Chapitre VIII

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De retour dans la chambre de Thomas, assise en tailleur sur le lit, mon cerveau tente d'assembler un puzzle selon un modèle auquel les pièces ne correspondent pas. Elles ne s'emboîtent pas, elles se détruisent les unes les autres à force d'essayer. 

J'essuie une larme qui s'est échappée de mes yeux, avant d'entendre la porte s'ouvrir lentement en grinçant, créant un malaise de quinze secondes. Un visage qui m'est encore inconnu apparaît alors. Une femme d'une trentaine d'année, grande brune aux traits déjà très prononcés s'approche de moi avec un sourire aux coins des lèvres. 

Il s'agit sans doute de la mère de Thomas, Madame Flint. Elle s'avance vers moi avec une démarche gracieuse, presque féline. Quelque chose de rassurant se dégage de cette femme, me rassurant immédiatement. Doucement, elle s'assoit à côté de moi, sans un mot.

— Bonjour Samantha. Comment te sens-tu ? Me demande-t-elle gentiment en se mettant face à moi.

Sa main droite vient se poser doucement sur mon épaule. Dans ses yeux, je ne lis que de la tendresse et de l'amour, chose que je n'avais pas vu depuis très longtemps dans les yeux de ceux qui me côtoyaient. Hormis avec Madame Henoch, qui se comportait avec moi comme la mère dont j'ai toujours rêvé. 

Rien que de penser à elle, un nœud se forme dans mon estomac et je baisse les yeux. Les larmes perlent aux coins de mes yeux et je me retiens de pleurer dans un effort presque surhumain. Elle me pense morte et je ne peux m'empêcher de trouver cela terriblement égoïste de la part d'Aoile. 

Pourquoi n'a-t-elle pas pensé que ma mère adoptive pourrait être de mon côté ? Certes, elle ne croirait pas à cette histoire de Banshee et de créatures surnaturelles, mais elle finirait bien par admettre que j'ai raison en me voyant en action...non ? Finalement, je sors de mes pensées pour répondre à Madame Flint, qui attend sa réponse.

— À dire vrai, je suis confuse. C'est...c'est difficile à digérer, j'avoue en passant ma main dans mes cheveux.

La trentenaire ne répond pas, se contente de me regarder dans les yeux. Elle pose son autre main sur ma joue et je remarque que ses eux sont brillants, comme si elle allait pleurer. Elle a l'air de voir quelque chose en moi, comme les grands-parents lors des soirées de famille, ou les très vieilles connaissances qui ne nous ont pas vus depuis des années. 

J'avais souvent eu ce regard, les membres de mes anciennes familles cherchant toujours un point commun entre moi et mes parents adoptifs. J'envie Thomas pour être tombé sur une femme aussi chaleureuse dès le départ. J'aurai adoré que ma première famille d'accueil soit aussi gentille. 

Malheureusement pour moi, ma première famille d'accueil ne m'a prise que pour toucher des allocations familiales. Avec trois enfants, ils avaient des tarifs réduits sur beaucoup de chose, ainsi que l'aide de l'Etat. 

Je ne peux pas dire qu'ils m'aient mal traités, mais je n'étais pas aussi choyée que Thomas semble l'être. Et puis de toute façon, la famille entière est morte quelques semaines après mon arrivée, dans un accident de voiture auquel j'ai miraculeusement survécu.

— Tu as les mêmes yeux que ton père, murmure-t-elle pour elle-même.

Devant cette confession, je perds tous mes moyens. Que dire à cette femme qui semble avoir connu mes parents biologiques ? Enfin, plus spécifiquement mon père, vu qu'elle n'a pas mentionné ma mère. 

A-t-elle eu une relation quelconque avec mon père, raison pour laquelle ses yeux lui seraient restés en mémoire ? Parfois, je me demande vraiment où mon cerveau va chercher ce genre d'explications. 

Pourquoi est-ce qu'une personne ne se souviendrait d'une autre que s'ils avaient été amants ? Je suis vraiment niaise parfois... Devant ma surprise, Madame Flint émet un rire léger qui réchauffe mon petit cœur meurtri. 

Les Chroniques d'Idan (tome 1) : La Dernière BansheeWhere stories live. Discover now