Chapitre 15

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Bercée par la mélodie des gouttes de pluie, Jade s'était endormie, la tête posée sur mes genoux. Mon regard contemplait ses traits. Je retraçais chacun d'eux du regard, ne pouvant m'empêcher de la trouver belle. Elle se maquillait que très peu et s'habillait simplement. Elle n'avait pas besoin de plus d'artifices que ceux déjà présents dans ses yeux et son sourire.

La sonnerie de l'interphone troubla son sommeil ainsi que ma contemplation et elle se redressa. Je me levais pour décrocher tandis que la sonnette raisonnait d'impatience. J'avais déjà une très claire idée de qui se trouvaient plus bas. J'apportai le combiné à mon oreille.

- Ouais ?

- Tu nous ouvres ? reconnus-je la voix d'Alpha.

Je jetai un œil derrière moi. Jade s'était levée et portait une attention particulière à mon étagère remplie de feuilles éparpillées sur les étages. Elle en prit une au hasard et coinça une mèche en cavale derrière son oreille qui perturbait sa lecture.

- Nek ? Il caille, t'attends quoi mec ? s'impatienta mon pote.

J'appuyai sur le bouton pour les ouvrir enfin et sans attendre, les pas de mes amis répandirent la cage d'escaliers. Lorsque je leur ouvris, Jade reposa sa lecture clandestine et souris légèrement. Je priais intérieurement qu'elle eut lu mon rap le plus soft. Je ne l'avais pourtant pas empêcher de lire mes mots.

- Je vois pourquoi t'avais tant de mal à appuyer sur ce fichu bouton, constate Areno en apercevant la jolie châtaigne en entrant dans mon salon.

Cela faisait déjà plusieurs quarts d'heure qu'Areno, Alpha et Sneazz avaient pris place sur mon canapé. Le rire des garçons se mêlèrent très vite avec celui de la jeune femme. Je leur étais reconnaissant de faire oublier l'absence de son frère par leur joie de vivre. Son visage s'illuminait à chaque connerie de Mo. La nuit commença à tomber et on commanda des pizza que l'on accompagna de bière sans nous départir de nos sourires.

Jade avait garder son sourire après que les gars furent partis et je voulais qu'il reste toute la nuit sur ses lèvres. Je pris sa main dans la mienne et l'emmena sur le toit de mon immeuble. La nuit était bleue noire et on pouvait apercevoir les étoiles dans le plafond de la capitale. L'air était humide dû au temps de la journée mais cela ne la dérangeait pas.

- C'est sublime, murmura-t-elle comme pour ne pas faire peur aux points lumineux au-dessus de nos tête.

- J'ai pas vu sur la Tour Eiffel mais j'ai le ciel, dis-je en levant mes yeux bruns vers les cieux.

Elle s'approcha du garde-corps et appuya ses coudes dessus. Je me mis à sa gauche. Elle était emmitouflée dans le sweat de son frère. Mes iris tombèrent sur son grain de beauté qui la rendait irrésistible lorsqu'elle souriait. Elle tourna tout d'un coup le chef vers moi et mon regard prit la fuite vers la poche de mon jeans pour en sortir mon paquet de cigarettes. Un léger rire sortit de sa gage face à la situation. Je sortis une tige et l'allumais. Je la regardais à nouveau et après avoir recraché la fumée, lui en proposai une.

- Non merci, j'ai déjà assez de problème comme ça, déclina-t-elle en fixant le bâtiment d'en face.

- Y'en a qui croit que ça peut les faire disparaître.

Ses prunelles se tournèrent vers moi.

- Et toi ?

- J'en sais rien, j'fais pas parti de ces gens qui croient que leurs soucis vont partir en fumée après quelques taffes en tout cas. C'est sans doute une mauvaise chose mais vaut mieux pour moi que je fume de simples cigarettes qu'une autre merde plus nocive.

Elle hocha la tête avant de me répondre.

- Qui es-tu Ken ? Tu veux vivre dans le vice ou dans la quiétude ?

Je souris en l'entendant reprendre une phrase d'un son encore brouillon.

- Je suis rappeur, répondis-je à sa première question, celle qu'elle m'avait déjà posé à plusieurs reprises.

- Tu fais des concerts ? se fit-elle d'avantage curieuse.

J'hochai le chef.

- Pas seul, les trois idiots que tu as rencontré ce soir en sont aussi.

On avait pas des têtes de rappeurs, c'était certain mais on s'en fichait, on trompait les préjugés quand on ouvrait la bouche devant un mic'.

- J'veux voir ça, un bouc, un renoi, un chevelu et un cure-dent sur une scène, c'est à pas rater.

Je ne pus m'empêcher d'éclater de rire.

- Y'a aussi un breton qui kicke avec nous, ajoutai-je.

Ses éclats de joie vinrent se joindre au miens, quitte à faire peur aux astres nocturnes.

Mon cœur avait toujours eu ce rythme monotone jusqu'à ce qu'elle y entra cet automne là.

Désastreux AmoureuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant