L'origine du culte de Mairgean

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Avant l'unification des Hautes et Basses Terres par Rhuadan et ses descendants, Brodhach était la capitale des basses terres et les Cornovii était la plus puissante et la plus riche des tribus. La légende raconte qu'en des temps lointains, bien des années avant le jour où Bran Vendigeit vint pour unir les tribus d'Erin, les rois des Cornovii furent confrontés à de terribles créatures marines venues de l'Ouest sur des navires aux voiles noires qui, tous les cinq ans, se livraient au pillage sur leurs terres emmenant nourriture, richesse et gens en esclavage. Impuissant à les arrêter, les souverains des cornovii s'étaient résolus à leur payer un tribut. Avant chaque arrivée, ils leur livraient sans combat ce qu'ils venaient chercher.

Ce tribut fut payé jusqu'à l'élection du roi Ervan. C'était un homme courageux qui avait la réputation d'être un chasseur habile, un meneur d'hommes et d'un chef avisé. Trois mois après son élection, on vint le prévenir de la terrible nouvelle : les monstres étaient de retour ! Confiant en son courage et dans la force de son bras, le nouveau roi refusa de payer tribut. Il lança ses troupes contre les ennemis marins et entama le combat. Au début, galvanisé par leur roi, les guerriers cornovii firent un massacre puis, alors que la victoire semblait être à portée de main, une brume venue de la mer vint recouvrir le champ de bataille. Lorsqu'elle se dissipa toutes les créatures tuées étaient de retour debout ! Le massacre changea de camp et seul Ervan et sa garde rapprochée parvinrent à retourner à Brodhach. Les monstres ne parvinrent pas à passer les murs de la cité et se vengèrent en pillant trois fois plus que d'accoutumée. Avant de partir l'un d'eux s'avança jusqu'au portes de la cité. De loin on aurait dit une créature squameuse, semblable à un odieux mélange entre un homme et des animaux marins. Pourtant, lorsqu'il parvint aux pieds du dùn, on aurait dit un homme d'une grande beauté, bien que quelque chose de malsain semblait émaner de lui. Il parla d'une voix forte qui retentit avec netteté jusque dans l'enceinte de la maison des rois, où Ervan faisait soigner ses blessures. Ce qu'il annonça plongea les habitants dans le désespoir : désormais, il viendrait tous les trois ans réclamer leur tribut. Et celui-ci serait deux fois plus important qu'auparavant. Par ailleurs, pour montrer leur repentir : les cornovii devraient chasser leur roi qui avait pris les armes contre ses maitres. Puis sur un rire sinistre, il s'éloigna et entra dans les vagues pour y disparaître. Après son départ, Ervan fut jugé et banni de Brodhach, jusqu'au jour où il reviendrait avec l'instrument de la victoire.

Le roi erra durant cinq longues années. Un jour, il sauva une bandrywdh(1) d'une meute de loups affamés. Afin de le remercier elle lui offrit l'hospitalité, partagea sa couche et lui transmit son savoir. Elle lui révéla ensuite un secret. Non loin sa demeure une étrange créature petite et difforme, répondant au nom de Grimr forgeait des armes et des outils de grande qualité. S'il pouvait le convaincre de forger une arme, alors sa victoire contre les monstres venus de la mer serait assurée ! Ervan partit à la rencontre de la créature et fut surpris de voir qu'elle avait la taille d'un garçon de dix ans mais l'apparence d'un vieillard. Le kornandon(2) commença par refuser d'aider le roi. Celui-ci le défia alors à un concours d'énigmes avec comme enjeu l'arme demandée s'il gagnait ou son esclavage durant trois ans s'il perdait. Grâce à la druidesse, Ervan remporta la victoire. Le faë dut s'incliner et forgea donc une épée pour Ervan. Il la nomma Leochain (3) , car avec elle il taillerait ses ennemis en pièces. Triomphant et heureux il revint vers son amante. Celle-ci le félicita mais refusa de le suivre dans son royaume. Elle sourit et déclara à Ervan :

Une autre que moi épousera
Le fils d'Owen, le dragon
Sur la blanche onde mouvante
Et par l'épée vaincra les fomoires
Il y trouvera, le righ cornovii
Celle qui portera sa lignée

Puis elle leva les bras et à sa place apparut une corneille(4) qui s'envola et partit haut dans le ciel de cette journée de Samain. Le roi mit fin à son exil et revint à Dùn Brodhach. Il arriva juste au moment où l'émissaire des monstres, collectait le tribut. Armé de Leochain, Ervan défia le fomoire ! Grâce à sa lame fabuleuse, il infligea de terribles blessures à son ennemi, et finit par le terrasser. Ervan retrouva son titre et mena alors une offensive contre les fomoires, utilisant la mer qui avait gelée comme champ de bataille et remporta une grande victoire. Gravement blessé il allait repartir pour se faire soigner quand il aperçu, pris dans un filet, un dauphin que les fomoires voulait pêcher. Pris de pitié, le roi usa ses dernières forces pour délivrer l'animal. Il s'évanouit et se réveilla dans un palais, ses blessures pansées et son épée posée près de lui. Le maitre du palais était un roi faë, maître de la baie de Brodhach. Quant au dauphin c'était sa plus jeune fille venue assister au combat. Les fomoires avaient voulu l'emmener en tant qu'otage. Le roi faë demanda à Ervan ce qu'il pouvait faire pour le remercier. Ervan demanda alors que la douceur règne toujours sur son tuath même au cœur de l'hiver. La noblesse de ce vœu toucha le souverain qui accepta et offrit à son homologue un deuxième vœu. Ervan, qui était tombé amoureux de sa fille, lui demanda sa main. La princesse accepta et revint avec lui à Brodhach. On ne connut jamais son vrai nom, mais ces sujets l'appelèrent: « Mairgean(3) ». Si elle quitta la cité après la mort de son époux, sa bénédiction est toutefois restée et des récits parlent de souverain(e)s de Brodhach s'unissant avec des faës des eaux. Le souvenir de la reine faë est perpétué dans la mémoire du clan des Mac Ervan sous la forme d'un dauphin. On retrouve ce symbole dans les bijoux portés par les hommes et les femmes du clan, peint sur des murs ou sur les boucliers des guerriers du clan.

1. Littéralement : une "femme-druide", en combrox (la langue de Pryddein) "Ban" signifie "femme".
2. Terme combrox pour désigner les nains (la créature légendaire).
3. Ce qui signifie « Tailleuse » ou encore « Coupeuse ».
4. On pense que c'était la déesse Morrigan.
5. Ce qui signifie « Mer claire », sans doute en rapport avec la couleur de ses yeux.

Légendes d'Ynn PryddeinWo Geschichten leben. Entdecke jetzt