IV. Révélation

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On a bien trop souvent insulté les forces de l'ordre. N'oublions pas que certains sont des personnes bien, même si d'autres ne mériteraient pas la qualification " d'êtres humains ". Le 23 mai, chacun l'aura prouvé.

Un cortège d'environ deux-cent personnes. Une interview de Mme El Khomri dans les bureaux de La Provence. Une trentaine de gendarmes.

Je n'irais cacher à personne qu'en y allant on tentait de se réconforter. On essayait de se dire que ça ne servait pas à rien, qu'on ne ratait pas nos cours pour rien ; que nos actions étaient utiles et valaient la peine de subir parfois quelques coups mentaux comme physiques. On tentait de se dire qu'on avait encore un peu d'espoir pour changer cette loi, pour sauver notre nation. Nous n'avions qu'une chose en tête : parvenir à la voir et enfin pouvoir dire ce qu'on pense en étant sûr d'être entendus. Être entendu sans que certains médias transforment nos paroles ; juste nous, face à elle pour lui expliquer dans le plus grand des calmes que cette loi ne convenait pas à la France. Pour qu'elle entende enfin, de la part de personnes raisonnables, que nous vivions en démocratie et que la 49.3 ne respectait en aucun cas notre pays.

« On a toujours voulu se faire entendre. On a fait des manifestations de toutes sortes pour pouvoir être entendus. On a bloqué des endroits improbables pour faire parler de nous, de notre lutte. On a pris des risques, on a vécu des moments douloureux. Certains ont vécus une à plusieurs gardes à vue ; d'autres ont connus le poids de la violence policière. Aujourd'hui, nous pouvons leur montrer que nous sommes des personnes bien qui souhaitent seulement un avenir mérité. Nous avons la possibilité d'aller plus loin, nous pouvons décider de bloquer la figure de l'économie actuelle, nous pouvons nous exprimer ouvertement en étant sur que la principale actrice en rapport avec cette loi pourra enfin entendre nos revendications. Elle pourra entendre le peuple s'exprimer. Alors ne vous taisez pas, car c'est le moment de parler. » pensions-nous.

Beaucoup ne sont pas venu ; beaucoup me disaient hyperboliquement

" vous allez vous faire tuer, c'est un suicide d'aller là-bas. " J'y suis pourtant allée. N'allez pas croire que je désirais rentrer dans un affrontement certain en y allant. J'ai juste pensé que s'il y avait bien une manifestation où il fallait aller, c'était celle-ci. C'était l'une de nos dernières chances d'enfin être entendu. Nous étions deux-cent environ ; certes ce n'est pas beaucoup. Mais nos slogans, notre solidarité, notre amour envers la France, et le reste de notre espoir, lui nous a soudés et unis comme jamais.

Alors oui nous y sommes allés, un petit comité il est vrai mais assez grand pour avoir de l'importance. Arrivés là-bas, sans aucun étonnement, les slogans se sont fait entendre, les provocations verbales sont revenues dans la foule. Mais à la plus grande surprise de beaucoup de militants, les gendarmes sont restés respectueux. Des sourires, des rires, des petits mots gentils. Voilà ce que la manifestation a apporté. Je ne pense pas que ce rassemblement ait changé les choses concernant cette loi mais une chose est sûre : en ce jour, beaucoup de personnes sont rentrés chez elles épanouies, heureuses de l'instant vécu. Les gendarmes, les policiers, les CRS sont des humains. Voilà ce que nous apprenions là-bas. Plus aucune rivalité ; plus de manifestant, plus de force de l'ordre. Simplement des humains.

Alors non, c'est vrai le but de départ pour lequel nous étions venus n'a peut-être pas abouti et notre mission n'a pas totalement été accomplie ; mais les personnes faisant partie de la manifestation ont découvert un nouveau visage de la part des forces de l'ordre. Et les forces de l'ordre ont découvert un nouveau visage des manifestants. Nous avons tous compris que les forces de l'ordre n'étaient pas des personnes exécrables (enfin pas tous) mais simplement des humains qui exercent leur fonction pour nourrir une famille. Et ils ont compris eux aussi, que ce qu'ils appelaient " les casseurs " n'étaient qu'une infime partie des manifestants et que chacune des autres personnes formant les cortèges n'étaient que de simples humains en quête d'une démocratie respectée. Et je pense que c'est tout aussi enrichissant.

Chacun en aura tiré plus ou moins quelque chose mais chacun saura désormais que derrière chaque personne se cache une âme et un cœur, qui sont parfois obligés d'intervenir en fonction du pouvoir qu'ils occupent dans la société.


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