette coulait dans un bruit agréable, accompagnée par une brise musicale et des éclats de lumière qui étaient projetés depuis la pierre grise qui constituait l’armature de la fontaine, le tout éclairé par des torches enflammées.
Kimiko s’était écartée pour parler avec Alice.
- La reine veut te voir.
- Je savais qu’elle voudrait me parler un jour ou l’autre. En espérant qu’elle ait au moins retrouvé mon frère. Alice soupira
- Et qu’elle ne veuille te fiancer au premier idiot venu. Va la voir, et provoque-la un bon coup qu’elle comprenne que tu n’es pas un pion sur son échiquier royal. Bon vent, sœur gardienne. Kimiko fit un léger signe de la main avant de se détourner vers les combattants.
Alice soupira et regarda le ciel rouge constellé d’étoiles violettes. La nostalgie s’empara d’elle quand elle vit une statue représentant Mascarade, masque à la main. Cette époque sonnait comme une liberté perdue à ses oreilles. Depuis un vide creusait sa poitrine, amplifié par la disparition de Lync. Elle se déplaçait à sa guise à travers les mondes, incognito, à l’époque. Maintenant, elle ne pouvait plus, son identité connue. Sa royale mère lui avais coupé la plupart des vivres, magiques, familiales ou monétaires. Elle n’avait plus vu son frère depuis des années. Ni personne d’autre que son grand père d’ailleurs. Car avoir une fille qui ne peut plus œuvrer pour le bien de son royaume était inutile. Bien sûr.
Alice bifurqua dans une ruelle et sortit une chaînette  à laquelle était accroché un pendentif violacé en forme d’étoile. Elle mit ce collier autour de son cou et continua son chemin dans cette cité noire en direction de la haute couronne au sud de la ville. Les couronnes étaient disposées selon de cercle  de représentation classique des six anciens mondes attributs des bakugans. Comme ce qu’elles étaient censé représenter, ces couronnes abritaient les habitations des combattants et bakugans correspondant à l’attribut concerné. Et seuls eux avaient le droit d’y habiter et circuler. Les autres devaient posséder un laisser-passer comme, par exemple, le collier de la combattante.
La russe rousse marchait lentement, essayant de paraître la plus discrète possible. Darkus’s crown était un quartier  assez… disons pointilleux sur l’étiquette spécifique à son histoire. Chacun se devait de s’habiller aux couleurs du quartier, et, cas échéant, se retrouvait à payer une amende. Alice était exemptée de cette règle de par son pendentif « royal ». Et surtout qu’elle n’avait pas eu accès à sa chambre ici pour se changer. Elle se hâtait quand même, ne voulait pas se faire interpeller par un envoyé de sa mère. Elle tenait un minimum à sa paix. Son cheminement fut long, plongé dans l’obscurité et l’air frais du quartier, gens et bakugans circulant autour d’elle sans la remarquer, bien heureusement.
Le soleil noir rayonnait peu sur Darkus’s crown, l’atmosphère absorbant la lumière. Ses anciennes pensées resurgissaient, les ténèbres envahissant son être.
Les rues spacieuses pavées de dalles d’obsidienne n’étaient que peu fréquentées, les érudits qu’étaient les habitants de la couronne préféraient flâner dans  les bibliothèques et les laboratoires, bien à l’abri de l’extérieur et des distractions qui pourraient les écarter de leurs recherches. Alice rasait toute fois les murs, les agents de sa mère patrouillant dans toutes les rues pour attraper ceux qui aurait réussi à pénétrer dans la couronne  et les punir selon les critères préétablis par la reine. Comme elle était partiellement hors-la-loi et convoquée, ces agents auraient toutes les raisons de la dimension  pour la jeter au fond des cachots jusqu’à son audience. Cachots cités « invivables » par ceux qui en était un jour ressortit.
Il y avait aussi les scientifiques adulant la personnalité secondaire d’Alice et qui la prendrait en embuscade pour l’examiner et comprendre le changement de forme lié au changement de personnalité. Car cette personnalité, femme alter égo de Mascarade, tant dans le talent que dans le physique, qu’elle pouvait à l’époque de son anonymat intervertir avec son jumeau, pourvu du même don qu’elle. Le dernier échange n’ayant pas été annulé, elle s’était retrouvée avec la personnalité secondaire de son frère, disparu juste avant de pouvoir échanger à nouveau.  Et son arrivé sur Terre avait mis à mal Mascarade, personnalité secondaire de son jumeau, jusqu’à le cloitrer dans son esprit.

Laisse-moi être cet espoir qui sera le tienWhere stories live. Discover now